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Les Canadiens sont des technonuls?

Par
Benoît Gagnon
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Oui, oui, je sais, cela faisait un bail qu’on ne s’était pas parlé. Il faut me comprendre. J’ai tout d’abord choppé une merde à l’œil, ce qui m’a grandement handicapé, et ensuite, ben j’ai pris des vacances. Des vacances vraiment méritées cela dit. Mais, lors de mes vacances, j’ai pensé à vous. En effet, j’étais aux États-Unis, et lors de mon périple, j’ai pu constater à quel point le poids des technologies de l’information est différent dans le pays de l’oncle Sam.

Vous cherchez du Wi-Fi gratuit? Pas besoin d’aller très loin. À peu près tous les commerces se battent pour vous fournir de l’accès Internet gratuit. Tsé, question que vous demeuriez dans le magasin le plus longtemps possible. En plus, lesdits magasins vous offrent pas mal tous la possibilité de commander en ligne, une situation qui jure avec ce que l’on vit ici.

Si vous êtes dans une ville ayant moindrement d’envergure, c’est à peu près impossible de vivre déconnecté. J’étais sur une île comptant 155 000 habitants et je peux vous dire que la place qu’y occupait les technologies de l’information semblait plus importante qu’au pays. Par exemple, j’ai eu la chance de souper avec des gens du domaine du journalisme là-bas, et je peux vous dire que la réflexion sur le rôle du journaliste à l’heure du numérique est rendue pas mal plus loin qu’ici. Les débats sont présents, houleux, et surtout beaucoup plus avancés qu’au Canada.

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Pourquoi cette situation est si différente? Si la question est facile à poser, la réponse, elle, n’est pas facile à fournir. C’est probablement un ensemble de conditions qui rendent le tout très différent south of the border. Lesquelles? Fonctionnons par hypothèses si vous le voulez bien.

L’intérêt des individus et des entreprises

Première hypothèse : le Canadien moyen n’aime juste pas les technologies. Ce serait culturel. Les États-Uniens auraient plus tendance à tripper sur les technologies, et nous, ben on serait plus en harmonie avec la nature. On aime bien ça les ressources naturelles, tsé. Le pétrole pis toute, pis toute.

Autre hypothèse plausible : les Canadiens mesurent mal le potentiel financier des technologies de l’information. Pourtant, ce n’est pas parce qu’il n’y a pas d’argent à faire avec les technologies au Canada. Ça fait des années que les consommateurs canadiens se font littéralement enfirouaper par un oligopole de fournisseurs d’accès Internet et de téléphonie cellulaire, engrangeant ainsi des profits mirobolants sur le dos des gens qui ne peuvent goûter au plaisir d’une saine compétition. Me semble que le message est assez clair qu’il y a une piastre à faire avec ça!

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La culture numérique et l’État

Troisième hypothèse : la technologie ne mérite pas sa place dans le programme politique canadien, parce ben, ce ne sont pas des vraies affaires comme disait l’autre. Ce qui frappe d’autant plus dans le clivage numérique entre le Canada et les États-Unis, c’est l’importance accordée aux questions des technologies de l’information au chapitre des politiques. Avez-vous vu des discussions entourant les technos dans les présentes élections fédérales ? C’est ça, rien. Ça jase de ben des affaires plus ou moins utiles pour un débat de société sain et responsable sur des enjeux de fond, mais pas grand-chose sur la révolution économique qui drive les économies depuis des années déjà.

Du côté du Québec on n’est pas vraiment mieux. On attend depuis des lustres un plan numérique, histoire d’enfin déployer une vision porteuse qui pourrait amener la société québécoise dans un chemin qui lui permettrait d’atteindre la prospérité. Malheureusement, le numérique est pour ainsi dire quasi complètement ignoré des politiciens de la scène québécoise. En fait, quand ils s’en préoccupent, c’est généralement que c’est vu comme étant un problème par un lobby qui a pas mal d’influence, genre le lobby du taxi par rapport à Über.

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Dernière hypothèse : les Canadiens ne comprennent rien aux technologies de l’information. Alors que l’on coupe partout, on coupe encore plus dans l’éducation. Or, de toute évidence, il y a un analphabétisme numérique qui dure et perdure au pays en matière de compréhension des technologies de l’information. Bref, on n’ira pas loin avec ça. En fait, on ne comprend tellement rien qu’on se fait facturer pour pas mal n’importe quoi, et ce, à n’importe quel prix. “Si tu donnes un poisson à un homme, il mangera un jour. Si tu lui apprends à pêcher, il mangera toujours”, qu’il disait l’autre.

Évidemment, vous comprendrez que ces hypothèses sont farfelues. Néanmoins, elles sous-tendent probablement certaines vérités. Parce que donner de l’importance aux technologies de l’information, c’est plus que savoir utiliser Facebook.

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