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Le triomphe imparfait de Ben Affleck

Ode à un acteur limité, mais pas tuable!

Par
Benoît Lelièvre
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Ce lundi, l’acteur américain Ben Affleck soufflait 50 bougies sur son gâteau d’anniversaire. Le colosse du Massachusetts a toutes les raisons de sourire et de contempler le chemin parcouru avec satisfaction. Oscarisé quatre fois plutôt qu’une et fraîchement marié à Jennifer Lopez, tout porte à croire que les livres d’histoire seront tendres envers lui. On s’en souviendra dans cinquante ou cent ans comme d’un success story typique à l’américaine comme on les aime.

Pourtant, si vous aviez un pouls et le moindrement d’intérêt envers la culture américaine ces vingt dernières années, vous savez déjà que cette histoire n’est pas si simple.

La carrière de Ben Affleck s’est retrouvée aux toilettes plus d’une fois. Ce qui fait la beauté du personnage, c’est qu’il n’a jamais laissé l’adversité, les décisions professionnelles douteuses ou même ses propres mauvais choix de vie l’empêcher d’essayer de trouver sa place dans un milieu hypercompétitif. Il a vaincu plusieurs fois son propre pire ennemi : lui-même.

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Ben Affleck est la preuve vivante qu’on peut s’enfarger, devenir la risée d’internet et ne pas laisser ces épisodes d’adversité nous définir. Ode à un personnage dont le parcours est fait d’autant de ratés que de réussites.

Kevin Smith, Bennifer et le premier déraillement

La carrière de Ben Affleck au grand écran a débuté de manière on ne peut plus classique avec quelques rôles secondaires de joueurs de football et de gros bras immatures. C’est d’ailleurs l’un de ces rôles (Shannon Hamilton dans Mallrats) qui lui permettra de rencontrer l’architecte de sa réussite initiale, le réalisateur Kevin Smith. Ce dernier écrira le rôle de Holden McNeil dans son film Chasing Amy spécialement pour lui.

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Étant l’un des premiers films grand public à aborder (très maladroitement) la vie des personnes LGTBQ2IA+, Chasing Army fera fureur sur le circuit des festivals et remportera même deux prestigieux Independent Spirit Awards.

L’ascension de Ben Affleck vers les plus hauts sommets hollywoodiens est déjà sympatoche. Entraîné sous les projecteurs par la bande malgré ses limites flagrantes en tant qu’acteur dramatique, il trouve le moyen de monnayer sa belle gueule dans une série de films pas trop compliqués comme Armageddon, Pearl Harbor, Dogma et l’immortel film pop corn The Sum of All Fears. Il en profitera aussi pour faire briller ses talents de scénariste et faire produire Good Will Hunting, qui lui méritera son premier Oscar pour meilleur scénario original.

En 2006, tout le monde s’attendait à le voir commencer à apparaître dans les pubs de concessionnaires automobiles locaux et d’avocats véreux pour pouvoir joindre les deux bouts.

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Comme le disait Vincent Cassel au début de La Haine : « Jusqu’ici, tout va bien. » C’est difficile de mettre le doigt sur LE moment où la carrière du beau Ben s’est mise à dérailler, mais sa relation avec la chanteuse la plus populaire de 2003 Jennifer Lopez lui a assurément mis énormément de pression médiatique et ses décisions d’affaires ont pris une tournure douteuse. Ses rôles dans Daredevil, Gigli et Jersey Girl lui coûteront non seulement son couple, mais le rétrograderont aussi plus vite que l’éclair au rang d’acteur de série B.

Il ne jouera que dans cinq films pendant les trois années suivantes, dont les très oubliables Man About Town, Hollywoodland et Surviving Christmas. En 2006, tout le monde s’attendait à le voir commencer à apparaître dans les pubs de concessionnaires automobiles locaux et d’avocats véreux pour pouvoir joindre les deux bouts.

Résurrection, Oscars et deuxième (semi-)déraillement

Ce n’est pas en prenant un pas de recul, mais plutôt en faisant demi-tour pour passer derrière la caméra que Ben Affleck sauvera sa carrière. Son premier long métrage Gone Baby Gone, une adaptation d’un roman de Dennis Lehane mettant en vedette son frère Casey, mettra quelque chose au clair : le jeu dramatique n’est pas son plus grand talent.

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Les thrillers The Town et Argo dans lesquels il cumule les rôles d’acteur et de réalisateur viendront cimenter ce changement de paradigme aussi rapide qu’impressionnant. Argo remportera trois statuettes aux Academy Awards dont meilleur film et meilleur réalisateur, mais aucune pour le jeu d’Affleck. À l’époque marié avec l’actrice Jennifer Garner, Affleck semble mieux entouré et surtout mieux conseillé quant à sa carrière. Au fil des années, son nom redevient cool dans les couloirs des studios d’Hollywood. Il décroche d’ailleurs le rôle principal dans l’adaptation du très populaire roman Gone Girl, de Gillian Flynn. Encore une fois, Big Ben monte au sommet de la culture populaire…

Alors que les problèmes semblent s’estomper dans sa vie, Affleck se remet à prendre des décisions louches.

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Mais pas pour longtemps. Alors que les problèmes semblent s’estomper dans sa vie, Affleck se remet à prendre des décisions louches et à accepter des rôles qui allaient le mettre sous le microscope des observateurs les plus acerbes dont notoirement le rôle de Batman dans une série de navets de Zack Snyder. Il divorcera aussi de Jennifer Garner, d’avec qui il était séparé depuis 2015… quelques mois avant sa deuxième dégringolade. Il aura aussi été nommé deux fois dans le cadre des dénonciations #metoo, accusations pour lesquelles il a immédiatement pris responsabilité et présenté ses excuses.

Le gars du coin qui travaille fort

Pourtant, nous y voilà. Affleck vient de terminer son premier long métrage depuis 2016 : une mise en fiction de l’histoire de Phil Knight et Sonny Vaccaro, les fondateurs de Nike, où Ben Affleck incarne l’un des rôles principaux en compagnie de son ami de longue date Matt Damon. Il travaille d’ailleurs aussi sur une adaptation d’un roman d’Agatha Christie et un scénario original. Il vient tout récemment de se marier avec l’autre Jennifer dans sa vie, elle aussi maintenant cinquantenaire. Bref, ça va bien, ses affaires.

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C’est quoi, son secret? Comment fait-il pour ne pas laisser la vie lui passer drette sur le corps? Pour mieux comprendre le personnage, il faut tout d’abord savoir que la vie de Ben Affleck est très imparfaite depuis bien avant la célébrité. Né dans une famille ravagée par les problèmes de dépendance et de santé mentale, Affleck a perdu sa grand-mère et son oncle par suicide à un très jeune âge. Lui-même aux prises avec des problèmes de dépression, il est médicamenté depuis l’âge de 26 ans et dans le programme des alcooliques anonymes (chose qu’il a avouée en entrevue en 2020).

Affleck est un très talentueux scénariste et réalisateur, mais son plus grand talent, c’est peut-être sa capacité à se relever lorsqu’il prend des coups.

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Cest peut-être drôle à dire, mais Ben Affleck a l’habitude de sentir le sol se dérober sous ses pieds. Ça lui est arrivé périodiquement au courant de sa vie. Parfois par sa propre faute, mais souvent non. Affleck est un très talentueux scénariste et réalisateur, mais son plus grand talent, c’est peut-être sa capacité à se relever lorsqu’il prend des coups. C’est pour ça qu’il est si difficile à ne pas aimer. C’est le gars du coin qui travaille fort et qui gère le succès et l’échec au meilleur de ses connaissances.

Bon 50e, Ben Affleck! Je te souhaite une deuxième moitié de vie plus stable que la première!

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