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Dérogations aux commentaires abrasifs. Y’a déjà assez de la moitié de l’UQAM et de la blogosphère pour m’haïr (Lolz, ben non c’t’une blague…) Aujourd’hui, je constate l’ampleur de ma cyberdépendance d’étudiante hyperbranchée (au sens littéral, pas dans le sens « chu cool»).
J’avais passé deux semaines de vacances loin des obligations qui me scotchent à mon ordinateur. Mais déjà, mon écran est redevenu le prolongement de ma face, et ma barre Google mon interlocuteur le plus fréquent. Je suis redevenue une enfant-bulle à qui on injecte de la bande passante en perfusion. Une enfant-bulle qui bave des arc-en-ciels sursaturés, assise en rond avec d’autres amis-bulles en symbiose avec leur laptop.
Ça sonne apocalyptique, hein? C’est pourtant à peine exagéré. Imagé, peut-être; exagéré, non. Évidemment, je suis loin d’être la première à souligner le « gangrenage » de nos cerveaux par les instances de l’univers 2.0. Tout le monde a déjà crié à l’OUTRAGE devant l’avilissement collectif causé par l’emprise du Web; de nos experts en réseaux sociaux préférés à ta tante Hortense. Ben oui, les gens passent trop de temps sur les Internets, full un scandale pis toute. « Bah! Mais c’est certainement pas mon cas… »
You wish!
Ce qui me fascine, c’est que l’emprise du Web est devenue tellement insidieuse pour qu’on ne la remarque même plus. Elle s’est insérée à la perfection dans notre gestuelle quotidienne, tant et si bien que ses instances nous semblent normales. Rien de mal à actualiser constamment son Facebook, ou à se gâter des pauses tweet-ta-vie à intervalles réguliers. Eille, 750 amis virtuels, ça s’entretient! Y’a pas de mauvais sang à se faire avec ça : je me détends!
Puis soudainement, il est 4 heures du matin et je suis encore sur 9gag, après avoir streamé 23 How I Met Your Mother. « Eh merde, j’avais pas un article à écrire, moi là? » Ouin.
Sans blague, j’en suis au point d’avoir littéralement inversé mon rythme circadien à force de surfer la nuit. Ma période d’éveil intellectuel optimal se situe maintenant entre 1 et 3 heures du matin. Et à en juger par l’affluence de mon Facebook chat à ces heures, je suis loin d’être la seule. Évidemment, je fais tout sauf prendre de l’avance dans mes engagements. « Non non, la nuit, c’est pour se détendre et enrichir sa culture générale! »
Cute, le prétexte! « Mais c’est vraiment pertinent! Après mon documentaire sur les enfants birmans, je me couche PROMIS! » Et voilà que je procrastine jusqu’à mon divertissement principal, en m’égarant de page en page sans même avoir cliqué « PLAY » sur la console. « Ah ben, les unes du Devoir sont sorties, je vais aller lire ça… Juste après cet excellent remix dubstep de Mon père est riche en t *barnak.»
Bien sûr, j’oublie en cours de route le projet initial. Non seulement je gaspille à outrance des heures de sommeil précieuses, mais j’alimente un déficit d’attention inquiétant. Or, avant l’invention des réseaux sociaux, de la viralité, ou des MEMES, j’avais le pouvoir de focus de Rainman. Aujourd’hui, à peu près celui d’une mouche, ou d’un chaton dans une volière.
À mon sens, cette tendance à intensifier et à éterniser les séances de surfing est quasi généralisée. Okay, si vous allez sur Internet une fois par semaine à la BAnQ parce que c’est contre vos valeurs, faites juste laisser le chapeau sur la table. Pour les autres, osez le constat.
En tous cas, dans mon entourage élargi, cette propension à s’enfermer avec volupté dans une bulle hermétique de divertissement internet est archi-répandue. L’espace individuel n’est plus défini par notre demeure ou par un loisir solitaire ciblé. Il suffit d’une connexion internet pour recréer sa zone de confort et s’y complaire. La transposition virtuelle de notre écosystème social y est même incluse, via les réseaux sociaux. On conditionne ainsi notre addiction, on consolide notre bulle. Honnêtement, avec mon ordinateur et un accès wifi, je pourrais passer plusieurs heures dans une boite de carton sans même m’en rendre compte. Faudrait que j’essaie.
Pire encore, certains « résidus » de notre cyber-existence se transposent désormais dans le réel. « OH MON DIEU, t’as vu le truc sur Facebook hier?! » Et la discussion est lancée. On place les happenings internet au cœur de nos échanges in vivo, comme les faits saillants d’une game de hockey. On ne se conte plus des blagues, on se conte des Memes. On ne potine plus sur la jupe d’une telle, mais sur sa profile picture. On distribue des likes au lieu des tapes dans le dos. On se troll au lieu de se chatouiller. On se inbox des becs au lieu de se frencher. Et on scroll notre fil Twitter au lieu de feuilleter un roman de chevet.
Je n’ai pas encore déterminé s’il fallait que je panique, ou que je l’accepte. Il y a en effet des choses formidables qui naissent de la « virtualisation » de nos interactions sociales et de nos loisirs. À commencer par l’ouverture d’une multitude de débats qui n’auraient su naitre autrement que par le réseautage. Ou tout simplement pour la bonne dose de LOL que je me procure, dans le confort de mon logis.
Par contre je risque d’être myope avant longtemps, et probablement névrosée à force de veiller. Boaf! Anyway, je le suis déjà pas mal, névrosée.