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Le retour de « The White Lotus » : mystère et beaux malaises

On ne sait pas encore exactement ce qui se passe, sauf le fait qu’il y aura plusieurs morts.

Par
Benoît Lelièvre
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Les suites sont rarement une bonne idée. Symptômes de notre incapacité à dire au revoir ou simplement à apprécier une histoire bien ficelée pour ce qu’elle est, elles rouvrent trop souvent des chefs-d’œuvre pour en faire des histoires juste correctes. Médiocres, si elles durent trop longtemps. Elles existent pour répondre à la demande populaire et non par rigueur artistique.

Bien sûr, cette règle comporte son lot d’exceptions.

L’immortelle Breaking Bad était réfléchie et écrite à la base sur un arc narratif de cinq saisons. Le Seigneur des Anneaux, la trilogie originale, pas la série Amazon, avait été conceptualisée avant même d’être écrite. Une autre curieuse potentielle exception qui sort du lot est la série The White Lotus, du créateur Mike White (qui a prêté sa plume à des classiques comme Nacho Libre, School of Rock et même Dawson’s Creek), à la base une minisérie de six épisodes qui amorçait son improbable deuxième saison hier soir, sur HBO.

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Comment peut-on écrire une suite à une histoire qui finit sans équivoque comme The White Lotus? Le grand retour de la série a levé le voile, ne serait-ce que partiellement, sur cet art occulte.

Forza Italia 🤌

Dès le départ, Mike White met une chose au clair : The White Lotus sera une série d’anthologie qui suivra différents personnages chaque saison. Le concept permet de ramener et d’oublier qui on veut sans qu’il y ait d’incidence sur l’histoire. Une série d’anthologie permettra aussi à White de clore la plupart de ses arcs narratifs et créer des personnages plus dynamiques, qui lui appartiennent à 100%.

Cette saison, on suivra les mésaventures d’un tout-inclus White Lotus en Sicile. Parmi les invités, on y compte :

– Le couple-d’amis-qui-n’est-pas-vraiment-un-couple-d’amis, mais plutôt le cadavre d’une amitié d’université que deux personnages trimballent comme s’il était encore en vie parce que l’un d’entre eux a fait fortune.

– La sempiternelle famille italienne gossante qui ne parle pas italien, mais qui cherche à tout prix à se « reconnecter à ses racines » . La distribution est immense. F. Murray Abraham (Scarface, Homeland, The Grand Budapest Hotel) dans le rôle du grand-père libidineux et le grandiose Michael Imperioli, qui jouait Christopher Moltisanti dans The Sopranos.

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– Mon personnage préféré de la première saison Tanya McQuoid, la femme qui (sur papier) a tout pour elle, mais sur qui le destin semble cruellement s’acharner, est de retour.

Un tout-inclus, c’est une réalité suspendue pour laquelle on paye plusieurs milliers de dollars dans le but de n’avoir absolument rien d’autre à faire qu’exister. Ce vide logistique et existentiel dans la vie des clients est la plupart du temps révélateur, parce qu’il les engage dans une relation de pouvoir avec tous les gens autour d’eux. Le personnel payé pour les servir et obéir à leurs moindres désirs et même les autres clients. Les gens qui paient pour une semaine au White Lotus s’attendent à passer un moment sans aucune friction et la moindre anicroche dans leur vie devient une montagne.

Encore une fois, Mike White saisit cette dynamique avec brio et s’affaire durant le premier épisode à cartographier un monde en vase clos où tout le monde marche sur des œufs malgré le tourment intérieur qui les dévore visiblement. On ne sait pas encore exactement ce qui se passe, sauf le fait qu’il y aura plusieurs morts pendant la semaine. On ne s’attendait pas à moins!

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Les mystères de l’âme

Une des assises majeures de The White Lotus, ce sont les problèmes dont les personnages sont venus se sauver. Ils créent une bonne partie du mystère de cette réalité suspendue, parce qu’on découvre au même rythme que les autres clients à quel genre de personne on a affaire. Les gens mentent tout le temps à propos de qui ils sont. À eux-mêmes, mais surtout aux étrangers autour de qui ils ne portent pas le poids de leurs erreurs.

Une des assises majeures de The White Lotus, ce sont les problèmes dont les personnages sont venus se sauver.

Le mystère le plus prometteur à mon avis est celui de Dom Di Grasso (Imperioli) en apparence la personne la plus rationnelle sur le tout-inclus qui se fait, pardonnez mon vieux français, PÉTER UNE JÉSUS-CHRIST DE COCHE au téléphone par une personne qu’on croit être sa femme. À la fin de l’épisode, Dom utilise les services d’une jeune travailleuse du sexe italienne, soulignant plus fermement les problèmes sexuels inhérents de la famille Di Grasso plus tôt illustrés par son père. Il y a plusieurs couches à ce personnage et je ne les comprends pas toutes encore.

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Tanya est toujours aussi magnétique, cette nouvelle saison. Pathologiquement elle-même, elle essaie de s’accrocher à ce qui la fait sentir en vie sans même essayer de comprendre qui elle est ou ce dont elle a besoin. Personnage tragi-comique à la base, elle a beau agir comme un extra-terrestre une fois sur deux, c’est difficile de ne pas ressentir de la tendresse pour quelqu’un qui souffre aussi intensément et visiblement.

Ce n’est que le début pour la nouvelle saison de The White Lotus, mais l’avenir semble encore une fois ensoleillé pour les mystères et beaux malaises des bien nantis. Novembre s’annonce chaud et inconfortable! Les nouveaux épisodes seront disponibles en direct sur Crave chaque dimanche à 21h.