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“Mais qu’est-cé que tu t’en vas faire là toute seule?!”
La question de ma mère est légitime. Je viens de lui annoncer que je partais, toute seule comme une grande, fêter le nouvel an à San Diego. Sept nuits dans le centre d’une ville où je n’ai jamais mis les pieds.
La plupart de mes achats de billets d’avion se font sur un coup de tête, donc la réaction de ma mère m’étonne toujours: elle devrait finir par se faire à l’idée, non?
Mais non. Je lui réponds.
“En fait, rien. Je m’en vais vraiment rien faire.”
“Tu pourrais rien faire ici.”
Elle a complètement raison. Rien ne m’empêche de rester chez moi, me reposer, lire chez moi, sortir prendre des verres avec des amis à Montréal, voir ma famille au jour de l’An, aller au cinéma et dépenser moins d’argent.
Toutes mes vacances pourraient se passer ainsi, en fait, et je me serais ramassée un pas pire cashdown pour un condo depuis un esti d’temps.
Mais rien faire ailleurs est tellement plus satisfaisant que de ne rien faire chez soi.
Il y a de quoi de tellement reposant et zen d’être personne.
Être personne.
Tout le monde est quelqu’un. Pas nécessaire de participer à La Voix pour être connue des autres. Nous sommes tous quelqu’un pour sa famille, ses amis, ses connaissances. Être quelqu’un vient avec des obligations et des devoirs. Ça vient avec l’anticipation de croiser un autre quelqu’un en sortant de chez soi, qu’on le veuille ou non.
Combien de fois avez-vous fait semblant de ne pas voir une autre personne à l’épicerie, juste parce que vous être moins dans le beat “sociable” que “avoir la crisse de paix”? J’ai littéralement un doctorat en “feindre de voir du monde que je connais”, spécialisé en “sacrer mon camp de là au plus vite”. Je ne suis pas anti-sociale pour autant, j’ai juste le goût de prendre ça relax pis d’être incognito, bien dans ma peau.
(Je pensais jamais donner raison à Luc Plamondon dans ma vie, notez la date au calendrier. Mais remarquez, il avait pas mal tout catché.)
Voyager seule me permet cet anonymat relaxant de faire ce que je veux, quand je veux, en me câlissant pas pire de ce que le monde peut penser de ce que je fais quand je le fais.
Être anonyme n’a rien d’angoissant ou d’épeurant. C’est se donner la chance de revenir à ce qu’on est, ce qu’on veut être, ce qu’on aime et ce qu’on a envie. C’est faire le vide, le vrai.
Perdre mon temps en passant du point A au point E, Z, H et M avant d’aller au point B. Me planter 25 minutes devant un musicien de rue pour l’écouter. Essayer de nouveaux outfits. Aller danser toute seule dans un bar. Refuser de parler aux étrangers. Accepter de parler aux étrangers.
Bon, je pourrais bien aller passer mes journées à Pointe-aux-Trembles, où je ne connais pas un chat, mais j’ai choisi plus exotique.
Être personne, quelques jours dans l’année, pour mieux me ressourcer. C’est vraiment ce que le voyage en solitaire me permet de faire. Et je vous épargne tous les avantages du voyage en solitaire, des belles rencontres aux accomplissements, du dépassement de soi à la prise de confiance, de la débrouillardise grandissante aux anecdotes fabuleuses.
Mon nom est (parfois) Personne. Et je vous souhaite à tous de le vivre une (plusieurs) fois dans votre vie.
Maman, un jour je serai (sûrement, je peux pas croire) en couple, et j’aurai peut-être un enfant. J’aurai le devoir, avec un sceau étampé dans’ face, d’être quelqu’un pour le restant de mes jours pour cet enfant. Alors permets-moi d’être personne encore quelques temps.
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