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Bien sûr, j’ai été franchement dégoûtée par le copieux char de Québec-bashing qui nous a été livré cette semaine. Toutefois, il me semble clairement que le Québec ait de sérieuses leçons à tirer sur lui-même, après cette névrose grotesque du “turbangate”.
Le ROC manque certainement de tact lorsqu’il s’invite avec ses grosses savates multiculturalistes dans les bisbilles que nous regardons déjà enfler avec un malaise certain. Eh puis, disons-le: c’est plutôt facile de faire la morale quand on a réglé la question de la diversité culturelle en flanquant tout le monde en silos, en éludant la notion de culture majoritaire et en « flushant » allègrement, par la même occasion, toute possibilité de construction d’une culture commune. Mais une maison n’est jamais bien solide lorsqu’il n’y a pas de ciment pour assembler les parpains…
Au final, dans cette histoire, on aura moins parlé d’accommodements religieux que ressassé les éternelles chicanes de la confédération canadienne. Et on ne retient au fond qu’une chose: on ne s’entend toujours pas avec nos concitoyens canadiens quant à la manière de conjuguer avec la diversité culturelle. Grosse surprise.
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Mais a-t-on profité de la polémique pour réfléchir sérieusement à notre rapport à la diversité culturelle et à l’identité distincte [dont on nous reproche la revendication] qui [avec raison] nous est si chère? Non. Pas d’un ciboulette de iota. Tiens donc.
De toute l’affaire, il ne reste déjà plus dans l’espace public que l’écho d’un choc supplémentaire entre le multiculturalisme canadien et sa charge indéfectible contre l’identité distincte des Québécois; et ceux-ci qui, piqués à vif, ont fini par tenir exactement le rôle odieux qu’on cherchait à leur affubler.
turbangate
À mon sens, ce refus de parler de nous-mêmes avec sérieux et honnêteté intellectuelle nous fait dériver tranquillement vers les derniers retranchements d’un nationalisme vide, dont la pauvreté rhétorique le rendra par défaut exclusif.
Mais, je vous le demande, peut-on vraiment s’en étonner, alors que les accès d’humeur des tribuns populaires se substituent plus souvent qu’autrement aux véritables interrogations collectives?
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C’est comme si la démagogie s’était arrogé le quasi monopole du discours identitaire. En réponse à cette vacuité discursive, les pôles se scindent, toujours plus radicalement, entre les patriotes « purs et durs », et ceux qui ont une vision plus pragmatique, dirais-je, de la question nationale et du projet souverain. Puis entre les deux: rien. Du vide et de l’indifférence. Jusqu’au prochain symbole religieux qui fera prendre la mouche à un effarouché.
1995 aura bientôt vingt ans. Les blessures et le silence humilié entourant la question identitaire sont désormais des obstacles aliénants à notre réflexion collective, rien de plus. Et il ne s’agit pas d’embrasser enfin le multiculturalisme que le ROC aimerait tant nous enfoncer en travers de la gorge. Néanmoins, pour arriver à conjuguer enfin pleinement avec la diversité, peut-être faudrait-il notamment apprendre à se décentrer momentanément de l’argument hégémonique de la culture majoritaire, pour ouvrir un réel espace de dialogue; décomplexé et authentique. Mais surtout, oser « se penser » autrement qu’en réaction à l’Autre.
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Sans cela, nous continuerons à cumuler un réel retard sur nous-mêmes, avec notre structure identitaire imperméable aux changements du corps social.
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