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Toronto est la 4e ville la plus peuplée d’Amérique du Nord derrière Los Angeles, New York et Mexico City. Elle est surnommée la Ville Reine, T-DOT, Hogtown et tout récemment renommée officiellement, Toronto : ville du Crack.
(Pour voir Toronto en images, cliquez ici)
Après avoir habité Montréal pendant 6 ans, j’habite depuis 1 an et demi cette ville que j’aime détester. Récemment, ce ne sont pas la tour du CN, ni le TIFF, ni Drake, ni toutes les équipes de sport professionnel toutes aussi poches les unes que les autres qui ont fait jaser, c’est le fumeur de crack au front suant qui sert de maire, Rob Ford.
La croyance populaire des Québécois veut que la ville de Toronto soit une ville d’anglos, plate, beige, prétentieuse, chieuse, licheuse, chiante et ce n’est pas tout à fait faux. Par contre, démystifions le tout, il n’y a pas que des restaurants The Keg, des hôtels Delta et du Pulled Pork; tout le monde peut y trouver son compte. Voici mon Toronto.
1. Living here (vivre icitte)
Le grand Toronto s’étend sur l’équivalent de St-Jérôme à loin sur la Rive-Sud et de Repentigny à Kirkland, alors je me concentrerai sur le centre de la ville, plus précisément le quadrilatère entre les Beaches et Lansdowne entre Dupont et la piste cyclable au bord du lac. (Google it) C’est ici que le vrai Torontois habite dans son condo en carton.
Toronto est en train de se transformer en une ville du condo puisque tout le monde s’en achète un. Le prix des loyers est ridiculement cher, (en moyenne 1200.00 $/mois pour un one bedroom dans un sous-sol) alors tout le monde investit son 350 000 $ pour un condo en carton avec vue sur la grue qui construit le prochain condo en carton (qui lui, a une piscine et un gym en carton).
Il n’y a pas juste le logement qui est cher ici, tout l’est un petit peu, mais en revanche, les métiers spécialisés payent la piasse.
2. The neighbourhoods (les quartiers)
La ville est en explosion et les gens de partout arrivent. Le multiculturalisme y est à son paroxysme avec environ 50% de la population qui représente une minorité visible. Avec un taux d’immigration si élevé, il n’y a pas que des quartiers chinois et italiens qui sont officiels, il y en a 140 autres. Je ne vais pas tous les nommer, voici ceux qui sont moins beiges avec, en prime, le stéréotype du Torontois que tu y verras.
Downtown/ King Street : le quartier général des grosses banques, des condos et des clubs.
Tu y verras : des banquiers trop pressés la semaine, transformés en douchebags chauds le weekend.
Dundas Square: le Times Square des pauvres avec des publicités placardées jusqu’au 47e étage des condos en carton. Au cœur de la rue Yonge, la plus longue rue au monde qui s’étend sur 1896 km.
Tu y verras : des touristes et des weirdos qui veulent du cash en échange d’une chanson asiatico-emo, d’une revue sur le mois des noirs ou d’un prrrraaaaayyyyy crié par un vieux bonhomme sur le trottoir.
West Queen West: l’ouest de la rue Queen Ouest, comme si le Far West avait échangé ses cowboys pour des hipsters génériques, mais qu’il avait gardé les saloons (okay, bars).
Tu y verras : des hipsters avec des moustaches, des hipsters en fixie, des hipsters avec des chiens et des hipsters avec des hipsters.
Parkdale: à l’ouest de West Queen West, les plus hipsters y sont rendus, mais ont poussé la gentrification au maximum jusqu’à un tel point que la ville a stoppé toute nouvelle construction et ouverture de commerce.
Tu y verras : des itinérants, des fous et des hipsters 2.0
Kensington Market : le marché où tu vas trouver des vêtements pas chers (mais qui valent pas cher), des épiceries, des restaurants latinos et indiens ainsi que des bars d’after-party illégaux.
Tu y verras : des hippies, des drogués, des latinos, des touristes et des étudiants.
The Annex/Koreatown: un quartier où il y a un semblant de vie de quartier avec des influences asiatiques et de plus en plus de petits cafés, bookstore et bars trendy.
Tu y verras : l’étudiant, le Coréen, la famille de semi-artiste-semi-businessman et moi.
The Beaches : au bord de la plage (attention aux coliformes fécaux), c’est là que tu vas te baigner et profiter du boardwalk. C’est aussi là que la plupart des studios de cinéma de la ville sont.
Tu y verras : des familles, du bon monde en maillot, des skaters, et le grand lac.
3. The people (le monde)
Vous l’aurez deviné, le stéréotype de l’anglo qui ne connaît que les marques Roots, Skechers et sa casquette de baseball n’est pas validé à Toronto. Au contraire, les gens sont toujours bien mis sur leur 36 et ils suivent les tendances de très près. J’ai découvert des humains-archives de mode. Mon préféré : le gars qui a la coupe que tout le monde a, avec des stretchers dans les oreilles, adepte du raw food qui a toujours la cicatrice de son vieux perçage dans le sourcil, les restants de ses tatouages de son époque straight edge, qui roule avec un 6-pack d’une micro-brasserie dans la caisse à lait attachée à son fixie qui a un frein avant.
Voici mon analyse sur les relations interpersonnelles à Toronto : comme le prix des loyers est exorbitant et que tout est cher, les gens travaillent beaucoup et n’ont pas le temps de s’investir dans de nouvelles relations. Les Torontois sont satisfaits de leur cercle d’amis qu’ils traînent depuis l’école primaire. Les relations amoureuses/sexuelles sont régies par un système de dating à trois étapes, qu’on a essayé de m’expliquer en vain (en gros, ça finit dans le lit).
Les sites et applications de dating comme Tinder sont la référence, tous mes ami(es) sont là-dessus et ça marche parce que t’as beau pas avoir le temps d’avoir une blonde/chum, mais faut bin subvenir à tes besoins de primates.
La beauté avec cette façon de faire, c’est que ceux qui ne comprennent pas trop et viennent d’ailleurs, vivent la même chose et tissent facilement des liens.
Coups de coeur fashion :
Jacflash : designer torontois dans le prêt-à-porter haut de gamme.
Black Market : friperie où tout est à 10$, même un manteau de cuir.
Garrison’s Barbershop : salon de barbier qui mêle bien le service classique aux nouvelles tendances.
4. The TTC (le transport)
Le streetcar (ou tramway) de Toronto a fait jaser cet été quand le jeune avec le couteau s’est fait abattre par des policiers. Il fait aussi jaser chaque semaine quand il pète en pleine heure de pointe partout. En gros, le transport en commun ici n’est pas que l’diable, surtout considérant qu’une passe est 130$/mois environ. Le vélo est donc très populaire malgré les tracks de streetcar qui sont très dangereuses quand les cyclistes se pognent dedans. Les pistes cyclables au centre-ville semblent oubliées par monsieur le maire (le même qui oublie quand il fume du crack en boisson). Il y a un accident de vélo mortel presque chaque semaine. Le fixie (avec ou sans frein avant) est partout et les taxis prennent la carte de débit.
Coup de cœur pour t’acheter un fixie (ou un bicycle de pauvre)
Bikes on Wheels : pour un bon vélo dans Queen West et dans le Kensington Market.
Public Butter : pour un vélo merdique à 60$ et/ou des vêtements vintage.
5. The food (la bouffe)
Il n’y a pas que du pulled pork et des steaks bien-cuits à Toronto. Avec autant d’immigration, il y a le meilleur de partout, c’est à Toronto que j’ai mangé le meilleur indien, éthiopien, coréen et en plus la bouffe de rue est légale depuis longtemps. Pour le Québécois qui a peur de perdre ses repères, il semble y avoir un engouement pour la poutine, qu’on peut trouver dans tous les quartiers de la ville (la meilleure est Poutini’s). Restons avec les classiques.
Coup de cœur – Pizza
North of Brooklyn pizzeria : 5 choix de pizza dans Queen West et ils livrent en fixie (sans frein avant).
Piola : bien que plusieurs blogues te diront que la meilleure pizza de Toronto est sur Ossington, ne vas pas faire le line-up, elle est meilleure chez Piola et les drinks sont 3$ la fin de semaine. En prime, le serveur irlandais parle français.
Coup de cœur – Sushis
Guu : brasseries japonaises avec des menus à partager incroyables et en plus on te crie par la tête tout le long du repas.
Kanji Sushi : un des très bons sushis dans le quartier Parkdale et en plus on ne te crie pas par la tête tout le long du repas.
Coup-de-cœur Brunch (aka boire des Bloody Ceasar le matin)
Drake Hotel : le Chicken & Waffles est à se péter la tête sur les murs.
Easy Restaurant : décoré à l’image du film Easy Rider, on t’y sert d’incroyables smoothies au beurre de pin et les meilleurs œufs bénédictines.
Sneaky Dee’s : des déjeuners aux influences mexicaines qui coûtent pas grand-chose et le weekend ça sent encore la soirée de la veille, alors ce n’est pas trop déstabilisant.
6. Getting drunk (se mettre chaud)
Il faut être organisé ici puisque les bars ferment à 2h et que l’alcool c’est au LCBO, la bière c’est au Beer Store et le vin c’est au Wine Rack (bien que tout ça peut s’acheter au LCBO). La semaine, les déprimés se mettent chaud au 5 à 7, mais peu de personnes restent plus tard que 23h alors que le weekend, tout le monde se met chaud beaucoup, partout ! Voici mes bars préférés.
Coups-de-cœur Bars
Beaconsfield : un genre de Bily Kun avec des shots gratuits tout le temps (voir la gérante Danha).
Happy Child : même genre avec du rap et un proprio asiatique tatoué (qui parle français et connaît une chanson de Dubmatique par cœur).
416 Snack Bar : tu t’assoies autour du bar comme au Big in Japan (bar) et on te sert des cocktails accompagnés d’huîtres pas chères du tout.
Tortilla Flats : on te sert des triples pour 9$. Au menu : Bloody Ceasar trop épicés et Margarona (une Margarita avec des Coronas à l’envers dedans).
La Palette : super bon restaurant français, mais ce sont ses soirées folles qui retiennent l’attention avec des groupes de Balkan-Klezmer-Gypsy-Party-Punk qui jouent SUR le bar et la Québécoise Jolyane qui te sert de la vraie absinthe en te regardant dans les yeux.
7. After 2AM (après 2 heures du mat)
Coups de cœur des afters illégaux où ils servent de l’alcool après 2h!
The Rainbow Palace (Kensington Market) : les murs et les plafonds sont faits en isolant d’intérieur de micro-ondes, le résultat est à peu près l’équivalent de Blade II. On n’y sert que de la Pabst et du Whiskey et prévoyez de l’argent liquide parce qu’il n’y a pas d’ATM. L’adresse exacte est inconnue, il faut envoyer un email sur leur site internet et ils te renvoient les infos.
Bar de Pauvre (Kensington Market) : celui-ci, tout le monde le connaît, il ne faut que suivre les saoulons dans Kensington pour le trouver. Ne fais pas l’erreur de cogner dans la porte de métal, il y a une webcam devant la porte et on viendra ouvrir. Pour 10$, t’auras accès à deux tables de pool, 2 tables de poker ainsi que les amis de Rob Ford qui t’offriront du crack et une atmosphère semblable à Walking Dead. Aussi, si t’as besoin de gros cash et que t’es Ryan Gosling dans Drive, il y a une Porsche Cayenne qui débarque vers 5h30 AM pour ramasser des enveloppes.
8. The best pools you can get to (les meilleures piscines accessibles)
Pour moi, les piscines d’hôtels sont un must bizarrement facilement accessible à Toronto, mais attention parce que comme dans The Bling Ring, ça peut mal finir.
Fairmount Royal York : l’un des hôtels les plus luxueux de la ville avec une superbe piscine, un spa et tout le tralala, le seul hic c’est que ça ferme à 21h00 et que comme tu ne dormiras sûrement pas là, tu n’auras pas accès pareil. Le petit cadenas de la fenêtre est croche et tu le tasses et ding, ding, ding t’es dans la piscine en robe de chambre avec ta bière et tes clopes.
Thompson Hotel : le festival de films TIFF, l’hôtel Thompson accueille les vedettes comme Robert Pattinson et ce n’est pas pour rien, c’est hyper beau et la piscine sur le toit offre la meilleure vue de la ville. Voici le plan, tu entres au lobby, tu prends l’ascenseur qui est à gauche, t’attends que quelqu’un monte dedans en faisant comme si tu es sur ton cellulaire, t’appuies sur le dernier bouton en haut, tu tournes à droite, tu te mets en maillot et tu vas dans la piscine. Ding, ding, ding!
***Si on t’y prend et tu es persona non-grata : mets les choses en perspective en rappelant au gardien que le maire de la ville fume du crack.
9. The music (la musique)
Toronto est une ville où ça vibre culturellement, entre autres grâce au Toronto International Film Festival (TIFF), au Canadian Music Week (CMW), au festival North by Northeast (NXNE) et à toutes les tournées musicales qui s’arrêtent ici.
Dans les dernières années, on aurait dit que tous les nouveaux bands de la ville étaient des ramifications de Broken Social Scene. Maintenant, plusieurs scènes musicales s’y sont développées et il y a tout le temps des concerts partout.
La scène powerpop (musique pop avec un esthétisme punk) a été la plus accueillante pour moi et est l’une des plus vibrantes de la ville. Au cœur de tout ça, il y a Joel French, promoteur de spectacles et membre d’environ 26 bands qui organise des spectacles dans des restaurants de sushis et des sous-sols. Sinon, il y a Drake.
Coups de cœur Salles de spectacles :
Bovine Sex Club : shows punks 8 soirs par semaine et tu tomberas en amour avec la serveuse burlesque.
The Hoxton : les meilleurs DJ/beatmakers et le croisement entre les neo-hipster-dubstep et les douches de la rue King est un spectacle en soi.
Sound Academy : la pire salle de spectacle au monde, l’artiste a beau être aussi génial que Bono, mettons, mais n’y vas pas.
10. Fuck, I don’t hate it that much (Câlice, j’hais pas ça tant que ça)
En écrivant cette chronique, qui devait être d’environ 1000 mots (finalement 3 romans), je me suis surpris à vouloir la rendre attrayante. Comme les autres quebs, j’aime détester Toronto et comme les autres quebs, je m’étais dit en arrivant ici en juin 2012 que c’était seulement pour un contrat d’un an, mais m’y voici avec un deuxième. C’est connu, tout le monde se fait absorber par ce vortex; malgré tous ses points négatifs, Toronto est comme le crack-cocaïne, on peut y réaliser ses rêves et devenir qui on veut, mais attention, elle peut créer une dépendance.
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Sur Twitter : @didiercharette