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L’art de constituer une bonne playlist

Deux expertes d’ICI MUSIQUE nous expliquent leurs façons de faire

Par
Ann Julie Larouche
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Une bonne playlist est un personnage secondaire important de nos vies : elle tisse des liens invisibles entre les gens et tricote des moments inoubliables – pour soi, et pour ceux qu’on aime. Dans ma hiérarchie des plaisirs, une bonne playlist se greffe à un excellent souper gratiné, à la lumière qui irradie ma cuisine, au confort de mon divan, ou à celui d’une conversation dans laquelle je m’installe avec ravissement.

Les bonnes chansons choisies pour les bons moments sont les plus douces surprises d’une vie. Petit guide pour s’armer de quelques munitions secrètes, afin que la soirée (ou le road trip) décolle. En majeure, ou en mineure!

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Que ce soit lors d’un brunch du dimanche matin, au moment où un ami monte dans ma voiture, quand je me prépare à souper, à sortir ou à recevoir une date à la maison, la même question m’enveloppe : je mets quoi, comme musique?

J’avais envie de discuter de cette angoisse récurrente avec Amélie Arel-Dubeau et Catherine Pogonat, les cœurs imaginatifs et les bouilles ambitieuses derrière l’émission L’effet Pogonat, qui entame sa septième année à ICI MUSIQUE. Sept années à créer des ambiances à la radio à titre de réalisatrice et d’animatrice, certes, mais aussi dans leur vie intime, à titre de blonde, d’amie, de mère, de belle-mère ou de DJ. Bricoler des environnements cotonneux grâce à leurs choix musicaux, c’est leur grand talent.

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Pour construire des listes de lecture adaptées au contexte où on les écoutera, ça prend une vaste connaissance musicale et une grande expertise, mais surtout, beaucoup d’écoute et d’intuition : « Il faut vraiment se fier à l’impact des chansons », raconte Catherine.

« Si ça danse, c’est un excellent signe. Si ça ne danse pas, pose-toi des questions. »

Et si on est dans une soirée où ça ne danse pas?

« Est-ce que les gens ont l’air d’apprécier? Est-ce que ça hoche de la tête? Les gens peuvent parfois avoir l’air irrité sans jamais le dire », explique Catherine.

Quand l’accord musique et amis fonctionne, la musique alimente les discussions, qui deviennent plus enlevantes. « Ça parle plus fort – c’est pas juste l’alcool qui fait ça, c’est la musique», poursuit-elle.

« La musique est aussi importante que les éléments d’ambiance qu’il y a sur ta table », renchérit Amélie. « Les chandelles, les fleurs, la musique : c’est un tout. »

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UNE BONNE PLAYLIST, C’EST UN BON ENCHAÎNEMENT

Je n’y aurais jamais pensé, mais leur façon de nourrir leur réflexion pour créer de bonnes playlists, c’est d’écouter des débuts et des fins des chansons. Tout le temps.

« Est-ce que tel début de chanson s’enchaîne avec telle fin d’une autre? Tout l’art est dans l’enchaînement », explique Catherine.

« Souvent, les tounes sont bonnes, mais l’enchaînement est incohérent et peut rendre une playlist terrible », poursuit-elle.

Quand on pense à l’art de l’enchaînement, on se demande : est-ce qu’une pièce très lo-fi d’un artiste indé va se mixer avec du Dua Lipa, qui est hyper produit, léché, sirupeux? « À côté, ta chanson artisanale, ça peut avoir l’air fou, mais si elle est bien intégrée dans ta playlist, ça peut être extraordinaire », raconte Catherine.

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MÉLANGER LES DÉCOUVERTES ET LES VALEURS SÛRES

On peut facilement l’oublier quand on commence à construire une liste de lecture, mais il faut viser un équilibre entre nouveautés et classiques. « On est beaucoup plus apte à découvrir quelque chose de nouveau si on a des repères », explique Catherine. « Les repères permettent d’avoir le cœur vraiment ouvert. »

Il y a aussi une grande part de mystère dans l’art de la playlist. « C’est tellement étonnant », poursuit Catherine. « Quand t’es DJ ou que tu reçois des amis à la maison, c’est toujours changeant : une chanson qui fonctionne un soir ne fonctionnera pas nécessairement un autre soir. » Il faut être à l’écoute et savoir s’adapter quand le son ne semble pas rendre les gens plus à l’aise ni les conversations plus souples.

Quand je cherche à proposer une ambiance musicale, je reconnais tous les éléments qui expliquent mon vertige : je dois faire preuve d’aplomb et d’une certaine dose de courage, et assumer les risques associés à mes prises de décisions. Vous êtes peut-être comme moi? Pour vous aider à avoir confiance dans ces moments où vous tentez de créer une ambiance, voici plusieurs pistes de réflexion, proposées à 100 % par Amélie et Catherine.

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ROAD TRIP

La route, c’est la liberté, le mouvement, l’aventure. Quand le choix musical fonctionne, on le sent tout de suite : notre pied est plus lourd. On visera des chansons qui font chanter, des affaires qui nous donnent envie de vivre intensément ou de la musique très solaire, très épique : Livin’ on a Prayer, de Bon Jovie, Dont Stop Believin’, du groupe Journey, ou une compilation du groupe The Beach Boys.

On peut aussi penser à Mac DeMarco, à Jean Leloup ou aux groupes Les Trois Accords, Bon Enfant et Malajube : tous vivent bien sur la route.

DATE À LA MAISON

Il faut qu’il y ait un petit côté sensuel, mais pas trop appuyé. Et ça n’a pas besoin de parler d’amour directement. Une excellente chanson de date à garder dans sa manche : I Follow Rivers, de Lykke Li. Elle parle d’amour, mais c’est une question d’ambiance, d’atmosphère, plus que de mots.

« Si tu ne connais pas les goûts musicaux de ta date, Serge Gainsbourg marche tout le temps », me confie Catherine.

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« C’est assez passe-partout, ça traverse bien les époques et c’est habituellement très sensuel. »

« Les Louanges pour une date, ou même du Philippe B pour impressionner, c’est parfait », selon Amélie.

« Les Louanges, Jimmy Hunt, Patrick Watson, Claudia Bouvette… ça fonctionne très bien », enchaîne Catherine.

D’autres suggestions : Leon Bridges, parce que c’est assez intemporel, avec un son des années 60, tout comme Chet Faker.

SOIRÉE ENTRE AMIS ET EN FAMILLE

« Il faut éviter les excès », conseille d’abord Catherine, avant d’ajouter : « à moins que tout le monde tripe sur le métal – si c’est le cas, vas-y! »

À garder en tête avant de choisir une chanson : si le texte est hyper présent, ça peut déconcentrer et rendre les conversations moins riches.

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« Je remarque que le rap – et dans ma playlist à moi, y’a beaucoup de morceaux rap –, c’est moins rassembleur. Dans le rap, y’a énormément de mots! »

De bons choix francos, selon les filles? L’impératrice, Kaytranada et de la pop tropicale comme Polo & Pan.

Amélie fait jouer beaucoup le funk dans ses soupers. « C’est pas quétaine et tu peux y aller dans n’importe quelle époque. Pour avoir le vin joyeux, il faut de quoi de joyeux », soutient-elle, en me recommandant le dernier album du groupe Jungle pour mon prochain souper : « Ça s’écoute à merveille, d’un bout à l’autre. »

Pas encore certain de vos choix? Le jazz reste la seule carte, selon les filles, pour une soirée indémodable et intemporelle.

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Ce n’est pas un hasard si Catherine et Amélie arrivent à renouveler leur son tout en conservant leur auditoire. C’est le fruit d’une grande curiosité et d’une passion des mots et des couleurs sonores vernies d’années d’expérience. Si on souhaite se laisser guider par leurs sélections de chansons, d’ambiances et de découvertes, on peut écouter L’effet Pogonat tous les jours en semaine à 9 h sur ICI MUSIQUE à la radio ou sur l’appli Radio-Canada OHdio, ainsi que toutes les émissions de leurs collègues passionnés de musique.