Le grand top 10 des plus regrettables « hits de l’été »

C’est l’été!

Officiellement, j’veux dire. Même si on est aux prises avec des vagues de chaleur et d’inquiétants feux de forêt depuis quelques semaines déjà. La saison estivale, c’est synonyme de soleil, d’odeurs de viande qui cuit sur le grill, de jeux d’alcool sur le gazon et de DJs qui vous cassent les oreilles avec « le hit de l’étheeeeey ».

C’est quoi au juste un « hit de l’été »? C’est pas clair et la définition change avec les marchés et les époques. Au départ la chanson la plus populaire à la radio pendant la période estivale, c’est devenu celle la plus vendue pendant les belles années iTunes, puis celle la plus jouée sur Spotify.

Bref, il y a autant de hits de l’été que de plateformes qui en diffusent. Donc si une toune a été populaire entre mai et septembre, un fatiguant va obligatoirement la qualifier de « HIT DEUH L’ETEUUUH » sur un poste de radio, quelque part dans la province.

Sans plus tarder, je vous invite à retourner dans ce monde sans foi ni loi afin de retrouver les chansons les plus regrettablement affublées de ce titre de noblesse. C’est pas parce qu’une chanson est légère et dansable qu’elle résiste nécessairement à l’épreuve du temps, bien au contraire. Alors allez vous chercher des cache-oreilles, parce que ça va faire mal.

https://www.youtube.com/watch?v=1z0e6HzZEbw

Fort du succès de leur reprise de Laisse-moi t’aimer et de l’inexplicable vague d’amour pour Jean-Marc Parent qui balayait le Québec à l’époque de L’Heure JMP, le Mercedes Band a essayé de nous passer une composition originale comme premier extrait de son deuxième album, comme si de rien était. Le résultat final ressemblait tellement à Laisse-moi t’aimer que la plupart des gens n’ont jamais fait la différence entre les deux.

Personne ne se rappelle de l’existence de Reste auprès de moi. Personne ne se rappelle de Vide ton sac, non plus. À part moi, peut-être.

Voulez-vous bien me dire ce qu’on trouvait à cet assemblage de percussions électroniques crues et sans âme ainsi qu’à la performance lubrique du petit frère rebelle de Ron Weasley? C’était l’été de Despacito (un vrai de vrai hit estival) et y’a des gens qui ont trouvé le moyen de triper sur la fausse toune latino interprétée par un britannique roux. Le pire, c’est que ça fait même pas dix ans. On faisait dur.

Après avoir été la saveur du mois sur la scène hip-hop de Detroit au début des années 1990 et connu un succès monstre en empruntant un riff de guitare à Metallica, Kid Rock a vécu la mort lente et douloureuse du nü metal, mais s’est quand même levé un matin en se disant : « J’aimerais ça, avoir mon Sweet Home Alabama ». Donc il a non seulement « emprunté » un autre riff de guitare, mais il a aussi namedroppé son inspiration sans vergogne dans le refrain et fait rimer avec encore moins de vergogne le mot « things » avec le mot « things ».

C’est comme écouter Sweet Home Alabama, mais dans un cauchemar.

Je me rappellerai toujours de l’expression horrifiée de ma conjointe, la première fois qu’on a entendu Nous Autres à la radio pendant un trajet Montréal-Bas-du-Fleuve. Au diable Beau Dommage, Daniel Bélanger, Dédé Fortin et notre héritage poétique au grand complet; ce qui compte, à présent, c’est de mettre l’accent sur le fait que tu viens des régions, que t’es un bonne personne, pis que c’est donc important, l’amour.

Pour paraphraser le Doc Mailloux : j’ai eu mal à mon Québec quand j’ai entendu ça.

Vous l’aviez oubliée celle-là, hein? C’était quoi le but, d’ailleurs?

Eh bien, les membres de Las Ketchup sont les filles d’un certain Juan Muñoz, un guitariste de flamenco espagnol légendaire que l’on surnommait « La Tomate ». Fait que les filles ont décidé de se faire une passe de cash sur le dos de leur père en créant un groupe de pop ultra-gossant à thématique de produits dérivés de la tomate. C’était niaiseux en maudit, mais on y a tous cru le temps d’un été.

Le monde où Pitbull était considéré comme cool semble très lointain, aujourd’hui. Mr. Worldwide fait toujours danser les foules, mais c’est maintenant devenu un plaisir kitsch de se faire aller le bassin sur I Know You Want Me. C’est pas vraiment de sa faute. Le pauvre est intègre envers lui-même, mais reste qu’il est dans la business des plaisirs éphémères et superficiels. Pitbull, c’était une époque de choix regrettables.

Bon, celle-là ne compte pas vraiment parce qu’il s’agit d’un exercice promotionnel et non d’une vraie chanson écrite dans un dessein commercial. Elle se serait retrouvée numéro un, sinon. Voulez-vous bien me dire comment autant de personnes ultra-talentueuses ont pu se retrouver à participer à ce projet totalement dénué de charme et d’esprit? C’est le genre de chanson qu’on marmonne à soi-même assis sur la toilette.

Un gros merci au YouTubeur Samuel Cossette d’avoir documenté cet échec créatif historique.

Le pire détail à propos de ce projet aussi gossant que raciste et sexiste, c’est qu’il n’est même pas d’origine africaine. Le King Africa en question (un dénommé Alan Duffy) est un Argentin de descendance britannique. Sérieusement là, est-ce que quelqu’un a déjà aimé cette chanson? Avec ce concept, n’importe qui aurait pu faire mieux que cette série de cris d’hurluberlu sur un beat composé en MIDI sur Windows 98.

Si vous voulez un bon exemple prouvant à quel point le monde a changé pour le mieux depuis dix ans, imaginez-vous qu’en 2013, c’était parfaitement normal de sortir une toune où un homme raconte sa propre version du consentement. Oui, Blurred Lines donne peut-être le goût de danser, mais c’est parce qu’elle plagie une chanson de Marvin Gaye. Le producteur Pharrell Williams a d’ailleurs été obligé de payer 5 millions de dollars à la descendance du chanteur en 2016 à cause de cet « emprunt ».

Mes excuses aux fans des Black Eyed Peas, mais I Gotta Feeling devrait être en compétition pour la pire chanson de tous les temps. Mes impressions sont peut-être teintées par l’infâme lip dub de l’UQAM, mais Fergie, will.i.am pis l’autre gars dont tout le monde se fout ont vraiment révolutionné l’art de faire saigner des oreilles en moins de cinq minutes. Cette chanson ne fait techniquement que du sens sur un plancher de danse avec une MDMA dans le corps, mais on la connaît parce qu’elle joue encore à la radio et dans les annonces de Ford en 2023.