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La nomination de Christian Lépine est peut-être la chose la plus chienne qui soit arrivée à la religion depuis la révolution tranquille.
Vous pourriez croire que les positions archaïques du nouvel archevêque de Montréal me font peur. Euh, non. Pas du tout. En ce moment, je suis beaucoup plus inquiète pour la religion que pour les homosexuels, les cliniques d’avortement ou les adolescents qui veulent s’envoyer en l’air avant le mariage.
Ce n’est même pas en raison des positions archaïques dudit Mgr que je m’inquiète pour la religion : tout le monde sait que la religion catholique s’oppose à l’avortement, au mariage gai et à toutes sortes de joies qui font consensus au Québec depuis 1960. Peu importe comment ils patineront pour emberlificoter la chose, aucun soldat du pape n’endossera un jour le mariage gai. Ça, ce n’est pas de la nouvelle.
Ce qui m’inquiète plus, c’est la façon de s’exprimer du bonhomme. Mgr Turcotte nous avait mis en garde, presqu’avec un complexe d’infériorité, qu’il s’agissait d’un intellectuel. Or, des intellectuels débordant d’obscurantisme comme ça, même Nouveau Projet n’en voudrait pas. Ce n’est pas d’être intellectuel que de répondre évasivement à des questions pourtant très concrètes comme «trouvez-vous que l’homosexualité est un trouble du développement?».
«Ce que je pense, c’est qu’un homme ça existe, une femme ça existe, et les gens ont des questions sur le sens de la sexualité. Il n’y a pas de réponse définitive, mais dans la sexualité, il y a comme une quête de bonheur, mais en même temps on sait qu’il y a beaucoup de blessures». Pas pour me vanter mais je me serais mieux débrouillée que ça dans mon cours de philo pour enfants au primaire.
Je suis heureuse que Tout le monde en parle ait mis en ligne l’entrevue du nouveau patron des prêtres québécois. À la première écoute, j’avais trouvé qu’il s’agissait d’une très mauvaise entrevue, constat qui s’est confirmé à la réécoute. Quand on interviewe quelqu’un, il arrive souvent qu’on se fasse enfirouaper par des réponses bancales qui ne veulent absolument rien dire, mais que l’on accepte comme les réponses de la personne. On se dit qu’on arrangera ça au montage. Chez les journalistes à l’écrit, c’est lorsque vient le temps de retranscrire le fruit de l’entrevue que l’on réalise que, merde, la personne n’a absolument rien dit. Je sais, j’ai fait l’exercice avec l’interview de Mgr Lépine. Avec l’expérience, on s’en rend compte sur le coup et on relance l’interviewé jusqu’à ce qu’il donne une réponse concrète, utilisable.
Je ne veux pas dire que Guy A. Lepage et Dany Turcotte ont manqué leur coup sur Mgr Lépine. J’imagine qu’ils ont mis ce qu’il y avait de moins pire au montage. Je crois qu’on a affaire avec cet homme à quelqu’un qui ne possède même pas en lui des réponses à ses propres questions. Crime, il ne sait même pas vraiment pourquoi il est devenu prêtre. Et c’est ÇA qui est dangereux pour la religion catholique. La religion, à la base, c’est supposé donner des réponses à des gens qui sont en quête de sens. Si on n’a pas ça, on se retrouve à lire la Prophétie des Andes en écoutant Enya (ou, en 2012, Grimes).
Je me plais malgré ça à rappeler régulièrement que j’ai demandé l’apostasie en 2009, une procédure toute simple par laquelle vous pouvez vous dissocier complètement de l’Église. J’ai pas fait ça pour écœurer ma mère ou parce que je trouvais que le catholicisme, c’était con.
Moi, le message de Jésus, ça me parle. C’est un message d’ouverture, de pardon, d’acceptation. Dans le film de Zeffirelli, le message de Jésus, c’est beau, mais là, c’est comme si Jésus s’était pris le pire relationniste, un relationniste avec une carte du parti conservateur et un doctorat en langue de bois.
J’ai demandé l’apostasie pour envoyer un message clair à des personnes qui croient que l’homosexualité est une maladie qu’ils peuvent cesser de me compter parmi leurs statistiques. Un message plus clair que cette réponse de Mgr Lépine à la question «quelles valeurs partagez-vous avec le pape?» : «Au sens strict, je les partage toutes, mais la foi chrétienne n’est pas qu’une question de valeurs. C’est une question de personnes, c’est une question de réconfort, c’est une question de miséricorde, alors donc au cœur de la personne c’est toujours la personne au cœur.»
Cliquez ici pour télécharger le formulaire de demande d’apostasie.
Sur ce, bonne semaine sainte.
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