Cette semaine à Langue Sale, on jase du nouvel EP d’Obia le Chef, des relations de Mikezup et Tizzo avec la police et de l’évolution de Souldia. Let’s go!
Obia le Chef – Blé doublé
«Trop de iencli comme si la run était dans les Pages Jaunes
Entre deux chops St-Viateur pizza frappe un calzone
Réinvesti dans la musique et rentré dans la zone
Pour vrai j’ai pleuré de joie quand j’ai vendu mon trap phone»
Obia le Chef est revenu la semaine dernière avec Zoklo, un nouvel EP qui fait suite à Souflette sorti en 2018. Le rappeur revient avec une formule plus concise sur laquelle il montre un côté plus personnel, notamment sur Navette. Le Chef est en forme, et si l’utilisation constante d’Autotune peut déplaire à certains, la qualité des bars est toujours là et les références sont plus inattendues les unes que les autres.
Sur Blé doublé, on a droit à une production inspirée de DoomX, membre de Planet Giza, et à des verses où Obia nous étale son désir de doubler ses profits en tout temps. Rien de très original, mais l’exécution est à point et le rappeur est clairement dans son élément.
Surtout, on ressent le bonheur du MC de 7ième Ciel lorsqu’il avoue avoir pleuré lors de la vente de son trap phone. Symbole de sa sortie du monde de la vente de drogues, c’est un geste qui montre toute l’ampleur que peut prendre une carrière fructueuse dans le rap. Si Obia ne se tient pas dans le top des ventes, il peut par contre compter sur les nombreux spectacles et festivals qui rapportent habituellement la majorité des revenus aux artistes.
Puis, il y a dans cette citation une dose de knowledge supplémentaire: les pizzas calzone à 5$ de la Pizzéria St-Viateur. Sérieux, si vous vous trouvez dans la zone, ne dormez pas.
Mikezup x Tizzo – Donuts
«Même quand j’suis piéton j’me fais pull up
Ça pue, ça sent les Pull-Ups»
Après avoir visionné le clip de Donuts, je pense que je serais prêt à co-sign un remake de How High avec Mikezup et Tizzo. Les deux compères se trouvent ici dans un guet-apens, chassés par des policières aux intentions louches et aux uniformes bien loin des réglementations (quoiqu’il s’agit peut-être de la prochaine évolution des pantalons camos). Il faut savoir être créatif avec les moyens de pression, j’imagine.
Reste que la scène où les deux agentes de la paix pensent tomber sur de gros sacs de weed dans le coffre de la voiture de Mikezup, pour finalement se buter à des boîtes de beignes m’a fait rire pour vrai, et j’en prendrais plus. Les rappeurs street du Québec ont souvent un peu de mal à ne pas se prendre au sérieux, et leur contenu gagnerait en qualité s’ils faisaient un peu de place à l’humour comme c’est fait ici.
Si le contenu de la chanson est moins pertinent, on a toujours droit aux jeux de mots immatures de Tizzo qui sont toujours aussi divertissants, et Mikezup amène une dose de realness qui se marie à merveille avec celui de son collègue fouetteur. Le flow plus posé de Mikezup permet de créer un beau mélange avec celle de Tizzo et leur chassé-croisé lors du refrain est particulièrement réussi.
Au final, ça donne une chanson qui n’est pas forcément mémorable, mais qui laisse présager une chimie hyper intéressante entre les deux artistes. D’ailleurs, j’attends les appels des producteurs de cinéma québécois pour mon idée de How High avec Mikezup et Tizzo. Ne niaisez pas, il y a de l’argent à faire avec ça.
Souldia – Barillet
«Si jamais tu veux du beef, la viande est saignante
Rouge, saignante, tu sais je ne suis pas végane»
Le vétéran d’Explicit Productions est back avec Barillet, un nouveau single qui laisse présager un changement de cap pour le rappeur de Québec. Le son est large, le délai sur la voix laisse planer les chants du MC et on découvre un Souldia plus musical qui vogue sur des inspirations à la PNL.
Loin d’être une copie du style du groupe phare du rap français des dernières années, Barillet est plutôt une évolution, une adaptation aux codes du rap qui changent et qui deviennent moins durs, moins crus, pour offrir quelque chose de plus solide musicalement, notamment grâce à des harmonies qui bonifient énormément la chanson.
Je trouve également bien divertissantes les bars qui mêlent beef et être végane. Après le «t’as du beef, j’ai du boeuf» de SP, on est maintenant certains que Souldia n’est pas végane, et que si jamais il y a un conflit, il vaut mieux se tenir loin du rappeur et de son crew, au risque de saigner si on ne respecte pas cette consigne. Dans un genre où la violence est généralement normalisée, il est fascinant d’observer les façons des rappeurs pour la présenter de façon créative, inédite. Sans glorifier la violence, on peut toutefois accepter qu’elle fasse partie du rap, et donc apprécier la créativité des artistes qui tentent de la relater en toute originalité. C’est un art en soi, et il est important de souligner l’inventivité des artistes, peu importe leur sujet de prédilection.
Enfin, il faut souligner le désir de Souldia de faire évoluer son art, n’en déplaise à une partie de son fanbase qui espère voir l’artiste revenir à ses sonorités passées. C’est la beauté de l’évolution humaine, on doit l’accepter, peu importe sa direction… même si elle n’est pas végane.
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