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Lâcher Uber lousse dans la nature, c’est loin d’être la meilleure solution
La présentation du projet de loi 17 sur la dérèglementation de l’industrie du taxi provoque de fortes réactions. Notre collaborateur nous fait part de la sienne.
L’industrie du taxi, une industrie locale, n’est pas en phase terminale. On l’euthanasie de force pour laisser la voie libre à une entreprise basée à l’extérieur du pays. Une compagnie qu’on pourra difficilement régulariser et qui se fout bien de la qualité de vie des gens qui travaillent pour l’engrosser pendant qu’elle passe à la banque, dans les îles autant que possible. C’est sans parler de la majoration des prix en période d’achalandage pour le même service. Si ce n’est pas se tirer dans le pied ça…
Si on y met la hache, on va se retrouver avec une masse d’immigrants dans la dèche qui, du jour au lendemain, devra rembourser des dettes énormes lorsque leur permis d’exploitation sera dévalué d’un seul coup.
On doit aussi prendre en compte que le taxi ce n’est pas vraiment une industrie de blancs du Bas-du-Fleuve non plus. Si on y met la hache, on va se retrouver avec une masse d’immigrants dans la dèche qui, du jour au lendemain, devra rembourser des dettes énormes lorsque leur permis d’exploitation sera dévalué d’un seul coup. À une époque où le Journal de Montréal ne peut pas relayer une nouvelle concernant des musulmans ou «des étranges» sur ses médias sociaux sans qu’un escadron de tarés ne débarque et détruise tout, une population largement racisée qui perd ses revenus ça n’aide en rien à l’intégration, à l’autonomie et encore moins à l’amélioration du climat actuel. Parce que oui, du racisme au Québec, y’en a. Va bien falloir se rentrer ça dans le CAQ un jour.
À Montréal seulement, le taxi c’est environ 9000 chauffeurs et leurs familles. Ça paye des taxes ce monde-là. Les compagnies de taxi aussi ça paye des taxes. On donne 1.3 milliard à Bombardier (qui doit-on le rappeler, fait tout en son pouvoir pour ne pas payer d’impôt) pour garder 1700 emplois en aéronautique. Après tout, c’est un peu le modèle d’affaire du «fleuron québécois» que de se faire aider quand son carnet de commandes est vide.
On va créer une commission parlementaire dans les prochains mois pour aider les journaux à faire la transition vers un nouveau modèle d’affaires. On a accordé plus de 15 millions sur 5 ans à l’ADISQ pour faire de même. On a déjà des programmes pour aider les commerces locaux et les entreprises d’ici et on se fend en quatre pour inciter les gens à acheter local. Ça ne serait pas exactement un précédent que d’aider une industrie en particulier.
On a déjà collectivement investi 250 millions dans l’industrie du taxi et au lieu d’aller jusqu’au bout et que cet argent serve, on tire la plug en n’offrant aucune solution viable et en laissant à elle-même une frange de la population déjà pas très riche.
Ceci dit, il n’y a pas que du mauvais chez Uber. Ça a donné tout un électrochoc à une industrie qui était sclérosée et paresseuse. On soupçonne aussi que la mafia tourne autour du milieu du taxi depuis toujours et que ce n’est pas le cas chez Uber. Dans notre belle grande province, où on se targue d’être des leaders en nouvelles technologies, on serait incapable de développer une application performante que pourraient utiliser les compagnies existantes? Notre police est-elle si faible qu’elle ne peut pas s’attaquer au crime organisé? Come on! Une fois ces problèmes-là nommés et identifiés, la solution ce n’est pas de jeter le bébé avec l’eau du bain et de recommencer à Silicon Valley.
Quand on va de l’avant avec un projet loi qui réforme subitement une façon de faire légale et convenue, ce n’est pas seulement la main froide et invisible du marché qui est à l’oeuvre. Il y a une volonté politique d’agir ainsi. On a déjà collectivement investi 250 millions dans l’industrie du taxi et au lieu d’aller jusqu’au bout et que cet argent serve, on tire la plug en n’offrant aucune solution viable et en laissant à elle-même une frange de la population déjà pas très riche.
Plusieurs pays (l’Allemagne, l’Italie, la Bulgarie, la Hongrie, Hong Kong, le Danemark, la France, l’Australie) ont déjà décidé que leur économie locale était plus importante que la «hype» causée par la nouveauté de Uber et ont banni en tout ou en partie le service de taxi déguisé en covoiturage. L’Angleterre et la Turquie y pensent, mais elles ont d’autres choses à gérer ces jours-ci. Et nous? On va volontairement se débarrasser d’une industrie viable? Et si tout ceci servait de pratique pour ce qui se passera dans 10 ou 15 ans quand une large proportion de la population perdra son emploi au profit de l’automation?
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