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La voleuse

Par
Eugénie Emond
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Les pertes pour vols et fraudes seraient en baisse chez les détaillants au Québec. Les résultats d’un sondage paru la semaine dernière et effectué par le Conseil québécois du commerce de détail stipulent que les pertes de l’année dernière se chiffrent à 791 millions comparativement à 880 millions il y a deux ans.

Les données s’expliqueraient par des mesures de sécurité accrues et l’étude démontre que le voleur est autant l’employé que le client. On peut aussi se demander ce qui en est de nos dépenses publiques.

J’ai, dans mes contacts, une voleuse. 5 pieds 2 pouces, cheveux châtains frisés, petit nez retroussé, l’air affable, doigts de grenouille et des yeux bleus comme le Golfe du Mexique dans le temps. Bref, le PM plus jeune, version féminine. Un petit guide décoratif du parfait anarchiste toujours sorti de la poche arrière de son pantalon. J’en ai souvent parlé, de ses larcins, quand on me demandait de ses nouvelles. Comment va Mademoiselle? Trrrrès Bien, même si les sondages sont en baisse. Toujours salariée, elle se voit bientôt à la tête de conseils d’administration de grandes multinationales. Elle a du flair et beaucoup de charisme.

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Sa formule est simple : du vol à l’étalage livré à domicile. Pour 30$ le client reçoit sa commande d’épicerie d’une valeur de 100$ directement à la maison. Elle ne prend pas les gros morceaux et exige de la précision dans la description des items : saumon fumé (norvégien), huile d’olive (première pression à froid), quinoa (deux couleurs), parmesan (reggiano). Elle ne privilégie que les grosses chaînes, qu’elle visite en alternance, sous l’impulsion du moment (Super C, Loblaws, Maxi, IGA) alors elle avertit bien que certains items ne sont pas disponibles partout, surtout dans le bio. Elle ne s’est jamais fait prendre? Non. Ou plutôt oui, une fois, par un jeune employé imberbe de 16 ans qui l’avait attrapée à l’extérieur du supermarché après l’avoir vu mettre dans son sac deux bouteilles de mousseux. Avant d’être confrontée à une commission d’enquête, elle lui demanda :’’ Puis-je te faire une fausse facture?’’. Devant sa réponse négative, elle lui lança quelques jurons à la figure avec les bonbons à l’ananas qu’elle avait pris dans le stand en vrac et enfourcha sa monture.

Mon contact, dans l’eau bouillante, sera poussé à prendre sa retraite prochainement et est déjà à la recherche d’autres plans de match. L’île d’Anticosti étant déjà occupée, elle convoite le Nord du Québec; elle a toujours rêvé de partager son temps avec le peuple inuit. Elle a aussi pensé à l’Europe, la Chine, la Russie, mais la concurrence est trop féroce. Que faire? Pour quelques bouchées de pain, elle a finalement songé utiliser les services de notre ancien PM Lucien Bouchard. Dans sa débâcle, je lui ai recommandé d’éviter de le faire; il pourrait être biaisé.

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‘’C’est un métier où on est vite brûlé. Mieux vaut quitter la scène alors qu’on est au sommet’’. Ce sont mes amis qui vont être déçus de son choix qui marquera la fin d’une série d’anecdotes savoureuses. Le vol est un péché capital, ça crée toujours un malaise lorsqu’on l’assume, mais aussi beaucoup d’admiration. En parlant de la voleuse à mes amis, plusieurs m’ont raconté leurs propres expériences watatatow de vols à la pharmacie où le châtiment parental avait été cuisant et la menace du dossier judiciaire efficace. Mais le profil du voleur a changé. En 2011, c’est ta sœur, ton copain, la fille des ressources humaines au CSSS, le gouvernement.

J’ai demandé à la voleuse si je pouvais parler d’elle pour mon article. Bien sûr, qu’elle m’a dit, tu peux même leur transmettre mes trucs, je serai bientôt appelée, de toute façon, à donner des conférences sur le sujet dans les écoles.

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