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Lac-à-la-Tortue, c’est une ville qui n’existe officiellement plus, fusionnée depuis quelques années à Shawinigan, patelin de « l’honorable » Jean Chrétien. Maintenant, sur les pancartes, c’est écrit Shawinigan (Lac-à-la-Tortue). Bref, on est devenu une parenthèse.
Mais pour les besoins de la cause, on va faire comme si ça existait. Pourquoi ce nom-là? Y en a qui disent que c’est parce que le lac est en forme de tortue, ce qui est assez contestable. D’autres disent qu’il y a déjà eu des tortues dans le lac, ce qui est encore plus contestable. D’autres disent qu’à l’époque, on fabriquait des poêles qu’on appelait « tortues » avec le minerai du fond du lac, et d’autres que les poêles défectueuses étaient jetées dans le lac. Selon moi, ça aurait aussi bien pu s’appeler le Lac-aux-Algues tellement il en est rempli, ce qui est assez facile à voir le jour des « poubelles d’algues » au Tour du Lac. Sinon, pour se replacer dans l’histoire, le Lac-à-la-Tortue, c’est à côté de la glorieuse Hérouxville, même que le Tour du Lac passe dedans, ce qui fait qu’on croise la pancarte en faisant le tour et que ça nous rend bien fiers (ou pas).
1- Les vedettes
J’aimerais beaucoup vous dire que de nombreuses vedettes sont issues de Lac-à-la-Tortue, mais la vérité, c’est qu’à ma connaissance, il n’en existe qu’une (et je n’ai pas réussi à en obtenir confirmation par une source fiable). Toujours est-il que selon mon père et quelques autres Tortulinois (c’est notre nom, oui), Robert Brouillette (le seul et unique Dr. Martineau de Quatre et demi…) viendrait de là et aurait même été dans les scouts avec mon oncle. Et c’est pas rien, surtout que selon sa fiche d’agence de casting, il ferait du patin à RUES alignées, ce qui selon moi est pas mal une première dans le milieu du showbiz québécois. À part ça, il y a quelques années, les Cowboys Fringants se sont attardés au cas de la tourbière du Lac-à-la-Tortue avec leur fondation environnementale. Bien honnêtement, avant ça, je ne savais pas qu’il y avait une tourbière là et je ne savais pas tout à fait ce qu’était une tourbière. Mais les Tortulinois sont bien fiers de ça maintenant qu’ils savent que ça existe.
2- La pub de Desjardins
En plus des nombreuses vedettes, Lac-à-la-Tortue a acquis une certaine notoriété il y a quelques années après avoir fait l’objet d’une publicité de Desjardins assez diffusée. En gros, le concept de la pub, c’était qu’un gars (ou deux, je ne me rappelle plus très bien) pointait, les yeux fermés, un endroit au hasard sur une carte du Québec. Ensuite, il se rendait là pour voir s’il y avait une caisse Desjardins, question de prouver qu’il y en a partout, même dans les contrées éloignées. Pendant un temps, chaque fois que je disais que je venais de là, on me parlait de la pub. Mais là, quand je dis que je viens de là, on ne me dit plus rien pantoute vu qu’on s’en souvient plus. On ne me dit plus des trucs du genre : « Oh! C’est cute comme nom! Ils s’appellent comment, les habitants? » Des Tortulinois. « Oh! C’est cute! » Bref, on a une caisse Desjardins. Et ce qui est pratique quand tu as un compte là, c’est que quand tu perds ta carte et que quelqu’un la retrouve, t’as juste à dire que c’est écrit « Lac-à-la-Tortue » dessus et ils te la remettent sans poser plus de questions. Fait vécu. Deux fois.
3- Les touristes français dans le parking de l’église
Bizarrement, le village attire pas mal de touristes français à cause de l’aéroport (parce que oui, on a un aéroport d’hydravions, la première aviation de brousse au Canada). Quand j’y habitais encore, ils débarquaient en gros bus nolisés dans le parking de l’église, face à l’horrible salle paroissiale (qui a été refaite en pire il y a quelques années, mais qui abrite tout de même la salle de quilles avec vieilles quilles à planter). Je n’ai jamais trop compris ce qu’ils venaient voir. Quand je suis allée en France et que j’ai découvert ses merveilles plusieurs années plus tard, j’ai encore moins compris ce qu’ils venaient faire là. Il y a eu pendant un bon bout de temps un musée de l’aviation que mon ex-chum me suppliait toujours d’aller visiter, sans succès, et je suppose que ça faisait partie de la visite des Français. Je suppose aussi que c’était instructif, au moins.
4- Les plages
Normalement, s’il y a un lac, il y a aussi une plage, ou quelque chose du genre. À Lac-à-la-Tortue, c’est la plage Idéale. Dans les années 1960-1970, il y avait un bar avec hôtel et salle de spectacle qui marchait pas mal et où, selon les dires de mon père, pas mal de vedettes se produisaient, dont Gerry Boulet et les Gants Blancs (son frère Denis habite d’ailleurs le Lac). Il paraîtrait qu’il y a même eu des gros noms français et américains, mais je n’ai réussi à obtenir aucune confirmation. Bref, c’était la belle époque (rock!). Je me souviens que quand l’hôtel a été démoli, on était tous allés voir ça et qu’on avait regardé ça jusqu’à la toute fin. Il y a aussi eu la plage des Pins, qui était, en gros, la cour d’une maison privée. Pas loin, on pouvait faire du pédalo et on se faisait avertir de ne pas porter de bijoux brillants aux pieds pour ne pas se faire attaquer par les maskinongés au milieu du lac, ensemencés dans les années 1970 et étant rapidement devenus aussi gros que des petits requins. Charmant.
5- Le parc Alphonse
Alphonse Trépanier, c’était pas mal l’idole des jeunes du Lac-à-la-Tortue pendant mon enfance. Et sûrement encore un peu aujourd’hui. Et le parc d’Alphonse, c’était pas mal LA place pour se faire du fun, même ado. À la base, c’était un parc relativement normal, mais l’hiver, il y avait deux patinoires (une pour le hockey et une pour le patinage libre, avec musique kitsch qui griche en bonus) et une immense glissade à deux pistes avec des traînes sauvages de bois, AKA la meilleure chose de la vie (et la plus épeurante aussi pour un enfant). Il y avait aussi un chalet avec une table de billard pour les jeunes insolents qui ont brisé le tapis je ne sais combien de fois (une des seules choses qui faisaient fâcher Alphonse) et une petite cantine avec des suçons Life Savers. Bref, Alphonse s’occupait de TOUT ça, et encore plus. Chaque année, il organisait des voyages en bus scolaire pour la Ronde et le Village des Sports, et ça arrangeait pas mal les parents parce qu’ils n’avaient qu’à payer et à nous laisser se faire surveiller par Alphonse, qui faisait même des tirages de chocolat dans la bus. Bref, juste du fun. Merci, Alphonse. Merci vraiment.
6- Les campings et le mini-putt
À Lac-à-la-Tortue, il y a deux campings, le Otamac et le Rouillard, les deux présentant chacun des attraits somme toute non négligeables. Le Otamac, c’est le plus classe des deux, avec une vraie belle piscine, toutes les commodités, de la propreté et tout et tout. Mais surtout, un mini-putt (pas mal la meilleure raison d’y aller), qui était autrefois agrémenté de figures de bois à l’effigie de personnages de Walt Disney et autres trucs fabuleux du genre. Avec le parc Alphonse, c’était définitivement une des meilleures choses à faire au Lac pour quiconque a passé sa jeunesse là. Aujourd’hui, les figures sont disparues, mais le mini-putt marche encore, et compense pour celui qu’il y avait autrefois au Tour du Lac avec des attractions de bois à chaque trou, dont le merveilleux moulin à eau rouge au dernier. Le Rouillard, lui, a le mérite d’avoir une botte jaune géante dans le parc pour enfants et une ferme avec des animaux, ce qui lui donne un charme. En gros, les deux campings, c’est un peu comme le Rapido et le Fameux pour les lecteurs montréalais : les deux offrent sensiblement les mêmes services à deux pas l’un de l’autre, mais chacun a tout de même son préféré.
7- Le go-kart
Ça, c’est pas mal l’endroit le plus merveilleux de Lac-à-la-Tortue aujourd’hui. En gros, c’est un vieux go-kart artisanal aujourd’hui abandonné, mais qui même dans le temps qu’il marchait avait l’air abandonné et n’attirait pas grand monde. En tout cas, dans mon entourage, rares étaient ceux qui voulaient s’y risquer. Quand j’y suis allée récemment pour revoir ce qui se passait là, des gens de la maison d’à côté avaient installé une grosse piscine gonflable sur le terrain et se baignaient là, bien pénards. Mais sinon, le lieu est pas mal désert, trash à souhait, photogénique, et les règlements encore affichés sur le mur de la cabane donnent pas mal le ton.
8- Le bar
Au Lac, il n’y a qu’un bar, juste un. J’ai d’ailleurs toujours envié Louiseville pour son ratio plus que raisonnable de bars par habitant. En fait, pour être plus précise, au Lac, il n’y a qu’un « vrai » bar, dans le motel, étant donné qu’on peut quand même se saouler dans les deux restos de la ville (mais à des heures moins indues et avec plus de classe). Je n’y suis personnellement allée qu’une fois pour la fête d’une amie, et je dois dire que ça avait tous les éléments de base d’un bar : alcool, verres, serveurs, chaises pour s’asseoir, tables pour déposer nos verres, musique d’ambiance, toilettes. C’est à peu près tout ce qu’il importe de savoir.
9- La boulangerie
À Lac-à-la-Tortue, il y a la boulangerie Le Petit Boulanger, qui a une belle enseigne au néon représentant une main qui tient un gros pain de campagne, et au secondaire, quand je sortais pour prendre la bus le matin très tôt (parce qu’il n’y a pas d’école secondaire, évidemment), ça sentait la brioche à la cannelle. Des années plus tard, dans une fruiterie du Plateau, j’ai retrouvé ces brioches-là en vente, la première fois que j’en voyais en dehors du Lac, et j’en ai acheté un paquet. Fin de l’histoire. Mais tout ça pour dire que le matin, au village, ça sent bon.
10- Le coin des enfants morts
L’activité la plus glauque du Lac-à-la-Tortue, c’est la tournée du cimetière pour trouver les tombes d’enfants. Pour avoir habité juste à côté, disons que c’est une activité que j’ai faite relativement souvent, et je sais que je ne suis pas la seule. Y a rien de drôle là-dedans, mais ça remet les choses en perspective de voir des bébés pierres tombales avec des noms d’enfants morts à 8 mois, un an, trois ans. Bref, on s’occupe comme on peut dans un village où y a pratiquement aucune activité et où le lac est trop gluant d’algues ou trop pollué pour se baigner.
Lac-à-la-Tortue en images
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