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L’importance cruciale de la toune d’entrée d’un lutteur

Sérieusement, c'est aussi important que les biceps ou les kits en spandex.

Par
Pier-Luc Ouellet
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Il n’existe que deux groupes de personnes qui perdent complètement la tête quand ils entendent un début de chanson: le monde chaud dans un bar aux premières notes d’Africa de Toto et les fans de lutte.

Parce qu’à la lutte, la toune d’entrée c’est un peu la carte de visite du lutteur. On entend les premières notes de la chanson et on sait exactement qui s’en vient, pour le meilleur et pour le pire. C’est donc le moment de : a) crier de toutes nos forces parce que notre préféré arrive, b) huer de toutes nos forces parce que notre méchant favori est le prochain, ou c) partir aux toilettes parce que Bobby Lashley s’en vient.

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Petit regard sur un élément essentiel de la personnalité de tout lutteur, sa toune d’entrée.

À quoi ça sert une toune d’entrée

Depuis que Gorgeous George a décidé d’entrer sur l’air de Pomp and Circumstance dans les années 50, la musique d’entrée d’un lutteur est une partie incontournable du spectacle.

Mais à quoi ça sert?

Les fonctions sont multiples. La plus fondamentale est d’annoncer le lutteur et de créer plus d’artifices dans le spectacle. Ça permet évidemment de meubler les entrées des lutteurs, parce que ça serait long regarder des gars en bobettes marcher vers le ring dans le silence le plus total.

Mais plus encore, la musique crée de l’anticipation. Regardez cette scène :

Je vous explique le scénario si vous n’écoutiez pas la lutte à la fin des années 90 (mais que faisiez-vous donc?). Le gentil, dans cette scène, c’est Mankind, le gars masqué avec une chemise blanche. Il se bat pour le titre contre The Rock (oui, le gars qui a joué dans Tooth Fairy). Mais le méchant Rock est accompagné du patron de la compagnie, qui fait tout pour faire perdre Mankind parce qu’il le trouve trop laitte (sérieux, c’était à peu près ça).

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Comme notre héros est sur le bord de voir sa chance de toucher au titre lui glisser entre les doigts à cause des manipulations du méchant patron, on entend de la vitre se briser.

Ça, c’est le bruit annonciateur de l’arrivée de Stone Cold, une des plus grandes vedettes de tous les temps et surtout, le rebelle en chef qui se bat contre le méchant patron.

Si vous écoutez bien, dès que la vitre se brise, le public perd la tête. Pourtant, il ne s’est encore rien passé. Mais, on sait que le héros revient, et que shit’s about to go down.

On compare souvent la lutte au théâtre. Ben la toune d’entrée d’un lutteur, c’est un peu comme si un annonceur criait : « TABARNAAAAAK, CYRANO S’EN VIENT!» en plein milieu de la pièce. Vous seriez pas mal plus crinqués.

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Expliquer le personnage

La lutte, c’est peut-être une forme de théâtre, mais une forme bien particulière qui se déroule dans un aréna gigantesque (ou dans un sous-sol d’église si c’est à Hochelaga), ce qui laisse peu de place à la subtilité. De plus, c’est une pièce qui n’a ni début ni fin. Il faut donc qu’à tout moment, quelqu’un puisse embarquer et rapidement saisir les enjeux.

Comme le dit Benjamin Tull, lutteur québécois (et fin gourmet) : «Une toune de lutte c’est TRÈS important!! C’est ce qui te présente avant tout. Faut que le spectateur soit en mesure de se faire une idée de quel genre de personnage tu es seulement avec la chanson. Ça va t’aider à bien te faire comprendre par quelqu’un qui te voit pour la première fois».

La chanson thème aide donc à comprendre rapidement l’identité d’un personnage. Undertaker représente la mort, il est gothique. John Cena aime le rap pourri, il est le fun et confiant. Doink the Clown est…un clown.

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Preuve de l’importance de ce rôle, on va même parfois changer le thème d’un lutteur quand il devient méchant, parce qu’on veut que tout chez lui évoque l’antipathie.

Prenez par exemple Shinsuke Nakamura, un lutteur japonais qui était un lutteur adulé des foules. Son thème et Nakamura lui-même étaient tellement aimés que les fans continuaient de chanter son thème bien après qu’il ait fini de jouer.

Puis, Nakamura a rejoint le côté sombre de la force et il s’est mis à donner des coups de poing dans les schnolles de tout le monde (je n’exagère pas). On a donc eu une idée simple, mais efficace: on a ajouté du rap en japonais par-dessus la musique, pour que les fans soient incapables de le chanter.

https://www.youtube.com/watch?v=C1GMLFVcxCA

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Y’a juste les fans d’anime qui sont capables de retenir des paroles en japonais. Ça a fonctionné.

Quand la chanson ne «fitte» pas

Par contre, si un thème de lutteur doit le représenter, il arrive souvent qu’une chanson n’y arrive pas tout à fait. Parfois, ce n’est pas que la chanson en elle-même est mauvaise; elle n’est juste pas associée au bon lutteur, comme un sorcier et sa baguette.

Mais des fois, les tounes sont juste trop pourries pour fitter avec qui que ce soit.

Pensons à Cesaro, lutteur actuel de la WWE dont le personnage est un Suisse ayant confiance en ses habiletés et qui parle au moins cinq langues. On imagine donc un thème qui lui donnerait des airs sophistiqués, ou qui jouerait sur ses origines européennes.

Son thème, c’est plutôt ça, une espèce de toune rock avec des bruits de sirène assourdissants.

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Ou que dire de X-Factor, cette équipe du début des années 2000, qui devait être une force menaçante de méchants lutteurs unis pour arriver à leurs fins…

…mais qui entrait sur une toune mélangeant les airs emo et le pire du rap-rock du début des années 2000. Tout, sauf menaçant.

C’est vraiment important, une bonne toune d’entrée.

Les meilleurs thèmes de l’histoire (ou presque)

Fabulous Freebirds – Badstreet USA

Michael PS Hayes a peut-être aujourd’hui l’air d‘une grosse chèvre déguisée en pimp, mais à l’époque, il était un jeune cool et rebelle et surtout, un précurseur. C’est entre autres grâce à lui et son équipe, les Freebirds, que le concept de thème d’entrée a été popularisé. En plus, il chantait son propre thème, une toune rock typique des années 80. Mention d’honneur à sa coupe Longueuil.

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Degeneration-X – Theme Song

À l’époque, DX étaient une bande de rebelles qui repoussaient les limites de la censure. Depuis, Shawn Michaels est devenu un born-again christian et l’autre, HHH, est devenu un vice-président au sein de la compagnie, mais bon, à l’époque ils étaient rebelles, je vous jure.

Leur toune aurait pu être composée par Rage Against The Machine, en fait on l’a tous cru à un moment ou à un autre, mais ce n’est qu’un groupe d’imitateurs. C’est pas grave, la toune est excellente.

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Bobby Roode – Glorious

Bobby Roode est le lutteur préféré de ma blonde et c’est uniquement grâce à sa toune thème. Elle est beaucoup trop grandiose et quand Roode entre avec sa robe sertie de diamants, on ne peut s’empêcher de se lever et de crier «GLORIOUS» les bras dans les airs.

CM Punk – Cult of Personnality

L’une des très rares chansons sous licence dans cette liste : je ne pouvais m’empêcher d’inclure Cult of Personnality de Living Colour parce que c’est la chanson thème de mon lutteur (et punching bag de la UFC) préféré.

Non seulement, c’est une excellente chanson en soi, mais les paroles réussissent à décrire exactement le personnage de CM Punk: un homme narcissique et arrogant, mais qui réussit à devenir un gourou pour les masses grâce à son charisme hypnotisant.

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Finn Balor – Catch Your Breath

Mon lutteur préféré (en attendant que CM Punk revienne), Finn Balor a une chanson thème qui prend tout son sens devant une foule. Mélangeant un son métal mais un arrangement orchestral grandiose font de cette chanson un espèce de moment de communion entre Balor et la foule.

Stone Cold Steve Austin – Entrance Theme

En soi, ce n’est PEUT-ÊTRE pas la meilleure pièce de tous les temps. Après tout, ce n’est qu’un riff de guitare simple avec des bruits de vitre qui pète.

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Mais c’est une toune tellement emblématique. Le bruit de vitre au début servait d’étincelle pour faire exploser la foule. Le rythme, saccadé et brutal, représentait à merveille Austin qui avait une personnalité no nonsense.