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La Saint-Valentin sur Facebook

Par
Jordan Dupuis
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Samedi 15 février. On va se le dire, on est vraiment heureux d’avoir survécu collectivement à la Saint-Valentin, Valentinus de son latin, fête à deux balles pour une multitude de raisons que je n’énumérerai pas aujourd’hui. Aujourd’hui, j’ai eu envie de faire un debriefing post-Valentinus sur Facebook et d’essayer de regrouper les amoureux de l’amour en six catégories.

Les voici donc.

1- Le généraliste.

Jusqu’ici le moins dérangeant. Il passe semi-inaperçu dans votre fil d’actualité car il se veut un message plein d’espoir du type:

« Bonne Saint-Valentin à tous ! Vive l’amour ! »

L’instigateur du message te gosse un brin, mais tu ne peux pas le détester pour autant car telle une gamine qui vend du chocolat pour son club de patinage artistique, il est plein de bonnes intentions. Parfois l’auteur généraliste publie aussi simplement un poème cheap ou une pensée sur l’amour provenant d’un site douteux.

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2- Le Mea-Culpa.
Celui-ci se veut plus intéressant car subtilement, l’auteur de la publication nous révèle qu’il traite le monde comme de la marde un peu tous les jours, mais que aujourd’hui, dans un message public, il nous confie qu’il se sent coupable. Celui-ci passe le commentaire de la façon suivante :

« L’amour ce n’est pas juste le 14 février mais bien tous les jours. Ne prenez pas les gens pour acquis et dites-leur que vous les aimez…Je t’aime Julie. »

Tel le miroir du jeu de TIVIYA Le cercle, il nous renvoie à notre propre médiocrité.

3- Le dépendant affectif.
Passionné, plein de fougue et avec beaucoup trop d’émoticônes et/ou combiné à une ponctuation excessive, ce message est destiné à la douce-moitié de l’auteur et vise, dans un fiel baudelairien, à démontrer inconsciemment l’ampleur de notre dépendance affective. La forme varie, mais peut ressembler à :

« T’es celle que j’ai toujours attendu pis quand tu me regardes le matin en buvant ton café je me dis: Dude, comment t’as pu vivre sans elle avant ? Aujourd’hui c’est la Saint-Valentin et je veux te dire à quel point tu es essentielle à ma vie. Je t’m bb d’amour. »

Le message se termine souvent avec une twist plus 2014 de type :

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#me+you=forever , #loveofmylife , #monbébépourlavie

En général, suivant la lecture de ce message, un immense roulement de yeux s’empare de nous et nous pousse à cliquer sur le bouton « ne plus afficher dans le fil d’actualité ».

4- Le ou la célibataire qui veut montrer qu’il ou qu’elle s’en torche.
Vous comprendrez que je me situe dans cette catégorie. Par une surabondance de posts du type : « Verre de vin, feu de foyer, roman et chalet = je suis si bien. »
Ou bien en partageant des trucs sur son mur n’ayant absolument rien à voir avec l’amour, l’auteur célibataire veut démontrer à tous à quel point la Saint-Valentin est à des années lumières de lui effleurer l’esprit. (Ce qui est faux).

Souvent les publications sur le mur de ces Saint-Valentin haters ressemblent à :

-Un mix session de soundcloud d’un dj électro qui sonne zéro lover.
-Un article sur le conflit Israélo-Palestinien.
-Un photo reportage du National Geographic sur les mygales du Kenya
-Un vidéo best-of de Jack-Ass
-Un documentaire du Vice Magazine sur la scène punk scandinave.

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Pour les auteurs de ce type de messages, ces publications semblent anodines et assez cool, mais pour les gens qui les lisent le message est clair : La personne s’ennuie tu-seul chez elle et essaie de nous bourrer le mou qu’elle se fout de la Saint-Valentin en nous partageant n’importe quoi aux deux frames.

Voici donc, en toute humilité, une des mes publications Facebook du 14 février. (Avec le recul, j’ai honte en taaaaaa…)

5- Les chums de filles qui se font un girls-night-out pour ne pas sombrer seules avec un sac de chips et un pepsi régulier.

Le titre de cette catégorie est assez clair. Ce sont ces filles célibataires depuis un bout qui se savent intérieurement fragiles le soir de la Saint-Valentin mais qui s’en font à croire en se bookant un souper au resto avec leur 4 chums de filles, chacune avec un toupet et comprenant : 1 blonde platine, 1 noire, 1 brune chocolat et 1 fausse rousse. Parfois le ratio varie à : 2 platines, 1 fausse rousse et une brune. Elles se font un régal de faire un selfie avec leurs 8 bouteilles de vin à L’Académie de ville d’Anjou. Elles ont prévues sortir dans un club après car c’est vendredi et qu’on se le dise :

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« On n’a pas besoin de gars pour se faire du fun! »

Yeah right. Aussitôt rendues dans leur Hyundai Accent blanche, à demi-saoules et en tombant sur une toune d’Isabelle Boulay sur Rythme FM (genre celle du saule inconsolable), elles éclatent secrètement en sanglots. Le post Facebook repose essentiellement sur le selfie en question et une mention : « With my guuurlz ! »

Elles sont toutes évidemment taguées dans la photo.

6- L’épicurien.
Celui-ci, aussi anodin qu’il peut sembler être, me tape royalement sur les nerfs. Il se décline en plusieurs versions :

– « Bordeaux 98 avec mon amoureuse »
– Une photo d’un gâteau fait maison en forme de cœur, upgradé sur Instragram avec la mention #formylover
– « Sushis du Tri Express, bulles, spa = je t’aime bibi »
– Une photo prise de haut d’un cassoulet qui mijote sur le poêle avec la mention : « J’ai hâte que tu arrives. »

Bref, ils sont amoureux, ils cuisinent avec des produits chers, ils aiment nous le flasher et nous rappellent que, seul avec notre pizza Dr Oetker et notre Pabst, bin on attend personne pis ça sent pas le cassoulet qui mijote dans le logis.

Je crois avoir fait le tour de cette belle variété de messages d’amour qui ont quasi fait exploser mon fil d’actualité vendredi, jour de la Saint-Valentin, fête des amoureux. Je vous entends au loin, dans un vague écho me dire :
« Mais Jordan… l’amour c’est beau …. »
Et ce à quoi je réponds : « Oui, mais pas sur mon Facebook. »

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Sur ce, je dois vous laisser, j’ai mon restant d’amertume et de jalousie du 14 février qui mijote sur le rond du poêle…

J.