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L’économie sociale : une voie vers un monde plus juste?

Réduire les inégalités tout en brassant des affaires? Ça se peut!

Par
Pier-Luc Ouellet
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URBANIA et PME MTL s’unissent pour mettre en valeur l’économie sociale au Québec, ce modèle d’affaires qui séduit de plus en plus d’entrepreneurs à la recherche d’un monde meilleur.

Le monde actuel fait face à de nombreuses crises, et ça a commencé bien avant la COVID : changements climatiques, crises financières, montée des inégalités sociales… disons que les raisons de s’inquiéter ne manquent pas.

Mais quand vient le temps de proposer des solutions concrètes aux nombreux problèmes qui nous affligent, on se demande vers où se tourner.

Pour certains, la réponse à une partie des problèmes actuels se trouve dans le modèle de l’économie sociale. De quoi aurait l’air une société dans laquelle ce modèle économique prendrait une plus grande place?

On en a parlé avec Anyle Côté, directrice du Conseil d’économie sociale de l’île de Montréal, ainsi qu’avec Jérôme Glad, cofondateur de La Pépinière, une entreprise qui réinvente les espaces publics et qui a justement choisi le modèle de l’économie sociale.

C’est quoi, l’économie sociale?

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Avant d’aller plus loin, ça vaut la peine de s’arrêter un instant pour s’assurer qu’on sait de quoi on parle. J’ai moi-même étudié dans un programme universitaire où on en traitait abondamment, et je ne suis pas certain de savoir de quoi il retourne (quoique ça en dit peut-être plus long sur mes qualités d’étudiant qu’autre chose…).

Anyle Côté, heureusement, l’explique simplement : « L’économie sociale, c’est le modèle d’affaires des organismes à but non lucratif, des coopératives et des mutuelles qui ont une activité économique. » Ça regroupe aussi bien des cinémas que des CPE et des entreprises comme La Pépinière.

«Pour moi, l’économie sociale, c’est une économie de transformation sociale. L’objectif n’est pas de faire du profit, mais de mener à une transformation que l’on veut sociale.»

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Dans une entreprise d’économie sociale, donc, on ne parle pas de profits mais plutôt des surplus, qui sont redistribués dans la communauté et chez les membres, pourvu que ça serve la mission de l’organisation. Ou comme le dit Anyle Côté : « Pour moi, l’économie sociale, c’est une économie de transformation sociale. L’objectif n’est pas de faire du profit, mais de mener à une transformation que l’on veut sociale. »

Liberté, égalité, conseil d’administration

On croirait presque que mes deux intervenants se sont consultés avant que je les interroge, parce que naturellement, ils mettent tous deux beaucoup l’accent sur la réduction des inégalités que permet l’économie sociale.

Comme l’explique Jérôme Glad, le modèle que lui et son collègue Maxim ont choisi au moment de fonder La Pépinière pourrait faire sursauter les entrepreneurs qui se lancent dans le monde des affaires en espérant devenir les prochains Jeff Bezos (ou, au moins, les prochains François Lambert) : « [Maxim Bragoli et moi], on a beau être les fondateurs et les gestionnaires de ça, y’a pas de notion de profit qui va dans nos poches. On est dans une grille salariale qui est équitable avec l’équipe, et c’est le CA qui vote nos salaires. »

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Bref, La Pépinière s’assure que tout le monde est payé de façon juste. Ici, pas de proprio qui roule en limo tandis que les employés grattent leurs fonds de tiroir pour payer des billets de métro.

En clair : il s’agit d’un modèle plus équitable et dont la définition même pousse à prendre soin des gens… en sacrifiant le rêve de profits gargantuesques.

D’ailleurs, Jérôme a fait le deuil d’être un jour un milliardaire se baignant dans des larmes de licornes, et il s’en porte très bien. « Je pense que si les gens en économie sociale généraient des multimillions en profits, ils les réinvestiraient dans la société tellement ils sont sensibilisés. Parce qu’au fond, qu’est-ce tu fais avec des millions en poche? »

« Si j’étais soudainement multimillionnaire, je n’investirais pas dans une énorme maison loin des autres, j’investirais pour améliorer ma communauté, affirme Jérôme. Si demain je gagne à la loto, je vais investir pour améliorer le parc de mon quartier! »

Alors, à quoi ressemblerait un avenir sous le signe de l’économie sociale?

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Évidemment, il est toujours risqué de jouer à Nostradamus. Qui aurait pu prédire à pareille date l’an dernier qu’on se découvrirait tous une passion pour les réunions Zoom? Pas moi, en tout cas.

Mes interlocuteurs se sont quand même prêtés au jeu et ont tenté de décrire pareil avenir.

Pour Anyle Côté, ses bienfaits seraient multiples, et on le voit déjà : « Je pense qu’on aurait une société où il y aurait beaucoup moins d’inégalités, beaucoup plus de participation et beaucoup plus de retombées directes. Prenons par exemple la coop ZAP (qui fournit l’internet sans fil dans les lieux publics). Les retombées, c’est qu’on a accès à l’internet sans fil gratuitement dans une multiplicité de lieux. Aujourd’hui, on tient ça pour acquis, mais ce n’était pas du tout le cas il y a une dizaine d’années! »

Et ce souci de participation risque aussi de bouleverser l’organisation de la vie professionnelle : « On voit que de nombreuses coopératives professionnelles se mettent en place, des coopératives d’architectes, d’ingénieurs… Et qu’est-ce que les gens recherchent? Ils veulent participer à leur vie démocratique, à la vie de leur organisation. »

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Jérôme Glad formule des prédictions semblables : « On réduirait les écarts de richesse, il n’y aurait pas d’entreprises plus riches que des États, mais il y aurait plus de communautés qui se partageraient la richesse. »

«Demain, si tu dis que les individus n’ont plus le droit d’engranger des profits, ça change complètement l’économie mondiale. C’est sûr que ça fait qu’une personne à la tête d’une entreprise ne pense pas du tout à ses poches, elle pense plutôt à ce qui peut arriver de bon pour la société ou pour sa clientèle.»

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Plus encore, le modèle de l’économie sociale permet selon lui de repenser les fondements de notre société : « Demain, si tu dis que les individus n’ont plus le droit d’engranger des profits, ça change complètement l’économie mondiale. C’est sûr que ça fait qu’une personne à la tête d’une entreprise ne pense pas du tout à ses poches, elle pense plutôt à ce qui peut arriver de bon pour la société ou pour sa clientèle. […] Actuellement, dans les grandes entreprises qui n’adoptent pas le modèle de l’économie sociale, ce sont surtout les chiffres et les gains pour les actionnaires qui motivent les décisions. Dans le modèle de l’économie sociale, c’est vraiment la notion de richesse collective qui est mise de l’avant. »

Faut avouer que ça fait rêver!

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