.jpg)
Le court métrage vu par Christine Beaulieu
Demain (ou tout à l’heure, selon le moment où vous lirez ces lignes), le Gala Prix Prends ça court! célèbrera pour une 16e fois les courts métrages québécois professionnels et indépendants. Les gagnants qui seront récompensés dans quelques heures ont été déterminés cette année par un jury entièrement féminin, un détail pas banal. D’ailleurs, URBANIA remettra une bourse ce soir-là et on est très excités, mais ne comptez pas sur nous pour dévoiler le court gagnant à l’avance, on ne va quand même pas voler de punch.
Bref, la comédienne et dramaturge Christine Beaulieu fait partie des 13 femmes qui ont délibéré sur les 63 courts métrages en lice. On lui a demandé si, lors d’une pause de tournage, elle accepterait de nous parler de son expérience comme jurée. Elle a accepté avec joie.
Le fait d’avoir un jury entièrement composé de femmes, qu’est-ce que ça a changé dans votre approche?
Je suis quelqu’un qui ne distingue pas vraiment les points de vue par rapport au genre. On était toutes sortes de femmes, de tous les âges qui avaient évolué dans des milieux complètement différents, donc on avait des points de vue et des regards divergents. Est-ce que des gars auraient eu d’autres regards? Oui. Par contre, j’ai vraiment pas le sentiment qu’autour de cette table-là il manquait d’opinions sur les films qu’on a regardés.
Je suis féministe, mais on a pas parlé de ça autour de la table de délibération. Toutes les filles y sont all ées de leur coup de coeur. Même les films qu’on pourrait associer à des goûts plus «masculins», comme les films plus violents, ont été défendus.
Ce qui m’a surtout frappé, c’est à quel point les films étaient bons. J’ai regardé 63 courts métrages, et il y en a vraiment pas beaucoup qui m’ont déplu. Dans chacun d’entre eux, je trouvais des aspects sensationnels. On fait tellement du bon cinéma au Québec, donc j’étais super heureuse d’être sur ce jury-là parce que ça m’a obligée à regarder plusieurs courts métrages. C’est une expérience vraiment enrichissante.
Le court métrage c’est un lieu où on peut essayer des affaires. […] Dans les films que j’ai vus, il y avait beaucoup d’audace et je crois qu’on a une relève assez éclatante.
Le court métrage c’est un lieu où on peut essayer des affaires. On peut y bousculer des idées préconçues, des codes, des modes, des règles établies. Dans les films que j’ai vus, il y avait beaucoup d’audace et je crois qu’on a une relève assez éclatante.
Qu’est-ce que le court apporte à l’univers cinématographique québécois?
C’est une étape importante pour une carrière de réalisateur. Dans tous les secteurs artistiques, il faut des lieux où on est plus en exploration, en essais et en erreurs. Une fois qu’on fait un long métrage, qu’on est subventionné, qu’on a un producteur, on a plein de regards externes. On est moins libre. On doit répondre à plein de demandes et de conditions.
Le court métrage te permet de faire un film comme tu veux, comme tu l’entends. C’est un lieu libre où un réalisateur peut montrer comment il veut aborder le cinéma.
Tu as joué dans plusieurs courts métrages. Comment ça a contribué à ton développement comme artiste?
Quand tu sors de l’école, avant d’avoir un rôle important dans un long métrage, tu fais plein de courts métrages, des kinos, et c’est là que tu rencontres ta génération.
Cette année, j’ai fait le premier long métrage de Sarah Fortin et je me souviens que la première fois que je l’ai rencontrée, c’était lors d’une audition pour son court métrage de fin d’études à l’UQAM. Elle m’avait choisie pour jouer dans son premier court en sortant de l’école.
Ces rencontres qu’on fait à 22 ans peuvent resurgir plusieurs années plus tard. Les premiers liens sont très forts. Quand tu le vis, tu ne t’en rends pas compte, tu t’amuses avec tes amis, mais c’est plus tard que tu réalises à quel point c’est déterminant dans ta vie.
Avec le court métrage, on rencontre les gens de notre âge qui font de la réalisation, les acteurs des autres écoles. Tu apprends à jouer pour la caméra, c’est vraiment un lieu d’apprentissages.
Avec le court métrage, on rencontre les gens de notre âge qui font de la réalisation, les acteurs des autres écoles. Tu apprends à jouer pour la caméra, c’est vraiment un lieu d’apprentissages. Comme actrice, c’est aussi moins épeurant. Tu n’as pas à répondre à plein de codes, tu n’as pas les critiques qui te scrutent pour écrire un article dans le journal. Tu es libéré de ça et tu peux essayer des affaires, te tromper. Et ça, c’est rare. On vit dans une société de performance et je pense que la génération en dessous de moi est encore plus atteinte à cause des réseaux sociaux. Tout est vu, tout est jugé.
Si on fait toujours des affaires safe, on n’évolue pas. Il faut essayer des choses complètement « champ gauche », et c’est important d’avoir un espace pour ça. Le court métrage, c’est ce à quoi ça sert, autant pour le réalisateur, les acteurs que l’équipe technique.
+++
Identifiez-vous! (c’est gratuit)
Soyez le premier à commenter!