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L’autre côté de la lentille

Ou comment Google repousse les limites de la vie privée encore plus loin...

Par
André Péloquin
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Comme je suis plutôt nul en combat ultime et, qu’à vous lire sur Twitter, le gala des Jutra était particulièrement atroce – mais pas assez pour changer de chaîne, voire fermer le téléviseur -, laissez-moi vous parler d’un sujet aussi captivant que d’actualité : les lunettes!

Projet annoncé depuis février 2012, Google Glass est le croisement entre un iPhone et des barniques. Ça devrait avoir l’air de ça…

Depuis l’annonce, détails et vidéos sont écoulés au compte-goutte. La semaine dernière, lors du volet interactif de SXSW, un développeur de Google a révélé que Glass permettrait aussi aux utilisateurs de consulter leurs courriels, notes, ainsi que l’actualité via des articles du New York Times, notamment. Bien que ces projets sont emballants, ce ne sont pas ceux qui retiennent malheureusement l’attention de la gent technophile…

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Le produit n’est pas encore sur les tablettes qu’il croule déjà sous d’innombrables critiques parfois exagérées – selon Gawker, Glass est carrément un accessoire pour trous du cul -, mais souvent justifiées (un café de Seattle a été jusqu’à bannir l’objet afin de protéger le jardin secret de sa clientèle). Bien qu’on aimerait croire que seulement de gros dégueulasses se serviront du machin pour envahir la vie privée des autres, le fait demeure qu’on – les consommateurs, dégueulasses ou pas, petits et gros – pourrait empiéter sur l’intimité de notre entourage; que ce soit dans le vestiaire de la piscine publique ou dans la ruelle tout près de la Boîte à Marius (je le sais, car j’habite tout près… je vous entends bien malgré moi, t’sais).Bien sûr, Glass ne représente en rien une révolution dans le domaine de l’invasion de la vie privée (moult gadgets à la James Bond en témoignent, d’ailleurs). Même qu’il y a 10 ans, on assistait à une levée de boucliers semblable lorsqu’on annonçait les premiers téléphones portables munis d’appareils photo. Et pourtant, une décennie plus tard, ces bébelles sont non seulement passés d’inventions de parias à objets de bon goût, mais elles sont utilisées à toutes les sauces.

Il n’y a pas si longtemps, Reddit comptait plusieurs (oui, plusieurs!) forums où des pervers s’échangeaient des clichés «sexys» – des creep shots pour reprendre le jargon – de jeunes filles pris à leur insu. Mais, de l’autre côté de la lentille, ces cossins servent également d’outils pour rapporter des « réalités » rarement explorées par les médias de masse (on n’a qu’à penser aux printemps Arabe et Érable).

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En attendant de voir comment les consommateurs réagiront à Glass et comment « le monde » s’ajustera au bidule (seront-ils autorisés en classe lors d’examens? Sur la route en conduisant? Sommes-nous prêts à avoir l’air de cyborgs à deux balles!?), j’aimerais vraiment m’interroger, voire m’inquiéter, sur notre relation à la technologie et la vie privée, mais trop de détails sont partagés sur Facebook alors que notre quotidien – aussi plate ou croustillant puisse-il être – se retrouve déjà étalé en 140 caractères.

Tout ça – et la promo luisante de Google ponctuée d’images mignonnes montées sur fond de musique indie pop entraînante, me laissent croire que beaucoup de gens – dégueulasses ou pas, petits et gros – se presseront aux magasins quand les lunettes Glass seront finalement mises en vente ou, du moins, sans se poser de questions sur les risques et les tabous entourant cette mini révolution (et, ça m’embarrasse de l’avouer, mais… je suis du nombre; ne serait-ce que pour tester le machin quelques minutes).

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