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L’orgasme tabou

Par
Julie Lemay
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“J’ai eu un orgasme quand je me suis fait violer.
There. I said it.”

Voilà, c’est dit. Cette délicate vérité dont on parle peu est mise en lumière par la force des mots de cette éloquente Marie, dans son texte “J’ai eu” .

Marie, there, you said it. Et there we are, pour te dire “on t’a lue, on te comprend et oui, on veut joindre notre voix à la tienne pour lever le voile sur cette réalité”.

Parce que tu le décris bien dans ton texte, Marie. Ça arrive de jouir, d’avoir une érection, d’éjaculer pendant une agression sexuelle et non, ce n’est pas une révélation d’un désir inconscient de vivre cet abus. La force du refus demeure la même, malgré ce corps qui répond d’une façon totalement discordante avec sa volonté. Tu ne deviens pas soudainement consentant parce que t’as éprouvé certaines sensations sexuelles, parce que t’as orgasmé.

On en parle peu. Trop peu. Mais il faut le dire.

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Alors discutons-en de cette réalité physiologique. Parce que c’est ce qu’elle est, une réalité PHYSIOLOGIQUE.

L’orgasme peut être déclenché spontanément, suite à certaines manipulations physiques et non, il n’est pas nécessairement associé à la satisfaction. Par exemple, à une tout autre échelle, si je te chatouille, il se peut que tu frisonnes, que tu lâches un rire, même. Mais as-tu vraiment apprécié l’expérience du chatouillement? Peut-être pas.

Je t’ai stimulé, ton corps a réagi.
That’s it.

Cette équation, elle peut se retrouver au niveau sexuel, dans un contexte aussi trouble que celui d’une agression. Mais on associe souvent l’orgasme avec une escalade de sensations plaisantes. Après tout, ne trouve-t-on pas cette corrélation dans certaines définitions offertes sur les Internets?!

Orgasme = “Point culminant du plaisir sexuel” .
Mais attention! On devrait lire :
Orgasme = “Point culminant et terme de l’excitation sexuelle, caractérisé par des sensations physiques intenses”.
L’excitation sexuelle est une phase indépendante de la notion subjective du désir, déclenchée par une stimulation qui fait en sorte que le cœur se met à battre plus vite, qu’une lubrification peut être produite, que les organes génitaux s’engorgent de sang ce qui peut amener le corps à s’éveiller à certaines sensations menant à l’orgasme. Cet orgasme, il se caractérise par une série de contractions spasmodiques qui entraînent une libération des tensions et donc, un état associé au plaisir (qui ne témoigne pas nécessairement de notre état d’esprit).

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“J’ai eu un orgasme quand je me suis fait violer.
Pis faut dire ce genre de choses, pour pas finir par croire que ça arrive jamais. Qu’on est freak si ça nous arrive. Qu’on mérite les remords, la prison de silences. De se dégoûter.”

Oui, il faut dire ce genre de choses.
Il faut l’aborder, ce sujet difficile, mais oh combien nécessaire.
Il faut parler des différentes réalités entourant l’agression sexuelle, le rappeler que dans 70 % à 85 % des cas, l’agresseur est connu par la victime.

Le rappeler que dans 70 % des cas, les agressions ont lieu dans des résidences privées. Le rappeler qu’on évalue à 90 % la proportion de cas d’agressions sexuelles non déclarées.

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Le rappeler qu’à travers tout ce complexe portrait, il est possible d’expérimenter des sensations physiques loin d’être en accord avec notre vécu émotif.

Aujourd’hui, on joint donc notre voix à celle de Marie, croyant fermement que son texte mérite d’être lu et que son message mérite d’être entendu. La culpabilité, elle devrait être ressentie par la personne qui a pris le contrôle sur l’autre. Pas par celle qui l’a perdu.

**Si ce texte te rejoint et t’écorche une blessure, on pense à toi: tu peux cliquer sur ce lien pour avoir accès à des ressources**

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Pour lire un autre texte de Julie Lemay : “Sexe et Phentex” .

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