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Mon chien porte le bottillon

Par
Catherine Ethier
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Alors que je me croyais en pause, un citoyen du monde m’a rappelé que j’étais une HARPIE NOTOIRE.

Janvier. J’aime janvier, parce que comme Richard Séguin, c’est permis de penser que tout frappera possiblement aux portes de mes matins. Les projets. Les promesses de l’an neuf. Kurt Russel avec un cornet. L’hiver lève la cuisse bien haute pour m’aguicher la salopette et je glousse. JE GLOUSSE.

Et je déteste ceux qui s’en plaignent (de ma salopette turgescente. Mais surtout de janvier et son hiver qui ressemble pas assez aux pique-niques plein de pignatas où il fait si bon être vu après déambuler sur un fil de fer avec toute l’ironie du steampunk de ton petit look bateau, avant de courir manger ton pulled pork servi dans une cuiller antique). Qu’est-ce tu veux. L’hiver, c’est pas l’été. Et janvier, c’est trop tôt pour s’en plaindre.

(attends mars)

Mais ce que je préfère de janvier (on se croirait dans un segment phare de l’Épicerie, en plein banc d’essai de maïs en crème, dans le bout où je dois tout rapporter à moi en éructant du blé-d’inde), c’est que s’installe un calme carmélite dans le parc juste en face de la boîte à chaussures où j’habite. Ce parc donc j’aime tant vous parler, couchée sur le ventre en me faisant aller les pattes.

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Oh! the sainte paix. C’est tellement silencieux que c’en est inquiétant, même en plein jour. Du blanc à perte de vue. La Sibérie. Nul festivalier couché en sirène sur une nappe couverte de pâtés, ni fille qui parachève son doctorat en danse moderne et qui ne peut tenir une tabarli de demi-heure sans réinventer le monde sur des entre-chats pas de musique. Le calme plat.

Je respire.
En fait, j’ai réappris à apprécier l’hiver depuis qu’un caniche s’est glissé dans mon emploi du temps.

* JE SUIS ALLERGIQUE AUX AUTRES CHIENS. LA RACE S’IMPOSAIT. FIN DE LA DISCUSSION *

Stella, qu’elle s’appelle. Et Stella NE VIT QUE pour la promenade. Elle mange, dort et le reste de son agenda est pieusement consacré à l’attente de ce moment précis où je mets mon casse et que j’empoigne sa laisse féminine-fleurie. Mais ça, vous le savez.

Ce que vous ne savez peut-être pas, c’est que la bête, en plus d’être dotée du péristaltisme le plus performant de toute l’histoire des tubes digestifs de frisés, a la patte sensible. Pantoufle feluette et fion rubicond, c’est nous, ça.

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Une créature fascinante. Stella peut se vautrer dans un cadavre de pigeon, manger un poulet à même la pan du four ou franchir un cercle de feu pour attraper un vieux caleçon plein de grenailles en se pétant six fois la noix sur le mur, vous serez les seuls à souffrir. Elle, tout ce qu’elle sait, c’est que ce caleçon-là est désormais sien et que c’est assez fantastique merci, qu’importe si le feu est pris sur son pompon de tête.

Mais en hiver, allez savoir, déposez-lui la patte UNE MILLISECONDE sur un trottoir gelé et le fakir canin fait place à la jeune Aurore qui s’apprête à souper au savon. Roulez du globe tant que vous voulez.
Mais nous, on porte la botte.

Quatre petits bottillons canins, pour être plus précis. Et alors que nous longions le parc à la recherche du lieu parfait pour s’accroupir, un gentilhomme les a remarqués. Un œil de lynx. Un fin renard. Un autre qualificatif s’apparentant à un animal sauvage.

C’est qu’il nous a vues de loin. Et arrivé à notre hauteur, il s’est stoppé la parade, sec, nous bloquant le chemin une petite affaire, comme si je lui devais cinq piastres depuis 82. Et les intérêts avaient l’air d’être salés.

« Votre chien porte des bottes »

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C’était, et j’en avais désormais la certitude, un homme de constats. Ce que j’ignorais, c’est que c’était aussi un homme de principes.

« Vous n’avez pas honte de l’attriquer de même? C’est un chien, pas une catin. Lui mettre des bottes, c’est pas naturel. Vous bafouez l’esprit des loups, madame ».

Oh.

Je sais que je suis pas toujours à l’heure. Que je parle un peu sur le bout de la langue et que mon four est pas toujours clean. Mais tout ce temps-là, alors que je donnais à la guignolée pis que je récupérais mes pots de margarine en les sacrant jamais dans le bac sans avoir essuyé le petit film de gras, JE BAFOUAIS L’ESPRIT DES LOUPS.

L’affaire, c’est que par le fait-même d’exister, Stella bafoue l’esprit des loups, la pauvre caille.


Oui.

Alors peut-elle, à défaut d’avoir la street cred d’un berger allemand qui dépèce une oie en plein vol avant d’allaiter un orphelin abandonné au pied d’un figuier sauvage, se promener en mocassins en toute quiétude sans que Shehaweh ne se retourne dans sa fosse commune?

Le sel, sur les trottoirs, n’est plus blanc, monsieur. IL EST VERT.

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Marche tant que tu veux dans ton sel de camargue, orteils retroussés, en honorant toué louves que tu voudras, mais le jour où tu te traîneras les rotules dans les fins de run de sel turquouèse du gars de la ville qui a décidé de se domper la marchandise sur un coin de rue parce qu’il aime le travail bien fait, tu vas le serrer en petit péché, ton capteur de rêves, dans tes petites mains brûlées après prier pour de la pelimoulante™.

L’hiver, mon chien porte le bottillon.
Et attelez-vous. Parce que quand c’est sa fête, on se sort les porte-jarretelles et les dirty looks .

La bise.

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