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Méfiez-vous des journalistes

Par
Judith Lussier
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Normalement, les journalistes suscitent presqu’autant de confiance que les arracheurs de dents (expression limitée mais combien amusante pour dire «dentiste») ou les vendeurs de chars. Et c’est très bien comme ça.

L’an dernier, par exemple, une étude de l’Indice relatif du bonheur révélait que seulement 4% des répondants accordaient leur confiance aux journalistes, ce qui classait nos supposés chiens de garde au 9e rang de la confiance, après les avocats et les prêtres, et ce, malgré tout ce que l’on sait au sujet des avocats et des prêtres.

Mais récemment, probablement la faute de Marie-Maude Denis et d’Alain Gravel, la perception des Québécois a changé. Dans le dernier sondage de confiance de la revue Sélection du Reader’s Digest, les répondants ont accordé les trois premières places à des symboles de la profession journalistique: Céline Galipeau, Pierre Bruneau et Sophie Thibault.

«J’en tombe de ma chaise. Cette confiance du public fait peser de lourdes responsabilités sur nos épaules», a commenté Céline Galipeau, lorsque le journaliste de Sélection lui a appris que son nom était en tête de peloton.
Moi, je tombe de ma chaise quand j’entends des choses comme : «Ben oui, je l’ai lu dans La Presse», ou «C’est ce qu’ils ont dit au Téléjournal». Croyez-vous vraiment tout ce que l’on vous raconte? Parce que je dois vous avouer une chose : les journalistes racontent parfois n’importe quoi. Souvent, ils commettent des fautes. Pas des grosses. De petites erreurs, un détail escamoté, un nom mal écrit, une date mêlée avec une autre, une faute de frappe.

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On assimile l’information livrée par les journalistes comme s’il s’agissait d’une vérité absolue. Questionner chacune de leurs affirmations serait beaucoup trop lourd. Et l’on réalise qu’ils se trompent seulement quand ils parlent de nous ou de quelque chose que l’on connaît mieux qu’eux.

Par exemple, quand Sacré dépanneur! est sorti, j’ai lu dans un journal que l’auteure de 23 ans avait fait un travail remarquable. C’est vrai que j’ai fait un travail pas pire, mais j’avais quatre ans de plus que ce que la journaliste m’en donnait.

Parfois, c’est plus grave qu’une erreur de nom ou de lieu.

Récemment, j’étais au Saguenay, et on me racontait l’histoire du fameux déluge de 1996. «J’étais chez ma tante, et à la télévision, on disait que tout mon village avait été évacué par hélicoptère et qu’il y avait eu des morts, j’étais sûre que je ne reverrais plus jamais mes parents», m’a raconté une fille qui s’en est malgré tout tirée sans sombrer dans l’enfer de la drogue. Il y a bien eu un déluge, et peut-être une petite opération d’hélico, mais pas de morts dans le village en question. «C’était vraiment n’importe quoi ce qu’on voyait à la télé», a résumé mon témoin.

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J’ignore si le journaliste qui a conclu le sort d’un village entier du Saguenay était de TQS, de TVA ou de Radio-Canada, mais ça n’a pas beaucoup d’importance. Parce que derrières ces bannières à qui l’on confère plus ou moins de crédibilité, il y a toujours un humain, qui fait des erreurs, parce que, grosse phrase pleine de vérité : l’erreur est humaine.

Malgré tout, les gens classent les médias par ordre de crédibilité. On n’en confère presque pas à Wikipedia (alors qu’il est peu probable que l’encyclopédie collaborative nous induise en erreur sur la date de fondation de la ville de Québec : il y aura toujours un geek quelque part pour corriger ce genre d’erreur), mais on vendrait notre mère à Radio-Canada.

Au palmarès de la crédibilité non méritée se trouvent les agences de presse. Si ça vient de Reuters, de l’Associated Press ou de l’AFP, c’est forcément vrai, qu’on se dit. Le fait qu’elles existent depuis des décennies semble leur donner une aura d’intouchable de l’info. Et pourtant… Je vous laisse méditer sur cette nouvelle de l’Agence France Presse qui rapporte l’existence d’un monstre polymorphe quelque part en Afrique du Sud, et vous implore de ne pas prendre tout ce qu’on vous dit pour du cash.

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