Cette semaine à Langue Sale, on met du respect sur le nom de deux vétérans du rap jeu, et on se pose des questions très claires sur les choix de vie d’un street rapper de la métropole, le tout grâce à leurs paroles.
BUELLER FEAT. KNLO & CARO DUPONT – « LANUITLEJOUR »
« On est jardiniers, ouvriers, ouvrières, parents, bricoleux, coiffeuses, choppeux d’métal
Pas une job dans l’système ça c’est dans l’pire des cas
J’jette des visions dans l’cosmos, pis regarde le tableau j’build up
On s’la prend relax au point qu’y’a pu de place dans nos agendas »
Mesdames et messieurs, voici la maturité sous forme lyricale. KNLO a toujours été, à mon avis, l’artiste le plus complet du rapquéb. Alors que la majorité de la scène est occupée à parler de weed, de rechercher l’immortalité ou de s’auto-snitch, KNLO utilise sur cette chanson du dernier BUeLLER sa vision d’ensemble pour te breakdown le fait qu’il y a pas de sous-métiers – il te l’avait même déjà dit dans Monet de Eman x Vlooper – tant que c’est du travail honnête. Pis que, même si y fallait que tu tombes dans l’street, bah, ça peut arriver, mais c’est vraiment le pire. Sinon, il énumère peut-être tous ses métiers, alors chapeau.
Sur un beat qui sample la série Bojack Horseman – gros knowledge, en passant – le papa/mononc’/rappeur/beatfaiseur/humain t’explique sa vision de la life. En gros, il faut se mettre en mode Bob Ross et pitcher des affaires dans le ciel, question de comprendre un peu mieux la vie. Pis la vie, au final, c’est de prendre ça vraiment relax. Genre, vraiment, vraiment relax. Presqu’aussi relax que l’Unique Chartrand qui dévoile à sa blonde qu’elle sort avec un player. Sérieux, au final, il a fucking raison, KNLO. Alors start ta cassette de Bob Ross, dessine une montagne ou deux, des petits nuages, une forêt, pis après un bout tu vas commencer à voir les gars du Alaclair High construire une cabane pour cultiver les plantes du Bas, tout ça en pitchant des visions dans l’cosmos. “Tu pensais que stais ça que stais mais…”
SOUBILLZ FEAT. BILO DA KID – « BLOW »
« First I put my hood on my back, then I put my city on my back
Fast forward ten years later, I still got the city on my back »
« First I put my hood on my back, then I put my city on my back
Fast forward ten years later, I still got the city on my back »
Des fois, on a pas besoin de dire grand-chose, pour dire quelque chose de gros. Je vais pas vous cacher que Bilo da Kid, c’est ma plus grande déception à vie dans le rap montréalais. Quand je l’ai découvert y’a plus d’une décennie, c’était le premier rappeur anglo qui était clairement francophone qui pouvait hold it down dans la langue de Shakespeare (pis de Kenny Powers). Il sortait plein de bangers, notamment la chanson City On My Back, un remix du track Born N Raised de DJ Khaled. Il était vraiment en train d’accoter ce qui se faisait aux States, avec moins de retard que ce qu’on avait pu voir dans le passé. Ensuite, le street life l’a rattrapée pis il est rentré en dedans. Pas chez lui là, mais bien dans l’pen.
Ce qui nous amène au track en question. Heureusement depuis sa sortie de prison, Bilo semble avoir retrouvé tout son focus et il pop up un peu partout sans avertissement, comme un Yes Mccan du street. C’est inspirant de voir un gars qui soutient la jeunesse, et si Soubillz a encore des preuves à faire, il a clairement le soutien des vétérans du street rap jeu. By the way, j’aimerais d’ailleurs voir Soubillz faire un feat avec un gars comme FouKi ; je vois des similitudes dans leurs styles, et c’est important de connecter les différentes scènes du rap montréalais. Ici, Bilo nous prouve que dix ans plus tard, il peut encore porter la ville sur son dos tel Atlas (ou le livreur de la pizzeria Atlas).
Tout ça pour dire que Bilo est back, et que la scène ne peut que mieux s’en porter. Si seulement les médias mainstream portaient un peu plus attention. Allez, à bon entendeur.
COROPS – « TÉQUILA »
« Elle est trop attirante, impossible de l’ignorer
Pour elle j’serais prêt à tout, même avoir la gonorrhée
Même si elle a le cancer j’pense que je serais honoré »
Honnêtement, c’est rare que je sois sans mots dans la vie. Les gens qui me connaissent vous le diront, j’ai TOUJOURS quelque chose à dire. Sauf que là… là… ayoye, man. Je sais plus. J’ai entendu des histoires de dépendance affective, de comportements irrationnels causés par de jolies femmes, de gars un peu désespérés qui se laissent tenter par des plans sombres comme la carrière de Mic Life, mais là, je sais vraiment plus.
Faut comprendre le contexte. On écoute une petite chanson aux airs caribéens, un vibe pas super original mais plutôt efficace ces temps-çi #ToutesLesZayBaesSaventDanser. Sauf qu’ici, Corops va trop loin. Bro, t’es dans la vingtaine, t’es un rappeur qui a un certain swag, et tu vis à l’époque de Tinder. Si t’es prêt à avoir la gonorrhée pour une femme, faut repenser à tes choix de vie “su’un temps” comme disent mes amis banlieusards (qui écoutent toujours Tu sors avec un player dans leur jacuzzi avec leurs dates Tinder). Surtout que dans la chanson, il est clairement pas question de tomber amoureux. Mon patnais, la gonorrhée pour un taillé? Bruh.
En partant, faire rimer« téquila » et « t’es qui, là », c’est très borderline. Mais alors… COMMENT EST-CE QUE TU POURRAIS ÊTRE HONORÉ PAR LE FAIT QUE LA FEMME DE TES RÊVES AIE LE CANCER? Tant de questions, si peu de réponses et pour une première fois dans ma vie, le rap me laisse complètement perplexe. J’ai pas eu autant mal à mon rapquéb depuis que j’ai pensé à la possibilité d’un remix de Vintage à l’os avec Sir Pat, ouf.
Pour vrai, j’abandonne.
MISE À JOUR: On est mercredi, jour de publication de Langue Sale. Il semble que je ne sois pas le seul qui aie abandonné, parce que Corops vient de retirer le vidéo de Téquila, en plus de la majorité de ses clips récents.
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Ça semble pas aller super bien dans sa vie personnelle, alors on va lui souhaiter courage à travers tout ça. Ceci étant dit, on laisse la chanson ici, parce que ça aura permis à Téquila de devenir immortelle, avant de mourir. #RIPTéquila
On se retrouve la semaine prochaine les gens.