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Ode à Shonda Rhimes, reine de la télé américaine

Portrait de celle qui normalise la diversité à la télévision

Par
Mali Navia
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Shonda Rhimes est la productrice à qui l’on doit Grey’s Anatomy, Scandal, Private Practice, How to Get Away With Murder et j’en passe. Pourquoi doit-on la célébrer en ce jour des femmes? Parce que Rhimes propose depuis des années une télé différente, une télé qui ressemble aux gens qui la regarde. Elle a fait énormément pour la diversité culturelle et les femmes en télévision. Sa particularité est qu’au lieu d’expliquer ses revendications, elle nous les montre. She leads by example. Un processus qu’elle appelle « normalisation » pour éviter le mot « diversité », dont elle n’est pas très fan. Dans chacune de ses séries, on voit des femmes de têtes incarnées par des actrices de toutes les origines. Elle crée des personnages féminins complexes qui vont à contre-courant de toutes sortes de manières. De ce fait, elle contribue à la création d’une nouvelle norme, plus féministe et plus inclusive. En cette journée de la femme, je vous propose une petite incursion dans son univers télévisuel.

« Thank god it’s Thursday »

De 2014 à 2018, la case du jeudi soir lui était réservée sur ABC. Sous le couvert d’un concept intitulé « Thank God it’s Thursday », le réseau diffusait Grey’s Anatomy, suivi de Scandal et de How to Get Away With Murder. Diplômée de l’université Dartmouth, Shonda Rhimes rêvait d’abord de devenir écrivaine. C’est toutefois par le cinéma qu’elle a commencé puisqu’elle est la plume derrière le film Crossroads et The Princess Diaries. Pas des grands films, certes, mais reste qu’ils ne sont pas représentatifs de ce qu’elle allait réellement accomplir. C’est le succès de Grey’s Anatomy qui devient son tremplin. Depuis, elle a l’espace, le médium et les moyens de ses ambitions.

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Deux séries à regarder sans modération

Pour découvrir la télé de Rhimes, rien de mieux que Grey’s Anatomy. On y suit les mésaventures de Meredith (Ellen Pompeo), Alex (Justin Chambers), Georges (T.R. Knight), Izzie (Katherine Heigl) et Cristina (Sandra Oh), cinq jeunes docteurs qui commencent leur internat dans le meilleur programme du pays. Amour, sexe, médecine et bonnes répliques sont au rendez-vous dès le premier épisode. Certes, on peut reprocher à Grey’s Anatomy d’avoir pris une tangente roman-savon ces dernières années, mais les six premières saisons sont excellentes.

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Si vous n’êtes pas du genre série médicale, How to Get Away With Murder devrait être en mesure de vous accrocher. Avec Viola Davis à la tête d’une distribution de jeunes acteurs plutôt inconnus, Shonda Rhimes a réussi un autre coup de maître. Il s’agit d’une série de type thriller-suspense dans laquelle Annalise Keating (Davis), une avocate réputée qui enseigne le droit criminel, doit aider ses étudiants à ne pas être accusés d’un meurtre. Mais l’ont-ils commis? Encore une fois, il faut avouer qu’après deux saisons on a l’impression que la sauce s’étire un peu trop. C’est probablement le mauvais côté des grands réseaux : quand une formule attire les cotes d’écoutes, on ne la lâche pas. Cela dit l’émission vaut le détour ne serait-ce que pour la solide performance de Viola Davis.

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Produire des « normes saines »

Sur son profil IMDB, on peut lire une citation qui se traduit ainsi : « Je ne vois pas pourquoi les gens de la télévision ne ressembleraient pas aux gens qui sont en dehors ». Cette phrase résume très bien la philosophie de Rhimes. Les personnages de ses séries sont des acteurs de toutes les origines et de toutes les tailles. On y voit des femmes de tailles plus fortes avoir confiance en elles sans qu’aucun commentaire ne soit jamais fait sur leur corps. Pas de « elle a de belles courbes » ni de trame narrative qui place leur poids au centre d’une intrigue. Non, elles sont « hot » point final. Ça ne veut pas dire qu’elle ne choisit pas des actrices qui représentent les standards de beauté actuels (Kerry Washington en est un bon exemple), ça veut dire qu’elle fait un effort pour nous montrer autre chose, pour changer le discours.

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Je l’écris souvent : la télévision est un média de masse qui agit comme un producteur de normes. À travers ses personnages, Shonda Rhimes rend normal ce qui devrait être « normal » mais qui ne l’est pas toujours. Des femmes qui portent plus attention à leur carrière qu’à leur apparence physique, des relations inter-raciales sans que la question raciale soit problématisée, des femmes qui ne veulent pas avoir d’enfant et qui ne sont pas marginalisées pour autant, des afro-américains à la tête d’hôpitaux sans que leur autorité soit remise en question à cause de la couleur de leur peau, etc…Bref, Shonda Rhimes contribue à la construction de belles normes. Est-ce que c’est parfait? Non. Parfois ça sent un peu trop l’eau de rose, parfois il y a trop de violons. Ça reste de la télé de grande écoute. Mais je me dis: « tant qu’à faire une télé pour tout le monde, aussi bien l’écrire pour qu’elle le soit réellement ».

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