.jpg)
Merci au créateur des Têtes à claques pour le lunch
Je ne sais pas si Michel Beaudet, le créateur des Têtes à claques se souvient de moi. Je suis discret et beaucoup d’années se sont écoulées depuis notre rencontre en 2002 à Barcelone.
J’y étais avec un ami dont je ne divulguerai pas l’identité, mais qui est l’animateur d’un talk-show de fin de soirée (non, ce n’est pas Martin Matte), entre autres.
À l’époque, nous n’étions rien de plus que des étudiants qui passaient l’été en Europe avec leur sac à dos. Barcelone est une ville magnifique (c’est pour ça que les Barcelonais en ont plein leur casque des touristes) et nous avions bien profité de ses attraits. Même que nous avions passé le premier jour sur la plage et qu’obnubilés par le concept du monokini, nous avions oublié de nous mettre de la crème solaire.
Nous étions rouges comme des homards, mais peu importe, la vie était belle.
Notre budget oscillait autour des 30 euros par jour, ce qui fait que nous mangions beaucoup de sandwichs et dormions dans des auberges de jeunesse.
Michel Beaudet avant Les têtes à claques
Je ne me souviens plus trop comment nous avions croisé Michel Beaudet. Probablement en prenant une bière dans un bar, ou en prenant une bière dans un restaurant, ou en prenant une bière dans la rue.
C’était là que passait une grande proportion de notre 30 euros.
Reste qu’il avait reconnu la langue de chez nous et que, de fil en aiguille, nous avions discuté ensemble jusqu’au moment où il nous a invité à souper.
Il travaillait en publicité à l’époque et je crois qu’il était de passage à Barcelone pour un festival de publicité ou quelque chose comme ça. Il nous avait dit : « je vous paye à souper ». Il avait les moyens et pas nous.
Nous avions mangé du lièvre, de la paella, des poissons et nous avions bien bu du bon vin.
.webp)
Notre mécène nous avait ensuite traînés (ou était-ce l’inverse?) dans un bar « clandestin » avec de la musique techno agressive. Pas tout à fait notre genre, mais bon, l’intention était là. On s’était laissé en se promettant d’aller visiter le musée Miro tous ensemble le lendemain. Et on l’avait fait. Le minimalisme de Miro fittait bien avec notre lendemain de brosse. Nous nous étions quittés en larmes (non, sûrement pas) et ces deux journées avaient été parmi les plus belles de notre voyage.
Merci, Michel
Seulement quatre années plus tard, le phénomène des Têtes à claques prenait d’assaut l’internet québécois. Il nous avait quand même fallu encore une ou deux années de plus pour faire 1 + 1 et réaliser que les yeux du Michel Beaudet derrière les Têtes à claques étaient les mêmes yeux du Michel Beaudet de Barcelone.
Il avait déjà connu un succès international auprès de nous à Barcelone et voilà qu’il faisait parler de lui jusqu’en France.
D’ailleurs, encore aujourd’hui, on entend parfois des « petits papoutes » dans les pubs en écoutant des balados français. C’est assez bizarre.
Et quinze ans plus tard, mes enfants regardaient les Têtes à claques sur Télétoon.
Je ne dirais pas que Michel a été une influence pour nous, parce que nous avions créé le Sportnographe un peu avant. Mais ses Têtes à claques nous donnaient l’impression que tout était possible. Que si on avait une bonne idée, on pouvait partir de rien, sur le Web, et faire fleurir cette idée. Que nous pouvions nous accaparer les moyens de production (bon, je sonne marxiste) et en faire ce qu’on voulait.
Aujourd’hui, c’est presque devenu la norme. Les humoristes et les influenceurs se lancent d’abord sur internet. En 2005, c’était moins ça.
Michel nous avait dit, pendant notre festin, que peut-être nous aussi, un jour, aurions l’occasion de payer la traite à des étudiants sans le sou en voyage quelque part.
Pour l’instant, je n’en ai pas eu l’occasion, mais peut-être qu’un jour, nous pourrons poursuivre la tradition de Michel Beaudet.
+++
Pour recevoir tous les écrits d’Olivier Niquet en primeur directement dans votre boîte courriel, inscrivez-vous à son infolettre ici: