Le rôle du DJ est de faire découvrir le fruit de ses recherches musicales au public. Que ce soit sur la piste de danse, à la radio ou dans un mix, partager les perles que l’on a dénichées est ce qui nous différencie du lot.
De plus, on joue le rôle de diffuseur. On choisit où et quand jouent certaines chansons. Galas, soirées thématiques, 5 à 7 ou ouverture de concert, les DJs ont accès à tous les genres de foule. Que ce soit 200 auditeurs accros à une émission spécialisée, 20 danseurs effrénés dans le fond d’un club à 2h55 ou 2000 adolescents venus turn up au MTelus, les Shazams se font aller et les gens demandent constamment « C’est quoi qui joue? C’est la toune de qui ça? »
En débutant, je tiens à dire que cet article n’est pas une critique des artistes, mais plutôt un rappel d’une démarche qui semble avoir été délaissée. Dans un écosystème culturel où la saturation perdure et l’attention du public est minime, partager sa musique directement avec des gens qui prennent le temps de l’écouter et de la diffuser est plus important que jamais.
Je suis la scène de rap local depuis plus de 20 ans; je la couvre dans les médias, je joue les nouveautés de la semaine à la radio, je crée un mix de rap montréalais mensuellement et je joue dans les clubs plusieurs fois par semaine. Je suis toujours à la recherche de nouveaux sons, mais je reçois autant de nouvelles chansons par année qu’il y a d’auditeurs de Rapophonie à Radio-Canada (ça c’est pas beaucoup). Pourtant je connais les artistes personnellement, je côtoie les agents et les relationnistes de presse régulièrement et j’écris pour diverses publications. Imaginez les DJs qui ne font que spin mensuellement ou animer leur émission de radio hebdomadaire!
Il fut un temps où les artistes et managers se frayaient un chemin dans la foule afin d’atteindre le booth et tendre un disque au DJ. On recevait des CDs par la poste, on se faisait glisser une cassette dans notre poche de manteau ou on se faisait simplement demander de jouer un nouvel album ou de l’écouter. Oui, le streaming a changé la donne, mais justement, c’est plus simple que jamais. Il suffit d’envoyer un lien en DM, de partager son propre post par Messenger ou encore mieux d’envoyer la chanson à une liste courriel de DJs.
Je ne comprends pas comment dans une époque où les artistes cherchent à être mis sur des playlists à tout prix, le réflexe de contacter les DJs, qui sont les véritables moteurs de la scène et amplificateurs de musique en chair et en os, ne soit pas naturel. J’ai un souvenir d’un statut du DJ vétéran Simalakh qui demandait aux artistes montréalais rap d’envoyer leur musique à son courriel; ceux qui ont répondu à l’appel se sont retrouvés sur un mix pour RedBull du légendaire A-Trak. Qui l’eût cru? Envoyer sa musique à un DJ peut la faire entendre par plus de gens!
Un clic, un message et une chanson jouée en public peuvent déclencher une série d’évènements qui fera avancer une carrière. En ce qui a trait à l’étiquette, il faut éviter de spammer. Un simple message explicatif (je viens de sortir un album) où l’on décrit le style (cette chanson fitterait avec ton émission) de la musique est tout ce qu’il faut. Sinon, un press release en bonne et due forme fait la job aussi. J’espère avoir démystifié les pans de communications entre DJ et artistes et même si ça peut sembler intimidant d’envoyer de la musique non sollicitée, dites-vous que vous n’avez rien à perdre et tout à gagner. Donc, envoyez votre musique aux DJs!
Je m’attends maintenant à avoir un inbox plein à la fin du mois!