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Le PAKISTANIMAL TOUR de Philippe Brach – Acte 1

Fuir la neige pour le sable

Par
Philippe Brach
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Je me suis ramassé au Pakistan. J’suis parti juste deux mois. C’est bien peu pour comprendre pis exposer toute la complexité du pays, spécialement quand tu te sens à des années-lumière de ce buzz-là.

Y’a plein de choses dont j’aurais pu parler qui sont tellement chargées et complexes, comme les droits des femmes dans ce pays, la persécution de tout type de minorités, leur rapport trouble envers l’environnement, les paysages incroyables ou encore la fois où on s’est fait suivre par les Services secrets, mais je ne serais définitivement pas le mieux placé pour en parler (d’ailleurs, le journaliste Jasmin Lavoie est en train d’écrire un sale livre là-dessus).

J’voulais pas faire un ouvrage de référence ni un Lonely Planet des pauvres. Y’a pas nécessairement de raisons de publier ça, si ce n’est ce que par peur d’oublier. Ça va aussi m’éviter ce bon vieux classique du «Pis, c’tait comment ton voyage?»

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Pas compliqué: Grosse grosse année de tournée qui venait de se finir, j’voulais partir deux mois quelque part où ni ma famille, ni mes amis, ni ma compagnie de disque ne seraient capables de me joindre.

Au moment de partir, ça faisait 12 attentats en 9 jours qui pétaient là-bas.

Ça tombe ben, un collègue du secondaire, Jasmin Lavoie (alias Le Daim), est correspondant pour France 24 au Pakistan. Son contrat dure un an. C’est là où jamais. Trois, quatre bats plus tard, y’a le photographe Marc-Étienne Mongrain aka Le Petit Russe qui se crinque à venir un mois. Bing bang on achète nos billets d’avion, ben excité.

Dans la semaine qui suit, y’a un communiqué de presse de la part des talibans qui affirment vouloir mener une série d’attentats partout au Pakistan dans les mois à venir. Résultat; au moment de partir, ça faisait 12 attentats en 9 jours qui pétaient là-bas. Ça change le mood en esti comme dirait mon chum Jo Big.
Dans la semaine qui suit, y’a un communiqué de presse de la part des talibans qui affirment vouloir mener une série d’attentats partout au Pakistan dans les mois à venir. Résultat; au moment de partir, ça faisait 12 attentats en 9 jours qui pétaient là-bas. Ça change le mood en esti comme dirait mon chum Jo Big.
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Malgré tout, on n’est pas envahi par la peur, parce que rassuré par Jasmin, mais y’a quand même de l’excitation de plus qui se fait sentir. Ça va être un trip de tourisme plus ou moins défriché.

«Si vous saviez ce que je fais à Montréal, vous devriez plus vous inquiéter quand je suis près de vous.»

La vraie gestion d’avant-départ, elle se fait au niveau de mes parents. Ayant quatre enfants qui ont voyagé en masse, y’en ont vu d’autres comme on dit, mais celle-là ils ne l’avaient jamais vu. J’essaie d’atténuer tout ça avec eux, qui se renseignent principalement chez TVA. Bonne nouvelle, la chaîne n’a mentionné qu’un seul attentat. Pour une fois que leur couverture internationale me convient amplement. J’suis pas parti qu’ils ont déjà hâte que je revienne. «Si vous saviez ce que je fais à Montréal, vous devriez plus vous inquiéter quand je suis près de vous.»

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En terrain semi-connu

Entre Mad Max pis Jackie (deux biopics) dans l’avion, je réalise que concrètement je ne connais à peu près rien du Pakistan, mis à part que c’est toute là qu’ils sont les terroristes dans la série Homeland pis que y’a du monde qui s’habille funky dans ce coin-là. J’vais me garder la surprise pour l’arrivée que je me dis.

*Bruit d’atterrissage d’avion*

On arrive là-bas, vite de même le dépaysement se tolère, ça ressemble un peu à la Turquie, que j’avais visitée en 2009. Y’a des prières cinq fois par jour, le monde ont l’air chummy pis y fait chaud. On arrive au bureau de France 24 (une maison en fait) pour voir mon bon chum Jasmin.

Je considère le Pakistan comme un pays un peu slaque.

On se fait aussi accueillir par Shahzaib et Taha, ses deux collègues journalistes pakistanais. Ils sont remplis de contacts de toute sorte, presque autant que Lapointe en avait pour de la poudre à l’époque d’Inviter les vautours. Ils connaissent tout le monde, les horaires de tout, les façons les plus efficaces de faire quoi que ce soit, etc.

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C’est d’ailleurs Taha qui, à mon arrivée, va me résumer le mieux le Pakistan en une phrase; «T’es au Pakistan, man. La sécurité est toujours une source de préoccupation, mais tu peux tuer et t’en tirer en toute impunité, ici.»

God is the limit

Je considère le Pakistan comme un pays un peu slaque. Autant on y fait preuve de rigidité en ce qui a trait aux protocoles militaires et religieux, autant on ne suit pas le peu de lois en matière de régie du bâtiment, de sécurité au travail, de sécurité routière ou encore de normes environnementales. En d’autres mots, tu peux pas mal faire n’importe quoi, en autant que tu ne fasses pas chier Dieu, l’Armée ou le Gouvernement.

Ici, ça fait souvent le saut quand on voit des «goras» (blancs\occidentaux) parce que y’en n’a pas beaucoup. Y’a aussi des places un peu plus conservatrices où la présence de goras est peu recommandée. Comme la fois où on s’est fait demander par la police de quitter un village reculé en plein repas, on sait pas trop pourquoi, mais on dirait que c’tait pas safe pour deux goras d’être là.

Passer inaperçu quand t’es un “gora” blond aux yeux bleus, c’est un défi. Cette fois-là, c’était un échec.
Passer inaperçu quand t’es un “gora” blond aux yeux bleus, c’est un défi. Cette fois-là, c’était un échec.

Tu peux travailler deux ans à Islamabad sans jamais vraiment voir le Pakistan. Drôle de feeling.

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On s’est promené vraiment à plusieurs endroits un peu partout dans le pays, pis on n’a jamais réellement croisé de touristes en dehors de la capitale.

Même à Islamabad, la plupart des Occidentaux sont des diplomates qui travaillent là, enfermés dans l’enclave diplomatique où sont la plupart des ambassades. En plus, avec tout le brassage de marde, ils sont régulièrement en «lockdown» ce qui fait qu’ils ne peuvent pas trop sortir ou du moins limiter leurs déplacements en termes de temps et de distance en dehors de l’enclave. Au bout de tout ça, tu peux travailler deux ans à Islamabad sans jamais vraiment voir le Pakistan. Drôle de feeling.

Dur dur d’être un touriste

Bref, si ce n’était pas de nos amis journalistes pluggés, on n’aurait probablement jamais pu se promener à travers tout le pays comme on a fait, parce qu’il faut le dire, ce n’est pas le pays le plus tourist-friendly; beaucoup d’hôtels refusent d’offrir des chambres aux étrangers à cause des enlèvements ou juste pour ne pas avoir de troubles avec les Services secrets.

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Y’a aussi beaucoup d’endroits où t’as besoin d’un certificat spécial qui est long à obtenir pour rentrer dans la région. Malgré tout, on réussit à se taper un trip où on rencontre des princes, des pauvres, des montagnes, des déserts, du hash, des fusils, etc. Un merveilleux melting pot qui m’a fait réaliser que les Pakistanais ne sont pas piqués des vers.

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Dans l’acte 2 du Pakistanimal tour qui sera publié la semaine prochaine, je me rapproche d’un peuple incroyablement hospitalier. Moi qui croyais qu’on était les seuls avec notre caribou pis nos pâtés de viande.

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BONUS
– Fait étrange numéro 1 à propos du Pakistan –

Chaque matin dans le journal, y’a une carte de la ville avec des p’tits chiffres reliés à tous les crimes et méfaits qu’il y a eu dans la journée d’avant. Un genre de «best places to kill or steal», où on nomme tout le monde dans un visuel assez gentil. Hier, dans mon quartier, y’a eu deux meurtres pis un chèque qui a rebondi à la banque. On parle d’un chèque d’environ 2000$, parce que Asid Afaiq avait mal checké ses affaires.

Pour en découvrir plus sur l’artiste, découvrez notre entrevue: «Déjeuner sur l’herbe avec Philippe Brach».

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