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Le bras de Saint-François-Xavier est en tournée et on a rencontré l’organisatrice de son «world tour»

Pourquoi vénérer un bras?

Par
Pier-Luc Ouellet
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Quand on a été élevé, comme moi, avec les petits cahiers de catéchèse bleus avec un poisson dessus, ça peut être facile de regarder les rituels étonnants des autres religions, et d’oublier que la religion catholique a elle aussi son lot de pratiques qui peuvent paraître inusitées.
J’ai d’ailleurs été particulièrement surpris quand j’ai entendu parler d’une tournée organisée à travers le Canada pour aller vénérer la relique de Saint-François-Xavier, c’est-à-dire son avant-bras gardé dans une boîte en vitre.

C’est peut-être parce que j’ai laissé Dieu derrière moi en même temps que mes cahiers de catéchèse, mais j’ignorais complètement que les chrétiens allaient se recueillir devant des bouts de dépouilles.

J’ai donc contacté Debra Proulx, porte-parole pour la Catholic Christian Outreach, le groupe ayant organisé la tournée avec l’aide de l’archidiocèse d’Ottawa et des Jésuites du Canada, pour tenter de mieux comprendre le tout.

Pourquoi vénérer un bras?

Tout d’abord, je me suis demandé pourquoi prendre la peine de faire venir un bras de Rome, et qui exactement vient voir ça? Parce que oui, il y a des gens qui sont venus voir ce bras. Juste mercredi dernier à Québec on en a compté plus de 1000. Ça peut toujours ben pas être 1000 personnes qui voulaient faire une blague de high five?

Un peu comme quand tu te mets à te tenir un peu plus avec ton ami qui te jure qu’il connaît bien Jay Du Temple.

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En fait, c’est avant tout une façon de prier, une sorte de pèlerinage. Les reliques, qui peuvent être soit des corps complets, des bouts de corps ou encore des objets ayant touché au corps de saints (voici un bout de phrase que je suis moi-même étonné d’avoir écrit), sont des objets significatifs chez les chrétiens, parce qu’ils permettent de se rapprocher de Dieu par l’entremise d’un saint qui en était proche lui-même.

Un peu comme quand tu te mets à te tenir un peu plus avec ton ami qui te jure qu’il connaît bien Jay Du Temple.

Certains se rendent également à la relique en espérant recevoir des grâces. Par contre, encore là on tempère mes ardeurs, moi qui voudrait bien croire à Harry Potter : « On parle pas d’un objet magique. Il n’y a personne qui pense qu’il va aller [à la relique], qu’il va toucher la relique et qu’il va être miraculeusement guéri par de la magie. […] C’est un symbole de quelque chose qui est important et qui est sacré pour nous, donc on s’approche, on dispose le cœur à Dieu dans la prière ce qu’on voudrait obtenir. »

Peut-être que je peux prier pour une lettre de Poudlard?

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C’est qui Saint-François Xavier?

Mais qui était donc l’homme à qui appartenait le reste du corps? Saint-François-Xavier est un homme né au 16e siècle qui s’est converti au catholicisme pendant ses études universitaires en France, pour ensuite devenir un grand missionnaire. C’est pourquoi il est spécialement important pour le CCO, qui chapeaute la tournée, puisqu’il s’agit d’un organisme implanté sur les campus universitaires.

Ils espèrent donc que les étudiants vont se convertir à la foi chrétienne, plutôt qu’à Tinder et à la procrastination.

Mais comment on s’occupe d’un bras vieux de 500 ans?

J’avais plein de questions : comment fait-on venir un bras de Rome? Comment est-il conservé? Ça doit coûter un bras?

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Curieusement, c’est beaucoup plus simple qu’on pourrait croire : « Le bras est dans une chasse de vitre. Normalement, cette chasse de vitre est intégrée dans le maître autel de l’Église du Jésus à Rome. On prend la chasse de vitre et on sort avec. On l’amène dans une boîte de plexiglas scellée. Le sceau doit rester intact, pour montrer qu’on a rien modifié à la relique. »

Donc, si vous vouliez mettre un bracelet de l’amitié à la relique, malheureusement, ça ne sera pas possible.

« Ça va [ensuite] dans un sac de transport rigide, un peu rembourré. Et ensuite [la relique] est transportée avec nous pour la tournée. Quand on voyage en avion, elle n’est pas dans la soute à bagages, on a payé un siège pour qu’elle voyage avec nous dans l’avion parce que c’est précieux ». On ne précise toutefois pas si la relique préfère le hublot ou l’allée.

Si vous vouliez mettre un bracelet de l’amitié à la relique, malheureusement, ça ne sera pas possible.

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Et la question qui brûle toutes les lèvres : est-ce que le bras est en décomposition dans sa boîte? « En fait, quand ils ont enterré Saint-François-Xavier en Inde, ils voulaient que son corps se décompose. […] On aurait même mis de la chaux pour que le corps se décompose plus rapidement. Mais le corps ne s’est pas décomposé comme on le voulait. Il est encore préservé, et c’est pour ça au fait qu’on aurait retiré son avant-bras pour le ramener à Rome, parce qu’on ne pouvait pas prendre son corps en entier [vu qu’il ne s’était pas décomposé]. »

Et c’est ainsi que j’ai appris que mon chat Mitaine n’était pas un saint, parce que quand j’étais petit il s’est sauvé, et quand on l’a retrouvé un mois plus tard pris en dessous du balcon, ça sentait le chr… ça sentait mauvais.

Finalement, même si ça peut sembler inusité, cette pratique ne m’apparaît pas plus étrange qu’une autre. Il ne s’agit au fond que d’un bon prétexte pour le recueillement pour ceux qui ont la foi. Et comme le dit madame Proulx, est-ce que c’est vraiment plus bizarre que l’exposition Bodies?

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… Moi en tout cas ça me fait assez de morts pour aujourd’hui, merci beaucoup.

Si vous vous sentez interpellé par la tournée de cette relique, elle sera à Montréal à la fin du mois. Vous pouvez trouver toutes les informations ici.

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