Cette semaine, on souligne la force de caractère de Naya Ali, le knowledge chaleureux de KNLO et le iPhone de FouKi.
Naya Ali — Get It Right
« Godspeed, high speed
Test us, don’t test me
Test me, you’ll see
Get good grades like Ivy »
La talentueuse, mais sous-estimée Naya Ali est de retour avec le single Get It Right, un brûlot qui mêle énergie et émotion sur une production du duo Banx & Ranx. J’avais eu la chance d’interviewer Ali il y a quelques mois et sa drive m’avait grandement impressionné. Elle démontre cette même confiance sur Get It Right où on sent une artiste qui découvre peu à peu l’ampleur de son talent.
C’est la beauté de l’état actuel de la scène rap d’ici. Une artiste comme Naya Ali a été signée par Coyote Records, un des labels majeurs de la musique québécoise dont la grande majorité des artistes chantent/rappent en français. Pourtant, Ali défend sa musique en anglais ce qui, de prime abord, ne semble pas être le type d’investissement que les maisons de disques québécoises privilégient habituellement. Sauf que le rap en ce moment, ça marche. Et quand ça marche, ça pousse les joueurs de l’industrie à prendre des risques.
Il se trouve que Naya Ali est un sacré bon risque à prendre, finalement. Au-delà de la musique, Ali possède cette confiance inébranlable qui la sépare du lot. Alors que le débat sur le manque de place pour les femmes dans le rap queb fait rage depuis des années (avec raison), on dirait que la rappeuse évolue en parallèle de tout ça, se taillant elle-même son spot.
C’est probablement dû à sa force de caractère et sa drive dans lesquels tous peuvent se reconnaître, peu importe qui on est.
KNLO — Cool cool
« Première fois qu’j’ai vu le homie Filligrann (Word Up!)
Maigre comme une baguette
Avec pas un poil de barbe, hey
K6(A), gang de buddés née autour du graff
Vaisseau qui a amené Artbeat Montreal pis Brown, hey »
KNLO a sorti son nouvel album Sainte-Foy la semaine dernière et je suis très fan. Habituellement amateur de musique sombre et sale dans mes temps libres, je me suis surpris à apprécier toute la luminosité de cet album. Faut dire qu’il est arrivé en même temps que le soleil et la chaleur dans ce début d’été québécois.
Sur Cool cool, on retrouve un vibe chanté qui me rappelle beaucoup le travail de Smino — autre artiste que j’affectionne particulièrement — où le débit rapide et saccadé se marie à merveille avec les notes aigües du refrain.
Surtout, on a droit sur cette chanson à un petit cours d’histoire sur certains des personnages et des structures importantes du rap québécois à travers les âges. KNLO, membre du légendaire K6A, a vu les époques passer et les liens se former entre les différents acteurs du mouvement. C’est ce qu’il souligne habilement dans la citation plus haut, alors qu’il explique que c’est en partant du K6A que sont nés Artbeat Montréal et Brown. La mention d’Artbeat n’est pas anodine.
Artbeat, ç’a été la rampe de lancement de la grande majorité des producteurs désormais reconnus mondialement issus de la scène montréalaise : Kaytranada, High-Klassified, Da-P, Dr. MaD (tous issus du collectif légendaire Alaiz), mais aussi Vlooper, Kenlo Craqnuques, Ajust, Tommy Kruise, VNCE CARTER et autres. Rassemblés par Artbeat entre 2011 et 2014 grâce au travail acharné de SevDee, Mark the Magnanimous et de Markings, les trois têtes d’Artbeat Montréal, les beatmakers en tous genres se retrouvaient dans la même pièce pour échanger sur leur art en parfaite communion lors des soirées roundtable où une sélection de beatmakers faisaient jouer leurs plus gros bangers à tour de rôle.
Personnellement, ce fut une des plus belles époques de ma vie. C’est grâce à Artbeat et WordUp! Battles qu’un groupe comme Dead Obies est né, et qu’Alaclair a pris son envol. Cette période dorée n’a jamais reçu la couverture médiatique qu’elle méritait parce que l’engouement pour le rap local à l’époque n’avait rien à voir avec ce qu’on connaît depuis deux ans maintenant. Sauf que quand des monuments du rap queb comme KNLO en parlent dans leurs tounes, c’est pas pour rien. Je vous suggère d’ailleurs cet article qui retrace l’histoire et l’importance d’Artbeat sur la scène où plusieurs artistes nommés dans le paragraphe précédent interviennent.
Pour les visuels, on vous suggère également le documentaire Piu Piu, a film about Montreal beat scene, réalisé par Aïsha C. Vertus aka Gayance.
Sinon, il suffit d’écouter Sainte-Foy pour aller grappiller d’autres knowledges importants sur fond de rayons de soleil musicaux.
FouKi — iPhone
« Si j’ai un new phone est-ce que j’t’un nouvel homme
S’il faut je changerai mon forfait d’téléphone »
Toujours dans le soleil, on rejoint maintenant FouKi qui nous fait un récit visuel de son dernier voyage en Jamaïque en compagnie de sa Zaybae à qui il chante la pomme sur iPhone. Si on peut déplorer la publicité gratuite pour Apple, il reste que la chanson, produite par Quiet Mike et Ruffsound, est superbe de légèreté et de transparence.
Là où beaucoup de rappeurs choisissent de ne pas s’afficher avec leurs blondes (ou chums) par désir de maintenir un certain mystère qui garde en vie les espoirs secrets de leur fanbase, FouKi a plutôt décidé d’assumer complètement sa relation et de s’en servir pour affirmer son authenticité. Parce que dans le clip, c’est réellement FouKi et sa blonde qui sont en vacances. Ici, pas d’équipe de tournage, de casting, de scouting ou de plans préétablis sur des documents de prod en douze volumes. Le gars est allé en vacances avec sa blonde, a été rejoint par le génial Xavier MC qui a capturé des images de gars en voyage et qui a fait le clip parfait pour ce qui pourrait très bien être un des hits de l’été.
Sinon, j’attends la version Androïde avec un clip un peu pixelisé et flou où FouKi ne reçoit pas les iMessages de sa blonde pendant qu’il est en tournée pis ça fout la merde parce qu’elle pense qu’elle se fait ghost par son chum submergé de groupie love. Bon, finalement, c’est peut-être mieux que tu gardes un iPhone quand ça sera le temps de changer ton forfait mon FouKi.