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Mario Parent, la rockstar de la bière
« Tu t’en vas voir qui, donc? »
« Mario Parent! Tu ne connais pas Mario Parent? »
C’était bien la première fois, cet été, que je parlais à quelqu’un qui ne connaissait pas la nouvelle sensation de l’Internet.
C’est un peu trop commun, dans l’histoire du Québec numérique moderne, qu’un pur inconnu, sans aucune aide du népotisme, devienne du jour au lendemain un phénomène de la culture populaire. Pour le meilleur et pour le pire, on va toujours s’intéresser au monde ordinaire qui décide d’utiliser la tribune du web pour exister.
Mais Mario Parent a quelque chose de différent.
L’homme de 53 ans est un papa bien ordinaire avec un modus operandi bien simple. En direct de sa cour arrière, armé de son cellulaire, il déguste une bière de son choix et nous donne son avis. Sans oublier son fameux « Action! » bien senti introduisant chaque vidéo.
Dans les dernières semaines, son compte a accumulé des centaines de millions de vues et des avalanches de commentaires lui souhaitant « Santé! ». Une popularité soudaine qui lui aura valu sa toute première collaboration d’envergure avec l’animateur Pierre-Yves Lord pour promouvoir le gala des prix Gémeaux.
C’est à ce moment que j’ai pressenti que c’était une question de temps avant que la populaire page Meme Fruiter en fasse une figure folklorique du web. Et j’avais raison.
Preuve à l’appui :
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Pour découvrir qui est réellement Mario Parent, j’ai décidé d’aller prendre une bière avec lui (prévisible, je sais).
Rencontrer la vedette
C’est dans sa cour de ville Saint-Laurent que Mario m’a donné rendez-vous, question d’authenticité. En guise d’offrande, j’ai dérobé deux bières du frigo des employés chez URBANIA avant de quitter le bureau.
« J’ai des bières plus froides dans le frigo, si jamais », me propose Mario en tâtant les canettes que j’ai traînées avec moi dans le trafic pendant une heure. « Ah pis, tu sais quoi? On va les boire pareil! », enchaîne-t-il devant ma mine dépitée.
On verse l’élixir du succès et je me lance. La conversation s’amorce sur son arrivée improbable dans le milieu du showbizz.
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– Ah, toi chose! Pierre-Yves Lord m’a entendu à la radio, j’étais en entrevue. Puis j’imagine qu’il a des contacts avec… Comment, il s’appelle, donc? Légaré?
– Lagacé.
– Patrick Lagacé, c’est ça! Et là, il m’a appelé. J’étais au travail, pis je pensais qu’on me tirait la patte. Mais quand j’ai réalisé que c’était vraiment PY, j’ai tout de suite embarqué. C’était la première fois que je faisais pas ça tout seul dans ma cour.
La glace est brisée. L’homme derrière la légende émergente du web est fort attachant. Il sait entretenir la conversation. Voyant qu’on est déjà rendus chums, je me permets de lui poser la question qui tue : pourquoi des vidéos de bière?
« Faut que tu saches que ma femme a toujours voulu avoir une business. On a fait quelques tentatives et on a failli ouvrir un restaurant. Finalement, ç’a adonné que le dépanneur du coin était à vendre », m’explique Mario.
« C’est là que j’ai commencé à faire mes vidéos sur Facebook. Je recevais de nouveaux arrivages de bière et je voulais les faire découvrir aux gens du quartier et aux amis de la famille. »
C’était vraiment plus intime qu’en ce moment, je filmais ça vite, vite. »
Son téléphone sonne. C’est son fils. « Oui, William? J’peux rien faire. J’suis en plein entrevue. Fais ton possible. OK, ciao, attention à toi. »
Je profite de cette interruption pour lui demander comment ses enfants vivent avec la popularité soudaine de leur père?
« C’est bizarre. Je ne suis pas une rockstar! Mais quand les gens demandent des photos, c’est spécial. Le jour où ma fille a réalisé que je parlais avec PC Jolicoeur sur Instagram, elle capotait! C’est eux qui me font comprendre que je suis populaire. L’autre jour, mon fils m’a dit que j’avais gagné 3000 abonnés. Je ne m’en étais même pas rendu compte! »
Voyage Voyage
Un avion passe au-dessus de nos têtes et interrompt notre conversation. C’est assez ironique, puisque les avions font partie de la vie de Mario depuis très longtemps.
« Tsé, moi, j’ai jamais terminé mon secondaire. J’ai économisé et je suis parti vivre un an en Australie. »
« C’est là que j’ai pris le goût de la bière. J’ai tellement trippé qu’après, je suis allé en Chine. C’est là que j’ai rencontré ma femme. Ça fait maintenant une trentaine d’années qu’on est ensemble et on a quatre enfants.
Après avoir flâné autour du globe, Mario est finalement revenu au pays pour terminer son secondaire 5 afin d’être admissible à l’emploi qu’il convoitait chez Air Canada. Emploi qu’il occupe depuis maintenant 29 ans.
C’est d’ailleurs avec une vidéo dans laquelle il portait son uniforme que j’ai vu Mario pour la première fois. Depuis, il a dû en retirer plusieurs à la demande de l’entreprise, changement qui n’a pas passé inaperçu aux yeux de ses fans de longue date.
« On m’écrit souvent pour me demander où est rendue telle ou telle vidéo et je dois leur expliquer. Moi, ça me dérange pas trop, je comprends pourquoi l’entreprise a fait la demande. Mon patron aimait mes vidéos, mais ça venait de plus haut. »
Peu de temps après que le paternel ait publié ses premières capsules sur Instagram, la famille Parent a fait un voyage d’un mois en Chine, entre autres pour assister aux funérailles de la grand-mère de la conjointe de Mario. Pendant ce périple, l’accès aux « réseaux sociaux occidentaux » était complètement bloqué. C’est donc seulement à son retour que Mario a vu que son nombre d’abonnés sur la plateforme avait explosé.
« C’est capoté, man. Depuis, je reçois des invitations pour tester des restaurants et des échantillons de bière gratuitement. »
Il y a même un artiste qui a sorti une chanson qui s’appelle La tite bière en mon honneur. […] Mais je sais que c’est éphémère. Tout ce qui monte finit par redescendre. J’en profite pendant que c’est le fun, pis quand ça sera fini, on fera autre chose. »
Autre chose qui surprend, quand on regarde les commentaires sous ses vidéos, c’est que le ton reste pas mal toujours positif, ce qui est rare, de nos jours, sur les réseaux sociaux. Je demande à l’homme de 53 ans s’il a eu à gérer des haters.
« Honnêtement, jamais! Sauf une fois, récemment. J’ai fait une vidéo où je disais que j’avais offert une petite date à ma famille en les amenant à la crèmerie. Dans les commentaires, un monsieur m’a traité de “pédo” parce que j’amenais ma fille en date. Franchement. Je l’ai ignoré. »
En quittant, nous croisons sa conjointe qui avait commencé à nous couper du melon. Celle-ci ne cache pas sa déception en réalisant qu’on raterait la collation.
– Comment on se sent, quand son mari est célèbre?
– On est fier de lui. C’est beau à voir, et c’est drôle de le voir faire des entrevues comme ça, me partage-t-elle en riant.
Malgré qu’il soit bien conscient qu’il n’est peut-être que la saveur du moment, Mario démontre que la simplicité et l’authenticité finiront toujours par l’emporter dans cette guerre de l’attention numérique.