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Liberté, égalité, paternité

Par
Judith Lussier
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60 millions de Français ne peuvent se tromper, veut l’adage. C’est vrai que 60 millions, c’est beaucoup. Par contre, 800 000 ne m’apparaît pas farfelu. C’est pourquoi l’on s’abstiendra de dire que les Français dans leur ensemble sont en retard sur nous, progressistes québécois, quand vient la question du mariage gai.

Ils étaient ainsi, dit-on, 800 000 à manifester en France ce dimanche pour empêcher les conjoints de même sexe de bénéficier des mêmes privilèges que les autres. 800 000
homophobes? Ceux-ci s’en défendront sans doute, et je n’irais moi-même pas jusque là. Non, juste 800 000 à revendiquer pour chaque enfant un papa et une maman. C’est, du moins, leur discours. Un discours d’ailleurs partagé par bon nombre de Québécois. Je dis ça comme ça, au cas où vous auriez encore envie de trouver que les Français sont tellement dans le champ.

«Un papa et une maman», c’est rassembleur comme discours. Tout le monde veut ça, un papa et une maman.

Moi qui ai eu deux mamans avant que ça ne soit la mode, par contre, je sais que ce n’est pas si pire, deux mamans. Enfin, deux mamans : une maman, une grand-maman, deux sœurs, j’ai grandi dans une sorte de matriarcat absolu.

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Toute mon enfance, j’ai été à même de constater qu’une
maman pouvait, tout autant qu’un papa, trouver une maison pour protéger ses enfants, ramener du beurre sur la table, enseigner les bonnes valeurs, et faire tout ce qu’un parent doit faire bien comme il le faut. L’égalité des sexes, chez nous, n’a jamais été une question, si bien que je sursaute quand je vois que ce n’est pas le cas pour tous. Je n’ai, heureusement, pas le monopole de la lucidité en matière d’égalité hommes/femmes. Plusieurs s’étonnent comme moi qu’on puisse encore discriminer l’un ou l’autre sur la base de son sexe. J’irais même jusqu’à dire que mettre l’accent sur la complémentarité d’un homme et d’une femme, c’est forcément sous-entendre que chacun a des lacunes que seul l’autre sexe ne peut combler.

Pour le reste du monde, ça n’a pas toujours l’air aussi évident qu’une maman puisse changer seule une ampoule, conduire une voiture ou gérer ses finances sans le conseil avisé d’un mari. Pas plus qu’il ne semble souhaitable pour certains qu’un papa s’humilie à se laisser conduire en voiture, à donner le biberon ou à profiter d’un congé de paternité.

Voilà, je crois, ce qui chicotte le plus les pourfendeurs du mariage gai. Ce n’est pas tant l’absence de modèle masculin chez l’enfant qui dérange. Ce n’est pas non plus, comme le veut cette pancarte traficotée, une question de sodomie. Le problème, c’est qu’un ménage sans homme, ça donne beaucoup trop d’autonomie à la femme, et qu’un ménage sans femme, c’est beaucoup trop d’humiliation pour l’homme.

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Ça normalise une image de l’homme dans un autre rôle que celui de simple pourvoyeur. Ça confère à la femme des pouvoirs qu’on ne lui connaissait pas, autres que de nourrir et réconforter les enfants. Ça rend pratiquement caduque l’existence de l’homme. Tout ça, ça doit être dur sur l’égo j’imagine.

Au fond, dimanche, ils étaient quelques centaines de milliers de Français à revendiquer le maintien du patriarcat. Et parmi eux, fort probablement, quelques homophobes.

Puisque c’est les soldes à Paris cette semaine, je vous offre en prime ces quelques perles, récoltées par Vice. Amusez-vous bien.


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