Mona de Grenoble : la fée marraine de la relève en humour

Mona de Grenoble ne suit pas le trafic sur l’autoroute du succès. À bord de sa décapotable rose métaphorique, elle file à vive allure et dépasse tout le monde en leur faisant des tatas.

L’ascension stratosphérique de la nouvelle drag queen préférée du Québec n’en finit plus de faire tourner les têtes depuis ses modestes (mais hilarants) débuts au Prochain Stand-Up suivis d’apparitions marquées dans Big Brother Célébrités, LOL : qui rira le dernier?, et de son premier spectacle solo De la poudre aux yeux, les succès s’enchaînent, mais ne se ressemblent pas.

« Tu vas trouver ça cliché, mais quand l’humour est arrivé dans ma vie, j’ai arrêté d’avoir l’impression de travailler. C’est une job qui est un plaisir. Je travaille une heure et quart par soir et je prends un petit verre de vin après le show. Pour moi, c’est pas tellement dur psychologiquement de travailler beaucoup », explique Alexandre Aussant, l’interprète de la colorée Mona.

Et ça tombe bien, parce Mona s’apprête à prendre encore plus de galon : le 24 mai prochain, la drag queen animera le concours mondial de talent d’humour francophone La Relève dans le cadre de Exclam Montréal!

Si vous l’ignorez encore, il s’agit d’une toute nouvelle compétition destinée à couronner la crème de la crème des p’tits comiques. C’est juste normal que ça soit une de nos meilleures joueuses qui l’anime, non?

La Relève, c’est l’extension (ou plutôt l’expansion) du concours Mon Premier Montreux, qui mettait déjà de l’avant les meilleurs talents francophones dans le cadre du Festival du Rire de Montreux, en Suisse. D’abord un concours réservé aux meilleurs talents de l’Afrique et du Maghreb, depuis trois ans, le festival a depuis élargi ses horizons pour accueillir les Européens et vise maintenant la mecque de l’humour francophone : Montréal!

Si vous me permettez une analogie sportive, c’est un peu comme la coupe du monde de la relève en humour. Mais pourquoi est-ce que notre plus beau talent en bas-culotte fluo n’y participe pas en bonne et due forme?

« On m’a souvent suggéré de m’inscrire à des concours, mais je trouve ça trop stressant. Dans le cas de celui-ci, je sais pas trop à quel point mon humour s’exporte. Animer cette soirée-là, ça sera en quelque sorte une étude de marché pour moi », précise l’humoriste natif de Saint-Mathias-sur-Richelieu.

Si vous ne pouvez malheureusement pas y être le 24 mai, sachez que la soirée sera enregistrée et télévisée l’automne prochain sur les ondes de TV5. Six humoristes y croiseront le lol, soit deux issus de chaque continent.

Du haut de ses 31 ans, l’humoriste a toutes les raisons d’être fier de cette nouvelle responsabilité. Ayant jadis animé les soirées d’humour au Cabaret Mado, Mona n’en est pas à ses premières armes en termes d’animation. Pour la drag queen, il s’agit à la fois d’un retour aux sources et d’une nouvelle étape dans une carrière qui se développe à toute vitesse.

Si, depuis 2021, tout semble sourire à Alexandre Aussant, c’est avant tout grâce à un coup de tête pandémique suivi par une série de décisions drastiques.

Avant de devenir la Mona qu’on connaît, Alexandre vivait une double vie comme employé de la SAQ le jour et matante coquine à paillettes le soir. Il y était confortable, mais malheureux. Pendant six ans, il a caché à sa famille qu’il faisait de la drag.

« Quand j’ai commencé dans les environs de 2012, 2013, c’était très champ gauche. Alors, je leur ai menti pendant six ans. Quand je leur ai dit, ils étaient très tristes d’avoir manqué tout ce temps-là. Ils m’ont demandé s’ils m’avaient dit quelque chose qui m’aurait mené à leur cacher ça, mais pas du tout. C’était moi qui n’étais pas capable de vivre avec ça », raconte-t-il.

Les choses se sont précipitées en plein confinement lorsque Alexandre a enregistré, avec l’aide de ses meilleurs amis, une audition de deux minutes pour Le prochain stand-up. Un après-midi qui allait changer le cours de sa vie. « On a rincé tout ça avec une couple de verres de Beaujolais. Ça m’a aidé à partir la machine », se souvient Alexandre en riant de bon cœur.

Moins d’un an plus tard, Mona montait sur les planches du Zoofest avec une heure de matériel, son interprète souhaitant mettre son talent à l’épreuve. La suite, vous la connaissez.

« Je comprends ce que tu veux dire, mais je me fais beaucoup de fun sur les conspis qui disent que les drag queens veulent endoctriner leurs enfants et rendre tout le monde gai. Les messages haineux, je les vois passer. Mais j’comprends. La tournée a beaucoup aidé pour ça. En région, j’avais peur que les salles soient vides ou hostiles, mais c’est plein de monde de party, là-dedans. »

Ce ne sont pas quelques commentaires Internet qui empêcheront Mona de Grenoble d’aller un peu plus haut, un peu plus loin, comme dirait Ginette, et d’animer La Relève s’inscrit dans cette percée vertigineuse dans le monde des paillettes. Elle aimerait y entraîner aussi Alexandre, son alter ego, de plus en plus visible sur les plateaux sans maquillage. « C’est sûr que Mona va toujours faire partie de mon show, mais peut-être un peu moins à un moment donné. Souper et pisser avant un show, c’est un luxe, et j’y prends goût », conclut Alexandre.

La relève de l’humour aura la bénédiction de sa fée marraine le 24 mai prochain. Si on se fie à l’histoire de Mona, ce ne sera pas une consécration, mais plutôt un autre départ canon pour une artiste qui les collectionne depuis quelques années.

Qui sait? Celui-ci lui permettra peut-être de laisser Alexandre aller pisser avant ses spectacles.