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1989. Aréna de Shawinigan. Alors qu’il joue dans le junior majeur avec les Draveurs de Trois-Rivières, l’ex-goon Enrico Ciccone donne une raclée à un colosse des Cataractes de Shawinigan. Après le match, dans le lobby de l’aréna, le père du joueur, un ancien lutteur de 400 livres, prend Cicco par le chignon. Tout près de la scène, la mère d’Enrico, Francine Bérubé, réagit impulsivement. Une vraie tigresse. En moins de deux, elle saisit le mastodonte à la gorge. Les joueurs et les dirigeants des Draveurs interviennent, les ardeurs s’apaisent, Mme Bérubé évite le pire. «Le lendemain, Enrico était fâché contre moi», se rappelle-t-elle aujourd’hui. Et le fiston en rajoute : «Ça m’avait mis en maudit! Je lui avait dit : “Kessé que tu fais là? Tu peux pas me défendre de même!”»
Au fil des ans, la maman s’est finalement fait une raison. Quand un partisan disait du mal de son garçon, elle ne montrait plus les crocs. «Je changeais de place pour ne pas nuire à Enrico, explique-t-elle. Je me disais simplement que c’était parce qu’ils ne le connaissaient pas.»
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Trois ans plus tard, Ciccone atteint son rêve de la LNH. À partir de ce moment et jusqu’à sa retraite en 2000, sa mère, elle, multiplie les nuits blanches. «Quand il se battait, je me rongeais les sangs, mais j’étais pas capable de fermer la télévision», lance Mme Bérubé, qui regardait les combats de son ti-pit sur le bout de sa chaise. «Ça me bouleversait à chaque fois!»
Tourmentée, Monique Julien-Roberge l’a été doublement : elle a élevé deux garçons qui ont fait leur marque comme bagarreurs chez les pros, Mario et Serge Roberge. Quand ses petits jetaient les gants, elle préférait tout simplement regarder ailleurs. «Chaque fois, j’avais un pincement au cœur qui me faisait mal, se souvient-elle. Je préférais me réfugier dans la salle de bain.»
De son côté, Raymonde Saint-Pierre, la maman de Donald Brashear, a toujours gardé les yeux bien ouverts durant les combats de son fils. Pendant ses batailles, l’heure n’a jamais été à la prière : «Je force avec lui, pis je veux qu’il gagne!» Contrairement aux autres mères, Mme Saint-Pierre craint rarement pour la santé de son fils adoptif, qu’elle n’a jamais officiellement adopté. «Je sais qu’il est capable de se défendre», lance sans broncher la mère du colosse de 6’3’’ et 239 lb, qui joue pour les Capitals de Washington.
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Mais qu’arrive-t-il quand le pire se produit? Comment ne pas trembler quand son bébé est sans connaissance au milieu de la glace ou ensanglanté en retraitant au vestiaire, soutenu par ses coéquipiers?
Pour la maman de Donald Brashear, le pire survient en février 2000. Marty McSorley assène un coup de bâton à la tête de son fils. Un coup qui fait le tour de l’Amérique. Heureusement, elle ne voit pas l’incident en direct. «On l’a su le lendemain. Les télés faisaient jouer les reprises tout le temps, tout le temps…» raconte-t-elle, encore songeuse. Malgré ce terrible incident et toute la peur qu’elle a pu ressentir, Mme Saint-Pierre n’a jamais perdu de temps à détester l’agresseur de son Do.
Les p’tits
Les mères des joueurs de finesse en voient aussi de toutes les couleurs.
Nicole Maheux, la mère de Simon Gagné, ne craint pas qu’un colosse du type Donald Brashear s’attaque à «son grand» avec ses poings (il ne le ferait pas anyway, estime-t-elle). Mais elle sait qu’aucun joueur n’est à l’abri d’un coup vicieux le long de la rampe…
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C’est arrivé en 1996, quand un adversaire a ramassé son gars, alors qu’il patinait pour les défunts Harfangs de Beauport de la LHJMQ. Gagné, âgé de 15 ans à l’époque, a percuté le côté de la baie vitrée, dans un petit coin traître, à la hauteur de la ligne bleue. Il s’est retrouvé sur la glace, inerte. «J’avais hâte qu’il bouge la p’tite jambe, se souvient-elle. J’ai eu tellement peur.»
Simon s’est évidemment relevé. Avec une clavicule fracturée. Une fois assurée que son ti-pet allait bien, Mme Maheux a souhaité pendant quelques fractions de secondes que le bourreau subisse le même traitement qu’il avait fait subir à son fils. Œil pour œil. «On n’aime pas qu’un joueur touche à notre garçon, dit-elle. Et malheureusement, on ne s’habitue jamais!»