Les meilleurs et pires logos de 2022

Une année passe, une page se tourne et laisse dans son sillage une vague de bons coups et une poignée de fiascos. Profitons de cette trêve des Fêtes pour jeter un regard nostalgique sur les logos que la dernière année a vu naître.

Parce que les logos, c’est comme une métaphore de la vie : il y en a des joyeux, des sévères, des riches, des pauvres, des tout jeunes, des vieux qui se font ravaler, et il y en a toujours un qui ne semble être là que pour amuser le monde.

C’est le studio montréalais Caserne qui s’est vu confier la nouvelle identité du Conseil canadien pour les réfugiés, un organisme pancanadien dédié à la défense des droits des réfugié.e.s et des migrant.e.s. Dans la plus pure tradition des logos modernistes canadiens (et suisses) des années 1960, l’acronyme géométrique se décline avec un fort contraste sur des tons francs de rouge, de noir, de brun et de blanc, moitié austère et moitié ludique. Et tant pis pour ceux et celles qui croient encore que CCR signifie Creedence Clearwater Revival…

En ces temps troubles pour le monde de l’aéronautique, une nouvelle compagnie aérienne est née. Aux yeux des Occidentaux, le logo peut paraître simpliste ou carrément enfantin, mais il est parfaitement ciblé pour son marché. La police minimaliste et géométrique épouse la forme du fuselage, les couleurs combinent le bleu céleste et le Akebono traditionnel (lever de soleil), et la paire de lettres « rj » symbolise un contact main à main bienveillant. Attachez votre ceinture, le premier avion d’Air Japan décollera dans le courant de l’année 2023!

Au risque de passer pour un obsédé du minimalisme (ce qui n’est pas tout à fait faux), je vous présente le nouveau logo d’un créateur de mobilier belge dont la production mise sur la sobriété des formes et des couleurs, mettant matières et textures au premier plan. Le logo est signé Skinn. Quatre lettres. Trois lignes, un cercle. Joli coup.

Eh oui, il est parfois nécessaire de diriger les projecteurs sur l’identité visuelle d’un documentaire! L’habillage de Janette & filles a été confié à une équipe 100 % féminine de chez Sid Lee, laquelle a concocté une affiche et une série d’images délicieusement vintage et parfaitement fidèles aux codes visuels des époques traversées par notre Janette nationale.

Ceux et celles qui me connaissent savent que je suis peu enclin à encenser les organismes de sport professionnel, mais ce club de foot/soccer belge a su attirer l’attention des amateurs et amatrices d’identités visuelles audacieuses en prenant son nom à la lettre. Les six lettres de CERCLE se fondent les unes aux autres pour former un C majuscule. On peut aussi voir un ballon dans ce cercle incomplet. Une solide charte graphique en vert et noir de chez Skinn achève de donner du punch à la marque, et c’est le but!

Puisque les aliments végé souffrent encore d’une réputation de nourriture triste et fade, pourquoi ne pas voler les codes du fast-food et jouer la carte du plaisir? Pourquoi ne pas faire des saucisses à base de carottes et baptiser le produit d’un calembour bien juteux? Pourquoi ne pas se gâter au passage en plongeant une typo réjouissante dans une débauche d’orange? Une autre recette signée Caserne et primée au plus récent concours Idéa.

À l’instar du célèbre Jumpman de Michael Jordan, la pose victorieuse d’Usain Bolt devrait devenir un logo déposé, puisque le sprinter jamaïcain multimédaillé a lui-même soumis un dossier cet été auprès du Bureau américain des brevets et des marques de commerce. Et, comme le prouve la liste de domaines associés qu’il a réservés, l’homme voit grand! Un beau plan de retraite.

Inutile de tourner autour du pot, commençons par le pire des pires. Si ce logo all-dressed d’un obscur comté du Missouri date de 2018, il n’a connu la célébrité que cette année, après avoir été partagé dans la rubrique CrappyDesign de Reddit. Régalez-vous, car tout y est : l’entassement visuel, la typo mal alignée, l’aigle (qui tombe), la Bible, le drapeau, la carte, la pelle et la pioche; il ne manque qu’un crâne en feu. Parce que plus, c’est mieux!

En mai, le Centre de services scolaire du Lac-Saint-Jean dévoilait une nouvelle image axée sur l’excellence, sous la forme d’un pictogramme d’une main qui fait le signe « OK ». Oupelaille! Il semble que ce geste ait été récupéré par les suprémacistes blancs américains pour se reconnaître entre eux. Vous n’étiez pas au courant? Moi non plus, mais c’est le genre de vérification qu’on a le devoir de faire avant un lancement public.

Émoi dans le monde sans pitié du gaming : Street Fighter 6 de Capcom sort, et son logo déçoit. En résumé, on s’attendait à ça (1), mais on a eu ça (2). On a menacé de casser des gueules et on a obtenu une mise à niveau rose – ROSE! – assez décevante (3), puis, après un gros travail de mise en scène est enfin arrivée une version (4) digne des bagarreurs de rue virtuels. On a eu chaud, ça aurait pu dégénérer!

Barnstaple est une charmante bourgade anglaise qui aurait mérité un beau logo comme les Britanniques savent en concevoir quand ils s’en donnent la peine. Mais non, quelqu’un a décidé qu’il fallait faire « moderne ». On a donc choisi une fonte corpo sans âme et des couleurs un peu techno. Because why not. Cerise sur le pudding, on a posé sur le pauvre « e », qui n’avait rien demandé, un robot dessiné par un bébé. Ah non, on m’informe qu’il s’agit du plan du centre-ville. Réalisé sur MS Paint. Mais quelle bonne idée.

Repéré sur le site d’une clinique italienne par un contributeur de Reddit, ce logo pour des services de chirurgie esthétique a tout ce qu’il faut pour vous tenir loin de tout bistouri. Impossible de sortir indemne de ce cauchemar visuel.

Pas de palmarès annuel sans un logo à connotation accidentellement phallique. Et c’est encore plus savoureux quand il est l’œuvre d’un gouvernement – australien, dans ce cas – et qu’il s’agit de promouvoir la compétence des femmes. C’est toujours fascinant de se dire que personne n’a rien remarqué avant que ce soit rendu public. Au moins, on nous assure qu’aucune aubergine n’a été maltraitée lors du design de ce logo.

Pas de palmarès annuel sans un logo à connotation accidentellement nazie. On a nos traditions. Comme notre Université Laval en 2016, l’école élémentaire East Side de Marietta (Georgie) a un problème d’aigle. Ce fier volatile est utilisé en héraldique depuis l’empire romain, mais quand il ressemble un peu trop au Reichsadler (aigle impérial) allemand, ça devient délicat. Ou catastrophique. Non mais qu’est-ce qu’on vous apprend à l’école?

D’un côté, le logo du Club de foot Montréal était dans ma liste des pires de l’an dernier, et je ne peux qu’applaudir la décision de le remplacer par un « vrai » logo. D’un autre côté, c’est encore un travail à moitié fait. Le nom est plus concis, les symboles graphiques sont plus clairs, et l’impact (sans allusion nostalgique) est globalement renforcé. Cependant, ce lys coincé dans un blason, lui-même coincé dans un cercle, n’est-ce pas un poil étouffant?

Un autre beau cas de sentiments contradictoires. Inutile de vous le cacher, j’ai pris un certain plaisir à voir les Russes faire un pied de nez au symbole du capitalisme indigeste qu’est McDonald’s, en basculant le célèbre M jaune comme on fait tomber une statue de son piédestal, pour en faire le logo d’une chaîne de restauration russe. Mais le clown est triste, puisque McDo a fermé ses succursales en réponse à l’invasion sauvage de l’Ukraine par l’armée rouge. Personne n’en sort gagnant.

J’ignore si c’est une bonne ou une mauvaise chose, mais c’est une sacrée coïncidence! En 2022, deux constructeurs automobiles français ont jeté leur logo postmoderne à la ferraille pour revenir à des emblèmes hérités du passé. 1960 pour Peugeot; 1919 pour Citroën, tout ça en clamant haut et fort se tourner vers l’avenir. Le pire, c’est que Renault, le troisième mousquetaire, avait ressuscité son logo de 1972 l’année d’avant. En arrière, toute!

Juste quand j’allais boucler cette chronique, une nouvelle arrive out of the blue. Après avoir fumé des champignons probablement périmés, Elon Musk rend public un nouveau programme d’abonnement à Twitter baptisé Blue et flanqué d’un visuel digne des meilleures productions direct-to-VHS des années 1980. Faut-il en rire, ou pleurer la mort imminente d’un réseau social? L’avenir nous le twittera.

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Passez de belles Fêtes et que tous vos sens s’émoustillent, des yeux jusqu’aux papilles!