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L’héritage culturel de… Metallica

Est-ce qu'on les aime pour les bonnes raisons?

Par
Benoît Lelièvre
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Tout le monde aime Metallica. Même les gens qui chialent contre eux et qui se sont sentis trahis par un de leur nombreux virages musicaux au fil des décennies. On connaît tous quelqu’un qui trouve que l’album Load, c’est d’la marde et que Re-Load, c’t’encore pire. Certains d’entre vous connaissent aussi quelqu’un qui ne possède que leur fameux « black album » et leur compilation de reprises de tounes de mononcles Garage Inc. Peut-être même leur album symphonique.

Anyway, c’que je veux dire par là, c’est que Metallica est un groupe important et controversé dans l’histoire de la musique contemporaine. Tout le monde les connait et tout le monde a une opinion sur quel genre de musique ils devraient jouer. Étant fan moi-même depuis la plus tendre enfance (mon cousin Érik m’a initié à sept ans avec …And Justice For All), j’ai décidé de retracer le parcours des géants de la musique metal et de la séparer en trois époques distinctives: l’époque glorieuse, l’époque controversée et l’époque contemporaine.

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Le but de tout ça est donc de clarifier s’ils sont surévalués, sous-évalués, proprement évalués et si on les aime pour les bonnes raisons.

L’époque glorieuse

James Hetfield, Lars Ulrich, Kirk Hammett, Cliff Burton (et Jason Newsted) ont été des dieux et ce, du lancement de leur premier album Kill ‘Em All en 1983 à celui du « black album » en 1991. Pendant huit longues années, ils ne pouvaient rien faire de mal. Même s’ils avaient sorti quelques chansons poches, on le leur avait pardonné, parce qu’un album comme Master of Puppets, ça t’achète des airs lousse pour pas mal de choses. Mais, peu importe votre opinion sur Metallica, vous ne trouverez personne qui déteste Kill ‘Em All, Ride the Lightning, Master of Puppets ou …And Justice for All *.

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* J’exclus de mon propos les nazis et fascistes de toutes sortes, les extra-terrestres et le tueur en série qui mesure 7 pieds qu’on a vu dans Mindhunter.

À cette époque, Metallica était le chef de file du Big Four du thrash metal Américain, qui comptait aussi leurs rivaux Megadeth, Slayer et Anthrax. La complexité et la charge émotive de leur musique étaient inégalées. Ils représentaient l’âme même de la rébellion des années 80. Leurs chansons hard comme Seek & Destroy, Creeping Death et Master of Puppets provoquaient des mosh pits instantanés, qu’elles soient jouées live ou sur un système de son maison, et leurs titres plus deep comme Fade To Black, Welcome Home (Sanitarium) et One résonnaient avec le côté sombre de la génération X, jeune, débordante d’énergie et laissée à elle-même.

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Bref, l’époque glorieuse où Metallica jouait du thrash metal est la raison principale pour laquelle tout le monde les aime encore aujourd’hui. Un parcours sans faute de huit ans, c’est quand même spécial.

Je vous défie de ne pas avoir de frissons en regardant cette vidéo.

L’époque controversée

Je vais peut-être me faire lancer des roches pour avoir dit ça, mais : le changement de son abrupt de Metallica dans les années 90, c’était pas si pire que ça. Y’a plein de bon stock qui en est sorti. C’est juste que ça en a surpris plus d’un. Passer du thrash metal au hard rock commercial, c’est un peu comme si Thom Yorke décidait de lâcher Radiohead du jour au lendemain pour devenir DJ dans le style de David Guetta. Tu t’en sortiras pas sans faire chier tes fans.

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Le deuxième Metallica, celui que tant de monde aime haïr, c’était quand même un esti de bon band de hard rock. Oui, leur matériel des années 90 n’est pas à la hauteur de celui de l’époque glorieuse, mais rien n’aurait vraiment pu l’être. Cependant, si on se met à creuser dans leur discographie, on trouve des bonnes tounes à la pelle: Enter Sandman, Sad But True, Wherever I May Roam, Until it Sleeps, King Nothing, The Memory Remains… même Fuel est pas pire. On s’entend tous qu’écrire une chanson sur son exhaust de char, c’est weird et un peu douche sur les bords, mais le riff de guitare de Kirk Hammett est catchy et le refrain reste dans la tête pendant minimum trois jours après chaque écoute.

Pourquoi avoir fait un changement de son si abrupt? Pourquoi s’être fait couper les cheveux? Excellentes questions. Il y eut un tremblement de terre dans le monde de la musique nommé Nirvana en 1991 et pas mal tout le monde a eu à ré-enligner ses flûtes s’il voulait continuer à jouer à la radio et à bénéficier du soutien de leur étiquette de disques. Le grunge a été le coup de départ des années de gloire du rock alternatif à la radio et… la vérité c’est que Metallica a pris goût à ce style musical et le groupe a développé des compositions musicales alternatives pas du tout piquées des vers. Très peu de leurs fans le leur ont pardonné, cependant . Le fait que Slayer et Anthrax (et en partie Megadeth) ont continué à faire du thrash metal n’a pas aidé. Je suis un metalhead moi-même, mais les metalheads se sentent trahis à rien. Ils aiment la sensation que ça leur apporte, comme dirait l’éminent critique Américain Chuck Klosterman. Cela nous emmène à l’époque contemporaine du groupe.

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L’époque contemporaine

Comme le dit l’adage, une image vaut mille mots :

En fait, c’est un peu plus compliqué que ça. Oui, les gars ont vieilli et ils se sont embourgeoisés, mais il y a eu des problèmes d’alcool et des chicanes internes mêlées à tout ça. Ils ont montré la porte de sortie à leur bassiste Jason Newsted. Ils ont sorti leur album de tounes de mononcles. Tout ça les aura mené à St. Anger, de loin le pire album dans leur discographie et probablement la pire forme de torture sonore jamais enregistrée au 21e siècle. C’est le genre de choses que l’armée Américaine fait jouer à Guantanamo pour faire craquer les prisonniers de guerre et leur extirper des aveux. J’veux dire, jugez-en par vous-même.

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C’tune jooooke!

Voici un vrai extrait.

Bien que St. Anger ait passé proche d’être la fin de Metallica, elle n’aura été qu’un passage difficile dans son histoire tourmentée. Un passage qui les aura mené à aujourd’hui et à l’hybride bizarre et un peu lifeless de hard rock et de thrash metal qu’ils jouent pour faire plaisir à leurs fans. Parce que selon l’historien de la musique Ian Christe, dans son livre Sound of the Beast, James Hetfield et Lars Ulrich ont toujours été dans le milieu de la musique pour les femmes et l’argent. Donc, la perception du public et la génération de revenus, c’est très important pour eux. C’est important pour Metallica de donner à leurs fans ce qu’ils veulent et leurs fans, les purs et durs, ont toujours voulu du thrash metal. C’est pour ça qu’on a des albums comme Death Magnetic et Hardwired… to Self-Destruct aujourd’hui. C’est de la bonne musique, mais ça n’a pas du tout l’esprit et l’énergie des premiers albums. C’est un peu injuste de demander à des millionnaires dans la cinquantaine de faire de la musique avec la même fougue que dans leur jeunesse, non?

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Y’a eu LuLu aussi, la collaboration ultra-bizarre faite avec Lou Reed qui a vendu environ 18 copies, mais on a presque tous oublié ce malheureux accident de parcours, alors on va le balayer tout doucement sous le tapis et l’oublier là. Sérieux, même si vous êtes curieux de l’écouter, je vous conseille d’épargner cette immonde expérience sonore à vos tympans. Cet album vaut un article à lui seul pour expliquer à quel point c’est horrible.

On a refusé à Metallica toute forme d’évolution musicale. Ça ne les a bien-sûr jamais empêché d’expérimenter et de partir dans toutes sortes de directions, mais ça leur a donné mauvaise réputation auprès de leurs fans de la première heure, chose qui a suivi le groupe pendant toute sa carrière. Cette étrange notion que Metallica sont des traîtres à leurs racines et des vendus est la raison pour laquelle Metallica, malgré leur succès monstre, est un groupe légèrement sous-évalué. Leur héritage culturel devrait être encore plus grand qu’il ne l’est aujourd’hui. Ils ont été le plus grand band de rock au monde pendant deux décennies et sont encore l’un des plus grands, n’en déplaise à leurs détracteurs.

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