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Les grandes citations qui ont fait avancer des débats de société
URBANIA et Noovo s’unissent pour vous rappeler les moments marquants de grands débats.
Pendant la récente période électorale, on peut dire qu’on n’a pas manqué d’occasions de regarder des gens s’obstiner. Les débats ont battu leur plein autant dans les médias que dans la vraie vie, et comme on adore ça au point d’en redemander, la télé nous gâte avec la nouvelle émission Les débatteurs de Noovo. L’animateur Michel Bherer y est entouré d’une équipe de débatteurs et de débatteuses – notamment Yves Boisvert, François Lambert, Geneviève Pettersen, Alex Perron, Me Anne-France Goldwater et Antonine Yaccarini – qui posent un regard franc sur l’actualité.
Il y a quelque chose de satisfaisant dans le fait d’assister à un débat, que ce soit dans sa forme classique – plusieurs personnes échangeant des idées en parlant généralement de plus en plus fort – ou dans sa forme plus large, comme lorsqu’un sujet fait controverse dans l’ensemble de la société. Dans les deux cas, il arrive qu’une personne sorte une phrase hautement convaincante qui fasse pencher l’opinion de ses adversaires – ou l’opinion publique – en sa faveur.
C’est donc en l’honneur des plus légendaires joutes verbales qu’on vous présente quatre citations tirées de débats qui ont fait bouger les choses.
Desmond Tutu : « Don’t raise your voice, improve your argument. »
Le nom de Desmond Tutu est bien connu au sein du mouvement antiapartheid, qui s’oppose à la ségrégation raciale qui fut appliquée en Afrique du Sud de 1948 à 1994.
Sans entrer dans les détails, le système en place en Afrique du Sud a longtemps donné la grande majorité du pouvoir et des richesses à une très petite minorité blanche, et il va de soi qu’il y ait eu et qu’il y ait encore des mouvements de protestation.
Desmond Tutu était le leader d’une branche pacifique de ces mouvements de protestation. Même pendant les débats les plus houleux, il a toujours su véhiculer une image calme et posée. Il est d’ailleurs connu pour la célèbre phrase « Don’t raise your voice, improve your argument. » (« Au lieu d’élever la voix, trouvez de meilleurs arguments. »).
Ces mots furent prononcés en 2004 dans le cadre d’une conférence pour la Nelson Mandela Foundation. En une seule phrase, les argumentaires antiviolence et prodialogues étaient complets.
Tout le monde est capable de crier, mais on ne peut utiliser des arguments justes que lorsqu’on a raison.
Pierre Falardeau : « Si tu te couches, ils vont te piler dessus. Si tu restes debout et tu résistes, ils vont te haïr, mais ils vont t’appeler “monsieur”. »
On ne peut faire un article sur les grandes citations qui ont fait avancer les débats de société sans citer l’homme qui a passé sa vie à brasser la cage!
Pierre Falardeau, auteur, réalisateur, militant et fier Québécois, s’est battu toute sa vie pour défendre les moins fortuné.e.s de sa Belle Province. À travers l’ensemble de son œuvre, il a critiqué la classe bourgeoise ainsi que l’idéologie colonialiste, toujours présente dans notre pays bilingue, encore aujourd’hui techniquement sous le joug de l’Empire britannique.
On aurait pu inclure ici des milliers de phrases de Falardeau qui démontrent parfaitement son amour pour la classe moyenne. Toutes dénonçaient les écarts entre les classes, mais visaient aussi à redonner une certaine fierté à ce peuple qu’il aimait tant.
« Si tu te couches, ils vont te piler dessus. Si tu restes debout et tu résistes, ils vont te haïr, mais ils vont t’appeler “monsieur” » : ces phrases n’ont pas été dites qu’une seule fois par Pierre Falardeau. Il les a répétées lors de nombreuses prises de parole, et elles ont même inspiré une nouvelle génération de militant.e.s après son décès. On les entendait beaucoup durant les manifestations étudiantes de 2012.
« Si tu résistes, ils vont te détester, mais ils vont t’appeler “monsieur” », ça signifie que rien n’est gagné d’avance, mais qu’on a quand même quelque chose à gagner à se défendre. Qu’il y a une fierté à trouver dans l’acte de combattre l’injustice et d’aller au bout de ses convictions.
Même si, au bout du compte, on n’obtient pas ce qu’on veut et que justice n’est pas rendue, on a la satisfaction d’avoir fait tout ce qu’on pouvait, et on obtient au moins une certaine forme de respect de la part de nos adversaires.
Ce n’est pas rien. C’est même beaucoup.
Greta Thunberg : « How dare you? »
On ne peut passer sous silence le débat sur l’urgence climatique. Bien que le sujet ne soit pas assez débattu aux heures de grandes écoutes, la crise climatique touche tout le monde, et les positions sur la question vont dans tous les sens. Certaines personnes nient complètement l’existence des changements climatiques, d’autres estiment que la fin du monde aura lieu demain matin, et tout ce qu’il y a entre les deux existe et est défendu quelque part.
Dans un débat qui touche autant d’intervenant.e.s, il est donc étonnant que le discours ayant eu le plus d’impact depuis des années ait été livré par une fille de 16 ans, Greta Thunberg!
Alors qu’elle était encore adolescente, Greta Thunberg s’est mise à avoir beaucoup de visibilité en tant qu’activiste contre les changements climatiques grâce à sa grève scolaire pour le climat. En 2019, la jeune militante suédoise a même été invitée à tenir un discours au Sommet Action Climat de l’Organisation des Nations Unies, et elle n’était pas contente…
On pourrait croire que son jeune âge aurait eu un impact négatif sur sa crédibilité, mais au contraire, il lui a donné le droit de s’adresser à la génération qui a condamné la sienne. « Vous avez volé mes rêves et mon enfance avec vos paroles creuses. Je fais pourtant partie de ceux qui ont de la chance. Les gens souffrent, ils meurent. Des écosystèmes entiers s’effondrent, nous sommes au début d’une extinction de masse, et tout ce dont vous parlez, c’est d’argent, et des contes de fées de croissance économique éternelle? Comment osez-vous? », a-t-elle scandé en anglais.
Ça n’a pas tout réglé, mais ce moment a poussé une partie du public et des gouvernements à prendre un peu plus de responsabilités en lien avec la crise climatique. Les expert.e.s sur le sujet ont été un peu plus écoutés également, et on s’est mis à parler beaucoup plus de catastrophes climatiques dans les bulletins de nouvelles.
Il y avait pourtant le feu en Amazonie depuis longtemps, mais c’est comme si collectivement, on avait commencé à considérer ce genre d’information comme étant plus qu’une possible fake news.
Bong Joon-ho : « Once you overcome the one-inch-tall barrier of subtitles, you will be introduced to so many more amazing films. »
Vous me direz : « Vincent, le gala des Oscars, ce n’est pas un débat! » C’est encore drôle. Vous l’aurez constaté si vous vous êtes rendu.e ici dans l’article, les débats qui ne sont pas en lien avec des élections quelconques ont rarement lieu sur la place publique.
Souvent, un débat qui concerne un sujet artistique, sportif ou tout autre sujet contenant un aspect de performance va plutôt s’effectuer par des décisions administratives et la distribution de reconnaissances. Donc oui, dans le débat sur ce qui est considéré comme un grand film ou pas, les récompenses aux Oscars sont probablement la plus grande plateforme où argumenter sur le sujet.
Je suis désolé de vous l’annoncer, mais c’est un fait : jusqu’à très récemment, les films qui n’étaient pas tournés en anglais n’avaient pas le même niveau de reconnaissance que les autres aux Oscars. Avant 2020, ce n’était jamais arrivé qu’un film tourné dans n’importe quelle autre langue que l’anglais ait gagné le prix du meilleur film!
Quand le film Parasite de Bong Joon-ho a remporté le fameux grand prix, le réalisateur sud-coréen a déclaré : « Once you overcome the one-inch-tall barrier of subtitles, you will be introduced to so many more amazing films. » (« Une fois que vous aurez franchi la barrière des sous-titres, vous découvrirez bien d’autres films incroyables. »)
Parasite est le premier film sud-coréen à avoir gagné un oscar. Il a remporté quatre statuettes ce soir-là, et non seulement le monde s’est-il ouvert à ce que la Corée du Sud avait à offrir à nos écrans, mais ce fut aussi un moment d’ouverture pour l’industrie, qui se rendit compte par cette phrase toute simple qu’en effet, la barrière qui nous sépare d’un monde de films merveilleux a toujours été très mince.
Tous les créateurs et toutes les créatrices de films dans le monde (incluant au Québec) ont été défendus par cette phrase.
Bref…
Il y a des gens qui débattent pour le plaisir de gagner, mais je pense que la richesse du débat tient plutôt à qu’il permet de s’approcher d’une vérité par la confrontation d’idées divergentes.
Dans un débat, on défend de tout son cœur ce qu’on pense être vrai, et c’est dans cet investissement personnel qu’on puise la force de faire bouger les choses. C’est ce qui fait que les débats sont sains et font concrètement évoluer l’humanité.
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Pour assister à de riches débats sur des questions qui nous touchent, regardez Les débatteurs de Noovo du lundi au jeudi à 22 h 30 ou en rediffusion à 16 h 30. L’émission est aussi diffusée sur noovo.ca.