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Petit guide d’étiquette pour être un.e bon.ne allié.e des personnes trans
URBANIA et Canal Vie s’unissent pour vous aider à éviter les faux pas en ce qui concerne les réalités des personnes trans.
Cette année, je célèbre mon 10e anniversaire de transition. Alors en juillet, j’ai eu droit à deux gâteaux (c’est miam!) : un pour mon anniversaire de naissance, et un pour ma seconde naissance.
Cet anniversaire est important pour moi parce qu’il représente le jour où j’ai enfin cessé de vouloir mourir. Et je suis bien honorée que l’équipe d’URBANIA m’ait fait confiance pour écrire un « petit guide d’étiquette d’une personne alliée ».
La crainte de blesser une personne trans lorsqu’on s’adresse à elle ou qu’on parle d’elle peut être un facteur de stress pour bien des gens, même bien intentionnés. Ce petit guide se veut donc léger, mais aussi non exhaustif. Tout ce que je raconte ici, sachez que je l’ai appris moi aussi, avec le temps, sur le tas, puisque je n’avais pas accès à cette information dans les années 2000 de mon adolescence en région.
Être une personne trans, très souvent, ce n’est pas de tout repos. Chaque jour, nous faisons face à des micro-agressions qui, aux yeux des personnes en dehors de la communauté trans, peuvent sembler anodines, mais qui, souvent répétées, peuvent avoir un impact considérable sur notre santé mentale.
Attention : micro-agression ne veut pas dire « mini ». Ça ne veut pas dire « moins importante » non plus. Ce qu’une personne perçoit comme traumatisant l’est pour elle, et sa perception est tout à fait légitime.
En finir avec le spectacle trans
Quand on rencontre un.e professionnel.le de la santé mentale, ce n’est pas pour avoir un diagnostic de personne trans, c’est pour avoir une confirmation que notre vécu difficile est en fait de la dysphorie de genre.
Il y a autant de façons d’être trans qu’il y a de personnes trans.
J’espère qu’on comprend bien maintenant, en 2022, que l’on ne rentre pas dans un bureau de médecin en tant qu’homme pour en ressortir par magie en femme. Nous ne sommes pas un spectacle, nous ne nous transformons pas : nous transitionnons, et souvent, c’est dès un très jeune âge que nous nous sentons différent.e.s de ce que la société attend de nous.
C’est important aussi de souligner qu’il y a autant de façons d’être trans qu’il y a de personnes trans, et que ce n’est pas tout le monde qui désire subir l’opération d’affirmation de genre ou d’autres chirurgies. Chaque personne vit sa propre vie.
Dyspho quoi?
La dysphorie de genre (ou incongruence de genre) est « caractérisée par une identification forte et permanente à l’autre genre associée à une anxiété, à une dépression, à une irritabilité et, souvent, à un désir de vivre en tant que genre différent du sexe attribué à la naissance », selon Le Manuel Merck.
Dans mon cas, cette dysphorie s’est manifestée par une inaptitude à travailler pendant trois ans. C’est long, se détester chaque jour de ne pas être capable de vraiment entretenir des liens avec le monde. Mille quatre-vingt-quinze jours, oui, c’est long.
Mais le truc vraiment le fun, c’est le contraire de la dysphorie : l’euphorie de genre, ce sentiment de bien-être ou de confort lié au fait d’être respecté.e dans son genre ou d’être capable d’exprimer son genre.
Mais le truc vraiment le fun, c’est le contraire de la dysphorie : l’euphorie de genre.
Pour moi, c’est quand mes longs cheveux flattent le milieu de mon dos, quand on utilise les bons pronoms pour parler de moi, quand je réussis à ne pas me tacher avec mon mascara, quand je me dis que la bosse dans mon maillot de bain, c’est mon sexe et c’est ça. Quand mon chum me dit « T’es belle, comme tu es » et qu’il ne remet pas en question qui il est pour autant. Ou quand je suis capable de me le dire dans le miroir.
Watch out, ces journées-là, je paye le restaurant ou les verres de mes ami.e.s qui boivent.
Ce n’est pas une maladie mentale
D’ailleurs, il est à noter que depuis le 27 mai 2019, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a retiré la transidentité de la liste des maladies et l’a insérée dans le chapitre « Santé sexuelle », sous le terme « incongruence de genre ».
C’est certes un pas de plus vers une meilleure compréhension de cette réalité, mais il reste encore des progrès à accomplir, notamment quant à l’association faite entre la transidentité et la sexualité, alors qu’il s’agit d’abord et avant tout d’une identité. Plus d’information à ce sujet par ici.
Écouter
En tant que femme trans, je m’adresse la plupart du temps à des personnes cisgenres (dont le genre correspond au sexe qu’on leur a assigné à la naissance). Ça fait en sorte que j’ai besoin d’être écoutée. Pas seulement entendue.
Entendre, c’est recevoir des sons et voilà. Écouter, c’est recevoir des sons et les traiter avec des émotions. Dans une ère d’individualisation poussée à son paroxysme, écouter quelqu’un est plus que sexy.
Ne pas présumer qu’une personne est d’un genre ou un autre ni la mégenrer
De nombreuses personnes trans décident de porter – ou non – les vêtements associés au genre auquel elles s’identifient. Et by the way, les vêtements n’ont pas de genre. On ne peut donc jamais présumer qu’une personne est d’un genre ou un autre en se basant sur la façon dont elle est vêtue ou sur son allure.
Lorsqu’on veut s’adresser à quelqu’un dont on ne connaît pas le genre, on peut utiliser des formulations générales ou attendre que la personne parle afin de voir les pronoms qu’elle utilise.
Ces chroniqueurs et chroniqueuses qui comprennent tout croche
Pour parler des personnes trans, plusieurs chroniqueurs et chroniqueuses populaires utilisent les pronoms contraires à ceux souhaités par la personne en question. Dans le genre : « Avant c’était un gars. Maintenant, il est une femme. »
Non, avant, je n’étais pas un gars. J’étais une tristesse que je croyais infinie.
Non, avant, je n’étais pas un gars. J’étais une tristesse que je croyais infinie.
Mégenrer volontairement quelqu’un, c’est d’une cruauté sans nom, puisqu’il n’y a rien de pire que de ne pas être reconnu.e comme on le souhaite. Nier l’identité des gens, c’est les tuer à petit feu.
Mais je vous rassure, si vous ne faites pas exprès et que vous vous trompez de pronom en vous adressant à quelqu’un, c’est tout à fait OK, et vous pouvez vous reprendre. Il y a toujours cette façon de faire bienveillante qui consiste à s’excuser et puis voilà.
Il ne faut pas oublier que nous sommes humain.e.s. Alors, d’un côté, il y a les humain.e.s, et de l’autre, des chroniqueurs et chroniqueuses payé.e.s pour attiser la haine, diviser les gens et ne pas gérer leur trop plein de rage et d’incompréhension. On parle ici de transphobie pure et dure.
« Né.e dans le mauvais corps »
Il en va de même pour l’expression « né.e dans le mauvais corps », qui est à éviter. Encore aujourd’hui, on parle de moi comme d’une personne qui est née dans le mauvais corps, même si je spécifie que ce n’est pas le cas. C’est le seul corps que j’ai, et il est parfait comme ça.
Dénoncer la transphobie
Si vous êtes témoin de transphobie et que votre vie n’est pas en danger, pourquoi ne pas intervenir? Ou peut-être même en faire un statut Facebook afin d’éveiller votre entourage et de conscientiser les gens?
J’ai un jour été éjectée d’un bar parce que j’étais une femme trans qui « dérangeait », alors que tout ce que je faisais, c’était de boire une bière pas bonne. Ça aurait été cool, un peu de soutien de la part des gens alliés cette fois-là.
En somme, ce n’est pas parce qu’on ne comprend pas quelque chose que ça n’existe pas. Par exemple, je ne comprends pas le mécanisme qui fait qu’on peut entendre de la musique, et pourtant, je l’entends bel et bien. Portons attention à la musique de chacun.e, quel que soit son style ou son genre!
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Quoi de mieux que de se plonger au cœur du parcours de personnes trans pour mieux comprendre leur réalité? C’est ce qu’on vous invite à faire en regardant l’émission Un nouveau jour, diffusée tous les lundis à 19 h 30 sur les ondes de Canal Vie (ou en rattrapage sur noovo.ca pour les abonné.e.s). Le premier épisode est maintenant accessible sans abonnement sur noovo.ca!