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« Les trois carrés de chocolat » : récit d’une intimité brisée
Traumavertissement : agressions sexuelles
Ça va, les gars? Vous pouvez ranger votre petit chien en balloune dans vos culottes. On vous fera signe quand on voudra le voir. L’ère des cro-magnons est révolue. On abrutit donc ses proies à l’aide de stupéfiants au lieu de les assommer, hein? Vous assouvissez vos bas instincts sans vous soucier des répercussions de ces nuits sans lendemain alors que vos victimes peinent à se sortir du cauchemar que vous leur avez fait vivre.
Vous devriez lire la BD Les trois carrés de chocolat de Mélodie Vachon Boucher. Ça mettrait un peu de plomb dans votre tête de graine.
« La première fois que j’ai joué au plaisir avec un garçon, il m’a dit que je ne pouvais pas le laisser comme ça en plein milieu.
Que ça faisait mal sinon.
Je l’ai cru. »
C’est ainsi que débute le récit illustré dans lequel se dévoile une victime de viol nous parlant sans détour des sévices endurés, de son effondrement et du chemin vers la guérison.
Oui, avoir les blue balls, ça peut être inconfortable et quelque peu frustrant, mais pas de là à imposer qu’on nous fasse impérativement jouir sous peine d’explosion testiculaire. Disons que ça jette mal les bases d’une sexualité saine et épanouie.
Une autre fois, un gars qui la « dry hump » vigoureusement — au point d’être désagréable — est finalement parti finir sa besogne à la salle de bain quand elle lui a demandé d’arrêter. Il l’a larguée quelques jours après l’incident. Talk to hand, maudit branleur.
Des failles commencent à fragiliser l’intégrité de l’état mental et physique de la jeune femme. C’est déjà assez difficile de se montrer vulnérable quand on est dans une relation dite normale. Imaginez l’étendue des dommages lorsqu’elle se réveilla brutalement, la culotte baissée pendant un week-end passé en compagnie d’un ex.
« J’ai essayé de le pousser, mais il était trop lourd.
Quand j’ai eu un haut-le-cœur, il s’est écarté.
J’ai vomi.
J’ai perdu conscience. »
Lorsqu’elle a retrouvé ses esprits, il était en train de la pénétrer…
Elle a malgré tout continué à vivre sa vie et à fréquenter des garçons. Le dernier en lice a tout manigancé pour l’attirer dans son 1 1/2 et obtenir son « dû » malgré le fait qu’elle lui avait explicitement fait savoir qu’elle n’était pas intéressée à coucher avec lui. C’est donc dupée qu’elle a abdiqué pour en finir au plus sacrant.
Son corps s’est déconnecté de sa tête pour la protéger. S’en sont suivies des années d’absences et de honte. Un jour, n’en pouvant plus, elle a consulté un psychologue qui lui a expliqué que ces actions perpétrées contre son gré étaient catégoriquement des actes criminels; elle ne l’avait jamais considéré ainsi. Cette révélation, tel un électrochoc, la fit sortir de sa torpeur. Ça et les trois carrés de chocolat.
On aura beau le rabâcher, crier sur tous les toits que c’est absolument inadmissible, pas une semaine ne passe sans que les quotidiens ne fassent état d’histoires d’abus sexuel ou de viol. L’idée du consentement s’immisce tranquillement dans la conscience collective, mais changer des comportements prend malheureusement du temps. On peut au moins se réjouir que les survivantes ne restent plus coites.
La bande dessinée de Mélodie Vachon Boucher est une lecture mi-amère qui donne froid dans le dos et chaud au cœur. Une œuvre essentielle qui devrait être ajoutée au cursus des élèves du secondaire comme outil pédagogique et de prévention afin que l’on puisse enrayer ce fléau une fois pour toutes.