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Si Laval se targue d’être le meilleur compromis entre Montréal et la banlieue, tout bon Lambertois sait pertinemment que c’est Saint-Lambert, la crème du compromis. La différence, c’est qu’il n’est pas nécessaire de tordre le bras des gens pour qu’ils viennent s’y installer.
Eh puis de toute façon, vaut mieux pas trop vendre la mèche… Saint-Lambert est une ville de banlieue qui refuse de l’être tout à fait. Loin du brouhaha montréalais, mais à l’abri des Tempos du 450 profond (un règlement municipal les interdit, pour vrai). Les rues bordées d’arbres gigantesques exhalent quiétude et bonhomie. On y vit au rythme des soirées d’été. Celles où on n’entend que les cliquetis des ustensiles dans les assiettes et les verres de vin qui s’entrechoquent, entre deux SPLOUSH! de piscine creusée. On jardine, on composte, on amène les enfants au soccer et on va au marché magasiner du bio, le jeudi après-midi.
1. Bourgeois-bohêmes et autres coquetteries
Saint-Lambert, c’est l’équivalent gogauche de Ville Mont-Royal, ou le hot spot du public radio-canadien.
Un charmant village urbain, où les commères ne parlent que des prix démesurés des propriétés: « T’as vu combien Untel a vendu sa maison, sur Maple? Eille, un semi détaché, sous-sol pas fini. C’est sûr que si je refais ma véranda, je me fais évaluer au moins 150 000 plus cher! ». Reste qu’il s’agit probablement du meilleur endroit pour élever une famille. Quoi que si on en croit mon père, et je cite : « Saint-Lambert est une ville martyr! Osheaga, feux d’artifices, NASCAR, Piknic Electronik, Heavy Montreal et autres babouineries; c’est le Sarajevo de la Rive-Sud ! ». Ouais, bon. C’est triste pour les oreilles de mon petit papa et celles de bien d’autres citoyens outrés, mais c’est malheureusement le prix à payer pour vivre en bordure de la Voie maritime du Saint-Laurent. Il s’agit d’ailleurs d’une complainte assez répandue chez les Lambertois, alors qu’en 2010, on intentait un recours collectif contre le Parc Jean-Drapeau, pour la réduction des « bruits d’outre-fleuve »… Cela dit, c’est le genre de proximité avec l’action montréalaise qui est loin de déplaire à la jeunesse lambertoise. Ah, grandir à Saint-Lambert! J’y reviendrai.
2. Saint-Lambert, ville sensibilisée ;-)
Parlant de la jeunesse lambertoise, on ne peut passer outre le fait qu’elle témoigne d’une propension pour le militantisme supérieur à la moyenne du 450 (désolée, lancez vos roches doucement, je vous en conjure…)
C’est bouffie d’orgueil que j’ai observé ceci, au printemps, depuis ma terre d’exil montréalaise :
Les casseroles de Saint-Lambert. La rue Victoria qui se transforme pour un instant en rue Mont-Royal, genre. « Thaaat’s my people! » me suis-je alors dit. Cet épisode aura cependant confirmé l’appartenance de Saint-Lambert au fameux axe Plateau-Saint-Lambert-Outremont. Reste que plusieurs expat’ auront probablement ressenti la même fierté que moi. Bobo, disais-je plus haut (avec amour)? Ouân…
3. Vieux Saint-Lambert VS Nouveau Saint-Lambert (Préville)
Fait géographique notable, la ville se divise en trois secteurs :
– Le Vieux Saint-Lambert (Rues bien parallèles comprises entre Victoria et la « frontière » longueuilloise, avec des maisons plus anciennes);
– Le Haut Saint-Lambert (No man’s land ultra récent, avec des immeubles aseptisés qui n’ont pas encore d’âme);
– Le Nouveau Saint-Lambert ou Préville (Développement relativement récent, avec des rues-labyrinthes et beaucoup de piscines).
« On s’en fout, même affaire » me direz-vous. Grave erreur! Parce qu’il existe une émulation entre le Nouveau et le Vieux Saint-Lambert. Pour les jeunes du Vieux, Préville est une banlieue. Ouais, comme un Inception de banlieues. Les gens du Nouveau sont les banlieusards de la banlieue, mais qui peuvent narguer les autres avec leurs piscines et leurs grandes cours… Malgré tout, tous convergent vers l’épicentre de l’activité lambertoise: la rue Victoria (« le Village »), où on trouve restos, commerces et boutiques aussi overpriced que charmantes.
4. L’Échoppe des fromages …
Fromagerie renommée et joyeusement désinvolte de la rue Victoria, il s’agit d’un lieu phare du rayonnement lambertois, à l’échelle du Québec. En 2006, ce bon Pierre Foglia avait d’ailleurs « bavé » l’Échoppe dans un article intitulé « Y m’énarvent! ». Le propriétaire, Max Dubois, lui avait alors servi du tac-au-tac une habile leçon de nomenclature fromagère. Dans les dents, Monsieur le chroniqueur! L’Échoppe n’a certainement pas volé sa notoriété. Non seulement l’Échoppe fournit en fromage la plupart (tous?) les restos cool et branchés de la métropole, voire au-delà, mais on s’y rue les samedis et dimanches matins à l’heure du brunch, pour une Croûte chaude. Et si foule il y a : «Booooon, on va encore se ramasser au Café Passion… »
(NB : Pas que c’est pas bon, là. Mais c’est tellement plus mainstream…)
5. …et autres espoirs de devenir cool
Aussi, le degré de coolness du jeune lambertois se mesure presqu’invariablement par ses rapports avec le staff de l’Échoppe. Mais étant donné que tout le monde a soit un frère, une cousine ou un pote qui y travaille ou y a déjà travaillé : y’a toujours moyen de moyenner. Et si non, vous pouvez toujours écumer les étalages du Palm Ilse (le « fameux » skateshop de Saint-Lambert) en espérant devenir bro avec les vendeurs. Mais ça, c’est une autre game, un peu. Mettons que vous risquez de vous ramasser à boire de la Pabst derrière le skatepark, plutôt que de vous saouler au Sancerre dans des partys de cuisine. Mais bon. Y’en a pour tous les goûts, à Saint-Lambert!
6. Les fêtes de Saint-Lambert
Sinon, y’a toujours les fêtes de Saint-Lambert, tous les mois d’août, pour essayer de se bâtir un certain capital social. J’exagère, mais reste que les Fêtes de Saint-Lambert constituent un élément « mythique » de la vie lambertoise. Chaque fin d’été, c’est l’occasion pour les familles de se balader sur la rue Victoria dans l’allégresse. On joue dans les jeux gonflables, on dine au stand de nouilles chinoises, on passe des heures à feuilleter des livres chers dans les étalages du Fureteur et on flâne jusqu’à tard en soirée, pour assister aux concerts offerts. #Labellevie, comme dirait Martineau.
7. Grandir à Saint-Lamb’: Du Mouille-pieds aux Saints-Anges…
À mon sens, le petit Vieux-Lambertois typique fréquente la Garderie du Mouille-Pieds les premières années de sa vie, puis l’École des Saint-Anges. Et l’été, il se fait systématiquement shiper à au moins un séjour au Camp Minogami.
Pour ce qui est du Mouille-pieds, il s’agit immanquablement du CPE le plus magique de l’univers (maintenant en deux succursales, Gare et Ruelle). Marquant comme pas un. Pour vous dire, une de mes colocs actuelles se fait encore des fournées de Riz au Cari Mouille-pieds, de temps en temps. Pour ma part, je suis toujours persuadée que c’est une vraie sorcière qui habite dans la Maison de la sorcière, derrière le Mouille-Pieds de la Ruelle… Quant à l’École des Saint-Anges, bon. Dossier épineux. Pour certains, ce fut Rabeau ou l’École Préville. Chacun a droit à son sentiment d’appartenance. Surtout qu’à la rentrée 1999, il y a eu tout un remaniement sectoriel des « écoles de quartiers ». Plusieurs familles ont alors dû changer d’école. Eille, ç’a l’air de rien, mais dans nos courtes vies d’enfants-ouatés : c’était la Déportation. Ma troisième année s’entamait sans Claudine et sans Elisabeth, pendant que débarquaient d’outremer (10 rues plus loin) ces Étranges à l’air ébahi, venus de la Nyctale qu’on venait de fermer. En trois semaines, c’était oublié. Tsé, les enfants… Mais avec tout ça, les nationalismes d’écoles primaires sont devenus troubles. Passons donc à l’étape suivante.
8. … En passant par le camp Minogami
Ah oui, j’oubliais! C’est un autre moyen d’être cool à Saint-Lambert, ça, la clique Minogami. J’y suis extérieure, certes, mais les initiés comprendront. (Namedrop : j’ai l’ancienne pancarte de La Guérite dans ma cuisine, watssupppp!)
9. Grandir à Saint-Lamb’: Durocher VS NDL
Il y a principalement deux collèges qui se disputent la clientèle lambertoise : le Collège Durocher et le Collège Notre-Dame-de-Lourdes. Dans la vie de chaque Lambertois, vient un temps où il doit Choisir. Les libres-penseurs font fi du dilemme et filent à Saint-Edmond ou dans la grand’ville, mais la majorité se range d’un bord, ou de l’autre de la rue Tiffin. Pour ma part, j’avais choisi NDL parce que je trouvais ça plus underground (lol). Mais il faut bien choisir, parce qu’il s’agit d’une allégeance stricte. Si les jeunes se retrouvent pour brosser le weekend, il y a cette rivalité innée entre les deux institutions. C’est comme ça. Ça ne se décrit pas, ça se ressent. La meilleure, au final? Ah! La question est lancée, tiens…
10. La suite des choses…
Pour la suite, les chemins se dispersent. Si les voies Brébeuf, Edouard-Montpetit, et Vieux-Montréal sont les plus empruntées, la cinquième secondaire marque toujours la fin d’une « génération » de jeunes lambertois à trainer au Village ou dans le Parc du Soldat. Pour dire, j’ai 20 ans et je suis hasbeen solide, à Saint-Lambert… Mais lorsque je viens passer des weekends chez mes parents, je ne peux m’empêcher d’appeler mes plus vieux copains, tout énervée : « On va tu au Hartley’s? On va tu se balancer au Parc Alexandra? On s’infiltre-tu dans la barbotteuse l’Espérance pendant la nuit? On va tu au Dépanneur Brisson acheter de la bière avec des fausses cartes? On fait tu du cerf-volant à la Voie Maritime? On fait tu des sonne-décriss à la maison rose sur Desaulniers? On mange tu des Skittles surettes jusqu’à temps qu’on vomisse? On peut tu avoir 8 ans, encore? …»
Faq’ c’est ça, Saint-Lambert.
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