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En 2017, dans la foulée de dénonciations, alors que le monde entier était plongé dans un tourbillon d’histoires d’horreur et que plusieurs victimes rassemblaient tout leur courage pour livrer des témoignages à glacer le sang, je me suis tenue là, derrière mon écran, à vouloir taper un simple #metoo en commentaire d’un post Facebook. Mais je ne l’ai jamais fait.
Je ne l’ai jamais fait parce que je voulais laisser la parole à ces femmes qui ont vécu quelque chose de « vraiment » grave. D’« assez » grave.
Je ne veux pas raconter mes histoires, je veux simplement vous parler parce que vous avez des choses à vous reprocher, mais que vous ne le savez peut-être pas.
Je ne l’ai jamais fait parce que je pensais que ce que j’avais vécu n’était pas assez gros, pas assez important, pas assez traumatisant pour que ça vaille la peine de joindre ma voix au mouvement. Parce que ce n’était pas son intention, il ne s’en est même pas rendu compte, je sais que c’est une bonne personne dans le fond, il ne ferait jamais ça consciemment. Il n’est pas un danger pour les autres filles.
Alors j’ai effacé mon petit me too dans la barre de commentaires et je me suis répété qu’il n’y avait rien là, que ça n’arriverait plus de toute façon.
C’est arrivé de nouveau. Et encore.
Je ne veux pas raconter mes histoires aujourd’hui. Parce que oui, des histoires, à bien y penser j’en ai plein, comme c’est le cas de la vaste majorité des femmes. C’est le cas pour des hommes aussi. Mais ça, vous le savez déjà, on nous le répète tout le temps. Je ne veux pas raconter mes histoires, je veux simplement vous parler parce que vous avez des choses à vous reprocher, mais que vous ne le savez peut-être pas. Ou peut-être que vous ne voulez tout simplement pas vous l’avouer.
C’est correct, je vais vous le dire pareil.
Probablement qu’avec la récente vague de dénonciations sur le web, vous vous êtes posés deux minutes pour réfléchir. Si vous ne l’avez toujours pas fait, je vous invite à le faire. Parce que l’agresseur, c’est peut-être vous. Ce ne sont pas que des « méchants », des « gros porcs », des « violeurs ». Souvent, ce sont des gars « ben ordinaires ». C’est à vous que j’écris cette lettre.
C’est normal de ne pas avoir envie de se rendre compte que vous êtes peut-être cette personne qui a déjà agressé un.e partenaire. Mais vous savez ce qui pourrait contribuer à briser le cycle? En parler.
Engagez la conversation avec vos amis, sincèrement, sur le consentement.
Vous l’avez bien entendu le non, vous l’avez senti l’hésitation, vous l’avez remarqué le manque d’enthousiasme, vous l’avez perçu au fond que le consentement était aux abonnés absents. Vous avez juste passé outre.
Mais surtout, engagez la conversation avec vos partenaires. Avec les partenaires de votre futur, mais surtout avec vos partenaires du passé. Oui, exactement celles et ceux à qui vous êtes en train de penser en ce moment. Celles et ceux avec qui vous avez peut-être franchi une limite. Celles et ceux que vous avez blessés, en le sachant très bien au fond de vous.
Je ne raconterai pas d’histoire parce que vous la connaissez par cœur l’histoire. Vous étiez là. Vous l’avez bien entendu le non, vous l’avez senti l’hésitation, vous l’avez remarqué le manque d’enthousiasme, vous l’avez perçu au fond que le consentement était aux abonnés absents. Vous avez juste passé outre.
Je n’écrirai pas de long post en lançant des noms. Si je sais que pour certain.e.s c’est nécessaire et que ça aide à guérir, je sais aussi que de mon côté, ça ne me ferait pas de bien. Mais je comprends maintenant que j’ai une responsabilité, celle de m’assurer que ça n’arrive plus. Ni à moi ni à d’autres.
Alors, chers garçons que j’ai fréquentés et les autres, chères femmes peut-être aussi, je vous demande de vous remettre en question. Je vous demande d’en parler, de questionner, de faire un travail d’introspection, d’être sincère dans votre démarche parce ce n’est pas en prétendant que l’agresseur c’est forcément l’autre qu’on règle le problème.
Sincèrement,
Mélanie