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Noël, Kyoto et autres “piece of sh*t…”

Par
Aurélie Lanctôt
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Dire que la semaine aurait pu être emmerdante si Justin Trudeau n’avait pas commis cette gaffe en chambre, hier après-midi!

Alors que j’en avais marre de voir sans cesse ressassé le désarroi du temps des fêtes, le Plan Nord et autres feuilletons d’actualité austères dans les manchettes et sur les Internets, voilà une anicroche qui vient pimenter le marasme de notre pseudo-hiver. Okay peut-être pas. Mais la semaine a été tellement plate qu’il m’aura fallu bien peu de LOL pour que je m’énerve.

Depuis que Facebook a instauré l’ingénieuse idée de regrouper par thème les liens partagés sur le fil par mes n’amis, il est devenu on ne se peut plus aisé de prendre en deux temps, trois clics le pouls de l’actualité et du débat populaire (moyennant, bien sûr, d’avoir une concentration raisonnable d’êtres pertinents et allumés dans son réseau d’amis).

Ainsi, cette semaine, ayant à peine eu le temps de feuilleter mes journaux habituels au-delà de leur une – par lassitude, peut-être – j’ai tout de même été informée par vagues de dizaines de liens qu’Harper avait callé le coït interrompu entre le Canada et le protocole de Kyoto, que la province au grand complet semble haïr Noël et sa laïcité obligée (what’s up tous ces trémas?) et que François Legault a décidé de fonder l’union des clowns politisés en s’acoquinant avec l’ADQ. On fronce les sourcils, mais ça manque de piquant en plus d’être terriblement redondant.

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C’est épouvantable : j’ai l’impression que la seule verve dont j’ai été témoin dans les derniers jours s’est manifestée par le biais d’une adolescente franco-ontarienne un peu fêlée (un peu, dis-je?) qui nous a fait offrande de ses harangues xénophobes sur webcam via Youtube. Les vidéos se sont propagées furieusement sur les réseaux sociaux lundi et mardi; mais par souci de ne pas donner prise à ce genre d’initiative qui, somme toute, n’apporte absolument rien au débat public, je me suis abstenue de commenter et surtout de partager. Bleh.

Me voilà bien contrariée! Moi qui attend constamment avec ferveur l’évènement qui fera prendre la sauce ou qui lancera la merde dans’ fan pour qu’on puisse jaser un peu, j’ai été déçue par la le manque de dynamisme des faits saillants de l’actualité de la semaine. Somme toute, on n’aura pu que bailler aux corneilles côté pop-polémique.

Mais où est passée la matière première de l’indignation? Suis-je simplement trop blasée pour formuler des opinions et les défendre avec transports hystériques, ou est-ce l’actualité qui présente les enjeux qui la façonnent de manière ennuyeuse? J’aurais aimé avoir l’occasion de me fâcher, m’obstiner, sacrer…

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Alors au final, heureusement qu’hier après-midi, ce jeune premier de Justin Trudeau nous a servi sur un plateau d’argent un imbroglio de Chambre des communes comme il ne s’en fait plus. Tout à fait gratuitement, en digne fils de son père, il a traité en hurlant le ministre Peter Kent de « piece of shit » alors qu’il répondait en chambre à une question au sujet de Kyoto. Certes, l’incident n’a pas donné lieu à ce que je m’indigne, mais j’aurai au moins ri un bon coup. Les dérapes des députés sensés incarner un modèle d’éloquence et de retenue sont toujours d’une absurdité sans bon sens.

Toutefois, l’anecdote a quelque chose de triste, voire pernicieux. Bien qu’on se soit bien bidonné, une fois que le rire se sera estompé, plus rien de subsistera. Pas d’argument valable, pas de discussion, pas d’avancées : rien. À la moquerie rien ne résiste. Peu d’armes sont aussi diaboliques que le rire, car celui-ci emporte avec lui l’essence du propos qu’il dénigre, lorsqu’il se dissipe. Ainsi, j’ai bien peur qu’on ne retienne de cette histoire que le fait de l’injure, et non son motif…

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En somme, lorsque l’actualité m’ennuie et que je dois en rire pour m’y insérer, j’ai souvent cette réflexion pénible comme quoi le dialogue populaire meurt à petit feu par désintérêt collectif; et que s’il n’y a plus que cynisme et moquerie pour nous interpeller… il ne me reste plus qu’à pleurer.

BREF, je n’ai pas vraiment eu une belle semaine. Pis vous?