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Manif dans le Vieux-Montréal : « Ces gens sont peut-être pires que le couvre-feu à 20h »

Faire chier les commerçants pour dénoncer le gouvernement.

Par
Hugo Meunier
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Il n’y a pas que sur le plateau de Tout le monde en parle que ça volait bas dimanche soir.

Le Vieux-Montréal a été le théâtre de débordements et de casse, lorsque quelques centaines de manifestants sont descendus dans la rue pour protester contre le couvre-feu, ramené à 20h au lieu de 21h30.

Vitres fracassées, feux de poubelle, jeu du chat et de la souris avec les policiers: l’escouade antiémeute a été déployée pour disperser la foule. Une centaine de contraventions ont été distribuées et sept personnes ont été arrêtées.

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Au lendemain des évènements, les commerçants ciblés par les vandales s’affairaient à réparer les pots cassés. « Tu peux manifester, c’est un droit, mais le jour où tu commences à briser des choses, tu perds toute ta crédibilité », soupire Michel, le directeur de l’entretien technique de l’hôtel Nelligan sur Saint-Paul, qui abrite une boutique de vêtements vandalisée.

À mon passage, des vitriers venaient tout juste de terminer de remplacer la vitrine du commerce.

Un peu plus loin place Jacques-Cartier, des journalistes étaient en train de faire des live et des badauds immortalisaient les dégâts avec leur cellulaire.

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Si les auteurs des ces gestes veulent faire plier le gouvernement sur les règles sanitaires, disons que c’est raté. Pour l’heure, les victimes sont des commerçants qui font déjà grandement les frais de la pandémie depuis mars 2020. Les respecter et leur offrir du soutien serait la moindre des choses, pas fracasser la vitrine de leurs commerces, dont certains n’ont même pas encore pu ouvrir leurs portes.

C’est le cas du restaurant mexicain La Catrina, fermé à cause de rénovations. « C’est correct de manifester contre les mesures sanitaires, mais là ils font souffrir des entreprises qui essayent de s’en sortir », plaide le propriétaire Emiliano, qui a déjà un genou à terre à cause de la crise. « Ça aide pas ben ben leur cause. Ces gens sont peut-être pires que le couvre-feu à 20h », se désole son partner Adrian.

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J’ai couvert des dizaines de manifs du genre et par expérience je sais bien que le grabuge est toujours causé par une poignée d’émeutiers, qui n’en ont souvent rien à cirer de la cause défendue. Mais dans ce cas particulier, on aurait souhaité que les autres manifestants les contiennent entre deux « fuck you Legault ».

Parce qu’au final, c’est aussi eux qui écopent et ratent leur cible.

Suffit de regarder les deux vitres brisées de la coopérative d’artisans L’empreinte pour s’en convaincre. Pas sûr que les propriétaires de cette boutique ont joué un grand rôle dans les décisions gouvernementales liées aux mesures sanitaires. « C’est vraiment de la bullshit ce qu’ils ont fait (les casseurs) », peste une personne sans-abri, qui a assisté en direct aux évènements hier soir.

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L’homme qui dort dans le portique d’un commerce a vu les manifestants à l’oeuvre sous ses yeux dans les rues pavées du vieux. « Il y avait environ 200 policiers de l’antiémeute et des trucks de l’identification judiciaire. Ils ont pris des empreintes et des photos des personnes interceptées », rapporte le vieil homme, en me montrant quelques vidéos prises sur son cellulaire. L’intervention s’est terminée aux petites heures, ajoute-t-il. « Je voulais aller pisser, mais j’avais peur de me faire arrêter.»

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L’image la plus absurde de cette casse est sans doute cette plante renversée près de la Commune. On imagine mal ce qui peut se passer dans la tête des « révolutionnaires » qui s’en prennent ainsi à la botanique urbaine. « Quin Legault, Quin Arruda! LIBARRRTÉ!! »

J’ai aussi vu un gros vase en fonte renversé devant le musée Pointe-À-Callière, mais je crois (j’espère) que ça fait partie du concept.

Comme les casseurs s’en sont pris à la boutique Le Vaisseau d’or, je laisse donc le mot de la fin à Émile Nelligan, en espérant que le célèbre poète montréalais puisse en inspirer quelques-uns à méditer sur le concept du naufrage de la lucidité.

Que reste-t-il de lui dans la tempête brève?

Qu’est devenu mon cœur, navire déserté?

Hélas! Il a sombré dans l’abîme du Rêve!

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