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La ville de la semaine: Amos

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Alors que le Québécois moyen voit à tort Amos comme une ville abitibienne clichée de chasseurs « trippeux » de ski doos perdus dans des nuages de mouches, peu de gens savent qu’elle est en fait plus avant-gardiste que Washington.

On y est plus au chaud qu’à Montréal, ses habitants voient si grand que Régis n’ose même pas en parler de peur de se faire voler son spotlight, et on peut y manger à l’infini Party mix et Ringolos GRATUITEMENT!

Pour s’y rendre :
D’abord, il faut commencer par expliquer que la 117 ne s’arrête pas à Tremblant. Elle continue après. Donc, pour aller à Amos, tu fais comme si tu allais à Tremblant, mais tu continues après. Tu continues plus ou moins quatre heures en été, cinq si t’es en hiver, six si t’es en hiver la nuit, trois si t’es un de ces « épeurants » qui ne respectent pas la limite de vitesse. Là, tu vas arriver à Val-d’Or. Au rond-point, tourne à droite. Attends deux autres ronds-points, et au deuxième, tourne encore à droite. Roule 45 minutes. Quand tu aperçois à ta droite quelque chose qui ressemble à une grosse mosquée, tu es à Amos!!!!

1. « À Amos, il fait pas froid parce que c’est sec »

Quiconque ayant déjà abordé le traditionnel sujet du froid avec un ressortissant de « Richard Desjardins’s land » s’est automatiquement fait répondre opiniâtrement qu’en Abitibi, on a plus chaud qu’à Montréal, « parce qu’à Montréal, l’humidité passe en dessous! » Comme si l’humidité était une espèce de monstre vaporeux qui se faufile d’intérieur de manteau à intérieur de manteau pour frigorifier les gens. Il faut toutefois le concéder aux abitibiens, une fois devenu adepte de laine mérinos, du Canada Goose (en Abitibi, personne ne se fait juger ou regarder avec dédain pour « port de Canada Goose », c’est même une pratique encouragée, mais personne n’ose le porter avec des joggings gris et des UGGS ) et de la classique botte de poils de chez Fourrures Grenier (remarquez-la, elle est partout!), n’importe qui peut rester une bonne heure dehors sans bouger dans les temps les plus froids et être encore de bonne humeur après, « ça passe pas en dessous! »

2. Amos, prise comme modèle par Washington

En 2002, Ulrick Chérubin, natif d’Haïti, est élu maire d’Amos. C’est la première fois qu’un maire noir est élu au Québec (il y en a eu un avant, à Gagnon, mais cette municipalité n’existe plus, alors ça ne compte pas vraiment, tsé). Cette réalisation a su insuffler le courage qu’il manquait à Barack Obama pour croire en son rêve. The Rest Is History.

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3. Le toton d’Amos: ce n’est pas une mosquée
Bien qu’Amos soit une ville fort accueillante pour tout nouvel arrivant, ce serait quand même too much d’avoir une mosquée pour LA musulmane connue de la ville (celle qui travaille au Canadian Tire). L’énorme affaire visible de n’importe où en ville qui rappelle le Dôme du Rocher de Jérusalem est donc en fait une cathédrale de style romano-byzantin (ou « le toton d’Amos »). La cathédrale, c’est le symbole évident de la mentalité « sky is the limit » de l’amossois du début de 20ème siècle. Elle se construit en seulement 16 mois (entre 1922 et 1923), alors qu’Amos ne compte que 2000 habitants. Dans un élan d’avant-garde et d’ « over-enthousiasme », l’architecte la construit entièrement en béton pour qu’elle résiste aux feux de forêt. Il en fait ainsi un abri anti-feu, l’église pouvant alors abriter tous les habitants de la ville. Et toi Régis, ton colisée, il va pouvoir contenir tout Québec? Amos : 1. Québec : O.

4. Amos, ville de la « pédale à clip »
À Amos, c’est anormal de ne pas avoir de vélo avec les souliers qui se « clippent » aux pédales. Pour ceux qui ne maîtrisent pas le « clippage », mieux vaut dire que vous n’avez jamais fait de vélo, car de toute façon, c’est de ça que vous aurez l’air au début. Le réflexe du « déclippage » n’est pas inné chez la plupart des humains, ce qui fait que lorsque vient le moment de freiner, l’habitué du Bixi risque de rester les 2 pieds « clippés » aux pédales et d’opérer une gracieuse chute au ralenti sur le côté. Mais il faut essayer quand même. Tout le monde finit par dire « ça va tellement mieux avec des « clips », et à Amos il fait pas froid parce que c’est sec! » Cette culture de la « clip » porte ses fruits : Amos produit un nombre impressionnant de champions internationaux de cyclisme. Ils ont tous, comme Louis Garneau, déjà compétitionné au Tour de l’Abitibi, une course internationale junior reconnue par l’Union cycliste internationale, la plus importante en son genre en Amérique du Nord.

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5. Chez Frid, là où t’as du popcorn, des crottes de fromage, des pretzels, des Ringolos, des Doritos, des peanuts et du Party Mix à volonté!
Avec la mode des bars style « de région » à Montréal, « le Frid » se taillerait une place de choix. Aller « fridder » s’élèverait probablement au rang d’expression platoïdienne trendy. Chez Frid accueille ses convives avec le classique : le panache tête d’orignal. Le martini lychee ne s’y commande pas souvent, mais l’accommodement de la clientèle citadine s’y fait toujours avec le sourire (et un regard dubitatif). La grosse bière n’y est pas chère, le pool et les machine à 30 sous sont toujours disponibles, et surtout, on peut y manger infini popcorn, crottes de fromage, pretzels, Ringolos, Doritos, peanuts et Party Mix. C’est fort excitant, mais il y a toujours quelqu’un qui finit par s’étouffer disgracieusement avec un grain de popcorn. Toujours. L’hiver, on peut observer en pleine nuit des ski doos arriver de Saint-Marc-de-Figuery (15 km d’Amos) par la rivière Harricana pour venir « fridder »… et on peut les voir repartir de la même manière après le « friddage »…

6. Se désaltérer dans la joie
En 2001, Amos a remporté le prix de la meilleure eau au monde dans une compétition internationale. On dit que c’est peut-être pour ça que les amossois ont la réputation d’être les snobs d’Abitibi (ils chient quand même dans la meilleure eau au monde). Il faut l’admettre : l’eau de notre robinet goûte bon (ou rien, ce n’est jamais vraiment évident de savoir si une eau doit goûter bon ou rien pour être considérée super bonne). L’usine Eska, située à 20 km d’Amos, l’embouteille et en fait même des versions pétillantes (les Québécois doivent cesser d’acheter du Perrier). Maintenant, il faut observer les dérives causées par ce prix. Un visiteur ne peut plus passer 24 heures à Amos sans que 12 personnes tentent de lui vendre la ville en parlant de son eau, tous convaincus que l’affaire est dans le sac. L’argument béton « notre eau c’est la meilleure » est passé, le visiteur emménagera à Amos. Il faut que ça arrête!

7. Le DRAME

En août 2012, le pont du centre-ville d’Amos ferme pour être reconstruit. Le drame. Les commerçants craignent la banqueroute : leurs clients devront désormais emprunter le deuxième pont d’Amos et ainsi allonger leur trajet d’un bon quatre minutes (ce qui fait plus que doubler le temps de transport!!). Heureusement, le ministère des Transports a écouté leurs craintes; un pont d’appoint à sens unique a été installé à côté du pont en travaux pour minimiser les dégâts… Cette nouvelle dramatique a eu des répercussions partout en Abitibi. Dans un élan de solidarité, tout le monde s’est senti inquiet et concerné par les pauvres citoyens d’Amos. Pour preuve, la première chose qu’un joli garçon de Rouyn qui tentait de me draguer m’a dite fut : « Et puis? Comment tu t’en sors avec le pont? » Heureusement, j’ai quitté la ville une semaine après le début des travaux, FIOU!

8. Pour le « frencheur » romantique : belvédères et autres endroits qui mettent dans le mood

Le premier belvédère à considérer est le stationnement de l’hôpital. De là, on peut voir les deux ponts d’Amos en même temps, et ainsi sentir l’ampleur du drame décrit précédemment. Devant cette vue de la ville en désarroi, l’être désiré se sentira vulnérable et aura besoin de protection. Ensuite, le haut des escaliers à l’arrière du cégep offre une vue (je n’irais pas jusqu’à dire une belle vue, mais une vue) sur Pikogan, la rivière Harricana et la prison d’Amos. Il ne reste plus qu’à attendre d’être surpris par un étudiant en résidence qui regarde par la fenêtre pour profiter de la panique du moment afin de traîner le « frencheux » potentiel jusqu’au bord de la rivière. Si le « frencheux » est « chiâleux » et n’aime pas la bouette, le petit sentier qui mène à une section de rivière à l’abri des regards indiscrets derrière le bâtiment des sœurs de l’Assomption de la Ste-Vierge est une bonne option. (On a les sentiers de « french » qu’on peut!)

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9. Le SUCRE
Toute ville à saveur rustique du terroir se doit de fournir ses citoyens en sucreries maison. À Amos, pour ça, il y a la boulangerie La Gourmandine qui fait un super job (les macarons au chocolat sont orgasmiques). De plus, la propriétaire est mince et sportive, cela me déculpabilise de manger autant de leurs trucs car j’en déduis que ce sont des pâtisseries « santé ». Mais pour ceux qui ont parfois besoin de changement, le kiosque de la salle d’attente de l’hôpital regorge de desserts délectables : biscuits glacés aux carottes (ils fondent dans la bouche), carrés aux dattes, muffins aux framboises… c’est définitivement un must. Seul hic : le stationnement d’en face est réservé aux malades… il faut marcher un bon deux minutes pour s’y rendre, et on n’a pas l’habitude de si longs déplacements! Il faut vouloir.

10. Le Chat-O : là où tous les vins sont au prix de la SAQ+10$

Le Chat-O, c’est un de ces restaurants où tous les serveurs viennent chanter le bonne fête à toute personne à qui ça s’applique (mais attention, préparez votre carte d’identité, pas de passe-droit pour les fêtés de la veille ou du lendemain). Il est toujours surprenant de voir chacun de ses repas interrompus par au moins trois fêtes. Comment une ville d’à peine 14 000 habitants peut-elle produire autant de fêtés allant au même endroit? À ce jour, le mystère plane toujours. Ce mystère, et celui de l’excitation instinctive qui, lorsque la musique d’ambiance habituelle s’éteint pour laisser place à la musique d’anniversaire, envahit et force tous les clients du restaurant à cesser leurs confidences, conversations et plans d’affaires pour taper des mains et accompagner les serveurs chantants. L’excitation atteint ensuite son paroxysme lorsque le fêté a le privilège de tourner la ROUE D’ANNIVERSAIRE! Que gagnera-t-il? Une nuit à l’hôtel? Une girafe de bière? Ou prendra-t-il part au tirage du GROS LOT mensuel????

11. Mon propriétaire
Le gros must de mon propriétaire, c’est qu’à 87 ans, il incarne à lui-seul l’histoire d’Amos. Il y a peu d’endroits au Québec où on peut trouver des gens qui ont vu naître et évoluer une région entière. À Amos, on peut. Et sans vouloir tomber dans le « chaque fois qu’une personne âgée meurt, c’est une bibliothèque qui brûle », mon proprio m’a quand même donné la seule version féministe de l’histoire d’Amos que je n’entendrai jamais. Il est catégorique: « C’est les femmes qui ont construit l’Abitibi! ». Pour preuve, sans sa femme à lui, conquise grâce au fameux truc du « tour de machine », il aurait probablement « fait un ivrogne ». Mais malgré toute cette admiration, il estime aussi que des fois, on se complique la vie pour rien. C’était mon cas lors d’une conversation pré-élection fédérale 2011. Alors que je lui discourais des grandes questions existentielles qui me tracassaient quant à choisir à qui accorderais-je l’honneur de mon vote, il a su me ramener à l’essentiel:

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“Pis vous monsieur? Avez-vous décidé pour qui vous allez voter?”
“L’anglais la, Gnatieff”
« Pourquoi? »
« J’aime son air »
« Qu’est-ce qu’il a son air? »
« J’sais pas j’aime son air. Ya l’air poli »
« Et Harper? »
« Non non non lui j’aime pas son air »

Comment ne pas être d’accord devant le gros bon sens?

Amos en images

*** Un immense merci à la photographe Jenny Corriveau, à Marie-Ève Langlois, à Véronique Naud et à Gabrielle Rivest pour leur précieuse aide pour les photos, mes amitibiennes c’est les meilleures!