Mot de l’édito : Le mois de mai, c’est le Mois de la sensibilisation à la maladie de Lyme, aussi connue comme le pire des cauchemars des amateurs de plein air. Sans vouloir vous faire paniquer, l’histoire de Romain mérite d’être partagée. Parce qu’elle montre comment le destin de quelqu’un peut changer après une simple piqûre de tique.
Tout a commencé par une piqûre anodine à la nuque. Sur le coup, elle semblait parfaitement banale aux yeux de Romain Le Roux.
C’était en septembre 2023 et l’amoureux de plein air était en randonnée dans la région de Charlevoix.
Mais pendant l’année et demie qui a suivi, le quotidien de Romain s’est rapidement transformé en véritable cauchemar.
.png)
Éprouvant d’étranges symptômes, dont des épisodes de fatigue extrême souffrant d’épuisement chronique, le jeune monteur vidéo a d’abord attribué ses symptômes à son travail et à son rythme de vie, mais en deux temps, trois mouvements, « tout s’est écroulé comme un château de cartes ».
« Mon système immunitaire a rendu les armes. J’ai développé tout un tas de symptômes étranges et invalidants : une grande fatigue chronique, une sinusite, les yeux qui brûlent, des maux de tête, des faiblesses musculaires, de la tachycardie, et bien d’autres encore », décrit le Montréalais d’adoption, désormais retourné en France auprès de ses proches.
« J’avais l’impression d’avoir échangé mon corps avec celui d’un homme de 90 ans. »
La quête d’un diagnostic
Romain Le Roux a consulté médecin après médecin, à la recherche d’une explication pour ses maux, et d’un remède.
« Au scanner, la seule chose qui ressortait était une sinusite chronique », se souvient Romain. « J’ai consulté une clinique ORL qui m’a mis sous traitement médicamenteux sans succès avant de me proposer une opération aux sinus qui a malheureusement empiré mon état de santé, me forçant à être presque exclusivement alité », poursuit-il.
.png)
C’est à ce moment que Romain Le Roux a décidé de retourner en France, où son « errance médicale » s’est poursuivie.
« Je ne pouvais plus sortir de chez moi, chaque tâche représentait un véritable effort, comme gravir une montagne », soupire-t-il. « Faute de diagnostic, mon médecin généraliste a tenté de me convaincre que mes troubles étaient dus au stress, et il m’a recommandé d’aller consulter un psychiatre pour débuter un traitement antidépresseur. »
Le psychiatre a toutefois vite conclu que Romain n’était en réalité atteint d’aucun trouble psychologique, ce qui l’a ramené à la case départ.
Une maladie taboue?
Le jeune mordu de plein air commençait déjà à se douter que son état de santé pouvait potentiellement être lié à la maladie de Lyme, mais aucun médecin ne semblait enclin à le confirmer.
« J’en veux beaucoup au système de santé et aux médecins qui évitent presque systématiquement le diagnostic de la maladie de Lyme », s’indigne Romain.
« Lors de mes nombreuses consultations, j’ai pu entendre des choses comme : “La maladie de Lyme, ça n’existe pas”, ou encore : “On ne va pas rentrer dans cette bullshit-là”, le tout de la part de professionnels en santé en qui j’avais pourtant pleinement confiance. »
.jpg)
Romain Le Roux s’est donc tourné vers ce qu’il qualifie de « démarche inimaginable dans un pays développé comme la France ». Il s’est rendu dans une clinique vétérinaire pour faire analyser son sang par un expert en zoonoses. « Cette situation surréaliste a permis d’identifier certaines co-infections que les tests standards n’avaient pas détectés », rapporte-t-il.
Le jeune Français dénonce un important manque d’études et de recherches liées à cette maladie qui a bouleversé sa vie et celle de plusieurs autres.
Romain n’est d’ailleurs pas seulement atteint de la maladie de Lyme; il souffre également de nombreuses co-infections qui y sont associées.
« La négation de mes troubles a non seulement retardé ma prise en charge, mais m’a aussi ajouté une souffrance psychologique immense », déplore-t-il. « Le fait d’être incompris, voire méprisé, par les professionnels de la santé censés m’aider a détruit ma confiance envers le système de santé. »
Romain Le Roux s’est ainsi mis en quête de réponses, et a effectué de nombreuses recherches sur la maladie. Il a fini par réussir à entrer en contact avec un médecin qui lui a prononcé des mots qu’il attendait depuis longtemps : « Je vous crois », lui a dit ce spécialiste, qui n’a pas hésité à le prendre en charge.
« Son traitement, inspiré des plus grands médecins internistes et infectiologues américains, m’a sauvé la vie », raconte, ému, le jeune patient. « Mes symptômes diminuent semaine après semaine. »
Un ferme espoir
La bataille de Romain contre la maladie est toutefois loin d’être terminée. « C’est long, éprouvant, parfois désespérant, tant le chemin de la guérison est salissant », confie-t-il. « C’est un véritable chemin de croix. »
« Ma vie a complètement changé : mes habitudes alimentaires, mon rapport à la vie, aux choses futiles sur lesquelles j’aurais pu m’attarder avant », renchérit le jeune homme. « Tout me semble tellement moins grave, maintenant. Sans la santé, on n’est rien. »
Cette maladie, c’est également un deuil pour l’amoureux de plein air.
« J’ai passé presque toute ma vie dans la nature. J’ai parcouru l’Amérique du Sud en solitaire, passé du temps en Amazonie, fait des photos animalières en France », énumère-t-il. « Aujourd’hui, la forêt constitue pour moi un traumatisme que je n’avais pas avant. »
« Je m’allongeais dans les hautes herbes à la recherche de cervidés à photographier. Je dormais dans un hamac à la belle étoile. Aujourd’hui, c’est quelque chose de difficile pour moi à aborder, mais j’espère parvenir à dépasser ce traumatisme », ajoute Romain. « Il faut vivre pleinement. La vie est si précieuse, et on s’en rend d’autant plus compte quand on subit un tel problème de santé. »
Romain Le Roux a récemment lancé une campagne de sociofinancement, car il souhaite aller en Allemagne pour y subir de nouveaux traitements et accélérer sa guérison.
Il garde espoir qu’un jour, il retrouvera cette liberté qui lui manque tant et tient à mettre en garde d’autres aventuriers qui, comme lui, pourraient perdre la santé en un claquement de doigts.
Porter des vêtements longs, prêter attention aux piqûres inhabituelles, être vigilant, même dans les espaces verts urbains et garder sur soi un « tire-tique », figure parmi ses principaux conseils.
« On ne sent pas toujours la piqûre d’une tique », avertit-il. « Profiter du plein air? Un grand oui. Mais avec des précautions, c’est tout. »