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Osheaga 2021 avec un appareil jetable

Les confessions d’un workaholic amoureux des festivals.

Par
Frédéric Bastien Forrest
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Jour 1 sur 3. T -1 h.

Je suis très fatigué. J’ai ma semaine dans le corps. Ça, c’est la première fois que ça m’arrive. D’utiliser cette expression-là. Et d’arriver à Osheaga fatigué raide.

C’est que pendant la pandémie, comme plusieurs artisan.e.s de l’industrie créative, j’ai accepté ce qui ressemble le plus à une « vraie job » depuis longtemps. En plus de continuer mes chroniques à la radio et mes élucubrations YouTube.

Avant, dans cette vie aisée de pigiste, je pouvais prendre des congés avant et après Osheaga pour vivre l’expérience à 1000 %. Là, je suis déjà fatigué, au jour 1. Et je ne suis même pas arrivé encore.

Récapitulons : au courant des derniers mois, je me suis ennuyé des bains de foule, comme tout le monde. Je trouve aussi que j’ai passé beaucoup trop de temps devant un écran (comme tout le monde?).

Voulant renouer au maximum avec le concept du show extérieur, mais en m’éloignant de mon téléphone le plus possible pour profiter du moment présent™, je veux vivre le rêve post-pandémique à Osheaga avec comme seuls accessoires une montre et un appareil photo jetable.

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Déjà le premier jour, je frappe un obstacle. Ne reculant devant rien pour rassasier ma curiosité infinie devant l’art, j’ai décidé plus tôt cette semaine de me booker des entrevues avec des artistes. Super idée, mais comment se rendre à temps à une entrevue et communiquer avec les attaché.e.s de presse si on a pas de cell?

Fail.


J’aurai donc mon cell, un appareil jetable et une montre.

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Bon, vous n’êtes pas en train de me lire pour m’écouter pleurnicher que je suis incapable de prioriser ma santé physique et mentale plutôt que ma vie professionnelle.

Comme disaient les grands philosophes LLA, c’est la vie qu’on a choisie.

Donc me voici, allongé sur le banc avant de ma Toyota Yaris, stationné dans le parking public de la grande bibliothèque à Berri-UQAM, en train de faire un power nap de 15 minutes avant de prendre le métro pour me rendre à Osheaga. Vendredi, 15 h. Jour 1 sur 3.

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Pro tip : ne JAMAIS se stationner au parc Jean-Drapeau pendant un festival.

Maintenant, allons interviewer Charlotte Cardin.

Ai-je vraiment besoin de vous expliquer pourquoi j’ai envie de parler à Charlotte Cardin?

Dès mon arrivée, je comprends que Charlotte Cardin est LA coqueluche de l’heure. Presque tou.te.s les journalistes que je croise essaient de lui parler.

Pas surprenant. Son album Phoenix est brillant, et elle aussi.

Après Phil Branch de Rouge FM et Meeker Guerrier de Noovo, c’est mon tour de m’asseoir sur une chaise patio dans un décor plastico-naturel et rassurant. J’entends la musique de Kaytranada jouer en sourdine, sur un haut-parleur plus loin. Pendant ce bref moment de grâce, j’oublie les masques, les vaccins, les lineups, le monde qui se tenait trop proche de moi dans le métro et François Legault.

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On parle de bacon. De vodka en Russie. De sa nouvelle toune, un cover de Amy Winehouse version reggaeton.

Après quelques politesses classiques en espagnol, Charlotte m’explique qu’elle lutte contre son anxiété grâce à la musique. Elle salue aussi mon amie Jeanne, avec qui elle est allée à l’école primaire.

Retour à la réalité. J’ai faim. J’ai ma semaine dans le corps et je suis assis sur un petit rectangle de faux gazon dehors, à attendre que le show de Charlotte commence dans quelques heures.

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Ça fait du bien de revoir plusieurs journalistes culturel.le.s, collègues et partenaires de festival lors de mes années MusiquePlus, entre autres.

Je suis aussi heureux de m’être commis à traîner un kit léger. Ça me permet d’être plus mobile. Et plus libre. Deux valeurs importantes en Amérique.

Je mange un cheeseburger. Acceptable dans les conditions, même si je cherche un peu le fromage à la première bouchée.

Le site est super. Les festivaliers et festivalières, artistes et professionnel.le.s de la musique à qui je parle partagent généralement mon enthousiasme D’ENFIN voir des shows. Dehors. Dans un gros festival. La seule chose qui me manque, pour l’instant, c’est la colline.

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La fameuse butte où surplombe le logo Osheaga était précédemment un refuge où les fêtard.e.s allaient souvent digérer leur cinquième Coors Light, ou allumer leur petit bâton de Justin Trudeau entre deux shows. Ça représentait, les années passées, un safe space où on pouvait se coucher dans l’herbe pour contempler le ciel montréalais, et relaxer un peu. J’imagine que ça reviendra avec la normalité, pour les prochaines éditions. Puisqu’il y a moins de public cet automne, on a dû concentrer les efforts d’aménagement plus près des scènes, j’imagine.

Je suis au show de Franklin Electric. C’est un genre de Cowboys Fringants du Montréal anglophone. Du genre de indie Nickelback.

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Je capte une partie du spectacle avec Philippe Renaud du journal Le Devoir. Tous ses commentaires sont extrêmement pertinents et captivants – dignes d’un article en soi. Il me fait penser à Claude Rajotte. Je m’ennuie de Claude Rajotte. Saviez-vous qu’il est maintenant DJ?

Je l’aime, Claude Rajotte.

Juste avant le spectacle de Charlotte, il y a un chanteur qui est signé sur le label de Drake, OVO. C’est le gars du magazine Cult qui me l’a dit. Une autre institution montréalaise. C’est great que le journalisme écrit existe encore.

Bon. C’est enfin l’heure de Charlotte Cardin.

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Ma critique officielle du show : impeccable. Si vous aimez l’album, vous devrez voir ce spectacle. Shout out aux projections d’océan pendant sa quatrième toune, c’est magnifique. Best track : Phoenix.

Samedi. Jour 2. La royauté du rap queb presque au complet était en coulisses de Osheaga 2021.

Pour le show-évènement QCLTUR, il y a genre 25 rappeurs d’ici qui partageront la scène.

Par un beau hasard, je croise le groupe qui se dirige vers la scène, mené par Anodajay (7e Ciel) et Los (Joyride Records).

De Souldia à Shreez en passant par Raccoon et Fouki, l’ambiance est à la bonne humeur sur la scène. Mention spéciale à la légende montréalaise Connaisseur Ticaso, qui a imposé le respect avec son verse et sa présence.

Super show. Fluide. C’est maintenant l’heure de manger.

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Je suis un homme blanc privilégié qui travaille d’arrache-pied depuis mes 17 ans. Ça veut donc dire que parfois, mon budget me permet de me payer des petits luxes.

En voici un : une poutine au homard. Un chef-d’œuvre.

Après QCLUTR, c’est au tour de Zach Zoya.

Un autre prodige de la scène locale. Je l’appelle souvent le « GREAT ANGLO HOPE » du rap queb. En jasant avec lui, je lui dis. Il rit. Il est focus. Un des musiciens avec qui il travaille présentement, Yuki, me dit que Zach est extrêmement compétitif, et qu’il essaie de rester en santé pour pouvoir performer à son mieux sur scène. Ils iront loin.

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Justement, sur la scène, pendant son show, Zach Zoya lance « drinking water is cool! ».

Il a raison. C’est la meilleure chose qui a été dite sur la scène ce jour-là.

Le soleil se couche. Les couleurs d’automne sont magnifiques.

Dimanche, le jour 3 sur 3, je serai aussi à Osheaga. Mais cette fois, je laisserai vraiment la job, mon cell et ma caméra chez moi.

Je pourrai enfin profiter du moment présent™.

Je devrais faire ça plus souvent.

Ça fait moins de belles photos Instagram, mais plus de bien à l’âme.

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