Logo

La vieille politique

Publicité

Diviser pour mieux régner. Le dicton est vieux comme le monde. De Charest à Marois, on se laisse encore prendre au jeu de la vieille politique.

Des pétitions par-ci, des manifestations par-là, la fougue avec laquelle les opposants à la « charte de la laïcité » péquiste expriment leur contestation est sûrement à la hauteur des attentes de Pauline Marois. Créer des tensions, c’est bon pour stimuler l’électorat.

D’Haïti, où la politique est déjà bien rocambolesque, c’est quand même triste de constater que malgré toutes les promesses de changement, les vieilles habitudes reviennent à la charge au Québec (corruption comprise?).

Pourtant, Pauline et ses collègues crient sur les tribunes qu’ils veulent un débat sain sur la question. À l’image d’un Jean Charest en mode négociation avec les étudiants, l’ouverture à la discussion est difficile à saisir quand les allusions populistes fusent.

Enchâsser des nouveaux articles à la charte des droits et liberté n’est pas une mince affaire. Créer une nouvelle charte de toute pièce non plus. Pourtant, la majorité des Québécois semblent d’accord avec ses grands principes : laïcité, visages découverts, etc.

Publicité

Dès le départ, les spins médiatiques et les entrevues pré-filtrées sont apparus, sans aucun chiffre sur le nombre de Québécois affectés par ces mesures annoncées. Ce n’était pas très long avant de voir un mouvement anti-immigration prendre assise sur ce discours flou. On est loin des envolées oratoires de René Lévesque, tant dans leur style que dans leur contenu, ainsi que du travail social, dont est issue la première ministre.

La division se pose donc surtout autour des signes religieux ostentatoires dans la fonction publique et parapublique. Le reste fait généralement consensus. Et même dans la fonction publique, un autre consensus se dégage, à savoir les gens en position de pouvoir (policiers, juges, etc), chez qui une très grande majorité semble d’accord pour bannir tout signe religieux.

Plutôt que de plancher sur ce qui unit, on tente de pousser un aspect provocateur d’une charte tout en disant vouloir rassembler.

Ces femmes voilées

Le voile de certaines musulmanes est le premier visé dans tous ces débats : « Intégrisme, fanatisme, sexisme, prosélytisme » d’un côté, « xénophobie et racisme » de l’autre. Si ce débat est peut-être nécessaire, il est loin d’être achevé. En fait, le Québec s’immisce ainsi dans l’éternel polémique qui anime les musulmans à travers le monde depuis des années.

Publicité

Le voile islamique se veut un acte de pudeur face aux hommes (et Dieu) pour des milliers de musulmanes à travers le monde. Même si le Coran ne fait aucune mention explicite du voile, certains croyants y voient encore la meilleure manière d’affirmer leur humilité. En soi, c’est plutôt sexiste envers les hommes, ces bêtes aux pulsions incontrôlables. Tout aussi incompréhensible à mes yeux, les vestons-cravates et tailleurs moralistes de l’Institut économique de Montréal qui reprennent les grandes lignes des théories socio-économiques de l’extrême droite nord-américaine. Dans les deux cas pourtant, ceci ne signifie pas pour autant que le dialogue n’est pas possible, tout comme une bonne entente.

Le gouvernement en place n’a certainement pas trouvé un consensus dans la population sur le port des signes ostentatoires. Peut-être qu’une vraie charte de la laïcité devrait mettre sur un pied d’égalité conviction politique et religieuse pour ainsi interdire toute trace de l’un comme de l’autre, ostentatoire ou non, dans certains postes clés de la fonction publique?

Publicité

Si le voile est décrié pour son caractère politique, il n’est certainement pas le seul.

Chez les chrétiens fondamentalistes, la croix se veut minuscule. Mais ceux-là, pourtant l’une des plus grandes menaces dans les Amériques, on s’en fout. Leur habillement répond aux normes occidentales et leurs croix sont généralement très petites.

Les cheveux colorés et un anneau dans le nez comme le No Future anticonformiste. Un foulard dans les cheveux pour marquer sa pudeur face à Allah. Les deux coexistent dans les garderies du Québec. Les deux portent un message. Aucune loi ne régit le port de signes politiques dans les garderies. Peut-être que c’est sur ces signes politiques (incluant les signes religieux) que le débat devrait se faire?

Sinon, ne tomberait-on pas dans ce qui définit la discrimination?

Dans le Québec tolérant dans lequel j’ai été élevé, les grands principes fondateurs de la société font consensus. Ils ne font pas l’affaire d’une partie de la population et pas de l’autre. En imposant l’extrémisme d’une charte peut-être nécessaire, les débats s’enveniment et aucune place au réel dialogue n’est ouverte.

Pour suivre Étienne sur Twitter : etiennecp

Publicité