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J’aimerais bien faire honneur aux Lachutois et vous parler de leur spécialité culinaire ou de leurs institutions comme la Patate Labelle ou la crème glacée Lowe sur le bord de la Principale, mais si ma ville d’adoption fait tourner les têtes ces temps-ci, c’est surtout à cause du prix de l’essence qui est 15 cents de moins qu’ailleurs. Parce que la terre y a tremblé aussi. Par trois fois cette année: 4,3, 3,9 et 3,3 sur l’échelle de Richter. Qui dit mieux?
1. La Tuque?
Non, Lachute. Un peu plus de 12 000 âmes blotties au pied du Bouclier canadien entre Montréal et Gatineau. On partage plut ôt la température de l’Outaouais, mais on appartient à la région des Laurentides, dont on se fout un peu pour être honnête. Lachute, c’est la ville centre d’Argenteuil d’abord et avant tout. Une MRC de 9 municipalités autrefois peuplée majoritairement d’anglophones et dont le slogan est: Un secret bien gardé. Ah, pour ça oui.
2. Son nom s’a map.
125 années d’existence, un aéroport, un hôpital, un golf, des terres agricoles, un peu de forêt, quelques entreprises, dont les usines Cascades et des salons de coiffure à profusion. C’est évidemment plus que cela, mais ça a surtout été bien des choses, Lachute, autrefois. C’était même indiqué sur le globe terrestre tant les Ayers, propriétaires de l’usine de textile, l’un des principaux employeurs de la ville au siècle dernier, étaient influents à l’époque de Duplessis. De cette ère, comme de celle des méthodistes du Vermont et loyalistes qui ont mis les pieds aux abords de la grosse chute en 1796, subsistent encore quelques effluves et plusieurs églises.
3. Le Maire Noël
Le maire Daniel Mayer et sa barbe blanche remplissent présentement leur sixième mandat.
4. Le dégel
On sait que le printemps est bien installé quand on aperçoit des chasseurs se promener en pick-up avec un fusil ou une arbalète, fenêtre baissée, le coude accoté sur le volant, tirer les marmottes chez les fermiers du coin et tenter d’abattre la corneille (étonnant à quel point l’oiseau peut être rusé) pour le tournoi de chasse à la corneille et aux marmottes. C’est aussi le moment de l’année où la terrasse du Top Shot (très bonnes, les côtes levées) fourmille de blousons de cuir accompagnés d’une moto, et dont le conducteur, une bière à la main, sa tresse dans l’autre, fait bronzer son épiderme déjà bien tanné sur les airs de Mustang Sally.
5. Apportez votre vin
La Grange, c’est réellement le secret le mieux gardé d’Argenteuil. Méconnue des habitants, cette ancienne halte de VTT rassemble les anciens chez Guy et Thérèse Legault tous les vendredis soirs. T’emmènes ta bière, ton instrument de musique et tu te joins sans pudeur à leur cacophonie. Un bijou d’endroit fréquenté par le Gaspésien Adé Gagnon et sa comparse Marie-Lord (peut-être aussi le percussionniste Guy Nadon, mais je ne reconnaîtrais pas son visage). Thérèse vous fait signer son livre d’or à l’entrée et vous donne un déodorant à la sortie.
6. On prendrait tous un train.
On est tous très fier de notre patrimoine bâti et de notre gare, un fleuron dans lequel on a investi près de deux millions l’an dernier et qu’on a converti en bureaux. On a aussi hâte qu’un vrai train y passe et nous emmène sans détour vers Ottawa ou Montréal, comme c’était le cas autrefois. C’est d’ailleurs une promesse électorale, faut-il encore vous le rappeler, Messieurs les candidats.
7. Des urnes aux enchères
À l’encan de Lachute, un des plus vieux du Québec, on peut acheter un cheval, des poules et des tonnes de trésors, d’autant plus que certains marchands ne semblent pas connaître la valeur véritable de leurs articles. Si vous prenez le temps de vous y arrêter le mardi ou le dimanche, ya Jean-Guy, Charlie et Desneiges qui vous accueilleront et vous montreront quel artéfact de leur kiosque ils ont choisi (à temps perdu) de transformer en urne pour y enfouir un jour leurs cendres (pour Charlie c’est un cendrier de bronze refondu).
8. Lachute sans mon vélo
Bien que la route verte sillonne joliment la région, la majorité du temps, on prend fièrement sa voiture pour se rendre au dépanneur. Une dizaine de citoyens utilisent le vélo comme moyen de transport (j’exclus ici les touristes du dimanche ou de l’activité Samedi vélo ): moi, Kendy la photographe, quelques jeunes qui ont perdu leur permis et trois bonhommes, fin quarantaine, un peu scraps ,qui remontent la grand’ rue plusieurs fois par jour à la recherche d’un peu d’air frais (avoir pris le temps de les suivre, j’aurais sans doute trouvé autre chose qu’une quête d’oxygène).
9. Que jeunesse se fasse.
Ça n’a pas été facile pour les jeunes dans la région. Aujourd’hui, le taux de décrochage tend à diminuer fortement (il était de 45% dans les Laurentides en 2000) ainsi que les accidents mortels sur la 50, cette autoroute à deux voies non éclairées qu’on a affublée de bandes rugueuses pour arrêter (avec de bons résultats) l’hémorragie. Un terrain de soccer-football synthétique et du transport collectif vont peut-être convaincre les jeunes de rester.
10. Bientôt le St-Hub.
La Chambre de commerce et d’industrie d’Argenteuil espère beaucoup du parachèvement de l’autoroute 50 qui reliera cette année Gatineau à l’autoroute 15 et emmènera son lot de nouveaux résidents et de commerçants. Le Lachutois moyen, lui, salive en pensant au St-Hubert qui débarquera enfin, mais ne souhaite pas pour autant que sa petite ville prenne des allures de banlieue. C’est qu’on est bien à Lachute. Entre tradition et modernité, l’entraide, généralement désintéressée, a toujours eu sa place sous le soleil avec, comme trame de fond, le son des cornemuses du plus vieux corps de cadets de la province qui résonne parfois dans le parc Barron.
Lachute en images