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30 ans de Bande à part

La tournée 30e anniversaire de « Bande à part »

L’émission culte est de retour sur les ondes en mode nostalgie sur la nouvelle chaîne ICI Musique Rock.

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Le nom à lui seul évoque un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, comme le disait si bien le bon Aznavour.

Bande à part.

Une époque. Une émission. Des rassemblements presque aussi courus que les légendaires partys d’URBANIA. Une sorte de grand déniaisement collectif où l’industrie de la musique québécoise a collectivement tourné le regard vers le futur. Longtemps centrée autour d’une fière tradition d’auteurs-compositeurs-interprètes ultracharismatiques, c’est au tournant du millénaire qu’on a enfin commencé à varier l’offre radiophonique.

« Le public était plutôt jeune à nos spectacles. Fin vingtaine, début trentaine, peut-être ? », explique Alexandre Bernard, réalisateur de l’émission de 2002 jusqu’à son chant du cygne en 2013. « Beaucoup de gens qui avaient connu l’époque de Me, Mom & Morgentaler. Quand Malajube est arrivé, ça a frappé fort. Y’avait pas encore de musique comme ça en français. Ça a vraiment marqué l’histoire de Bande à part. »

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C’est Alexandre qui prend la barre de cette nouvelle mouture de l’émission en tant que réalisateur et programmateur. Bande à part a été ressuscitée par Radio-Canada dans le cadre de son trentième anniversaire, mais aussi du lancement de sa nouvelle chaîne, ICI Musique Rock. Toute la litanie d’animateurs de l’époque se succédera au micro pour raviver nos meilleurs souvenirs.

La passion d’Alexandre pour la musique émergente transcende les confins de son travail. Il a vu Green Day aux Foufounes Électriques, le fameux spectacle de Nirvana aussi (il les a vus deux fois, le chanceux) et assisté aux premiers balbutiements du Vans Warped Tour au parc Jean-Drapeau. « J’ai passé mon adolescence aux Foufs », affirme-t-il.

Le retour de Bande à part sera-t-il le remède servant à redynamiser une industrie du disque fragmentée et en proie aux algorithmes? Conversation avec un nerd de musique qui a vu le Québec changer.

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Chronique d’une mission accomplie

« C’est certain que je jouerai pas de chansons du nouvel album des Vulgaires Machins. Je vais laisser ça aux autres émissions sur ICI Musique Rock. Mon mandat à moi, c’est de jouer les chansons qu’on passait à cette époque-là et de recréer le contexte de l’émission », raconte Alexandre.

Un contexte aussi heureux qu’improbable. L’émission a débuté comme initiative d’une chaîne locale au Nouveau-Brunswick, avec un dénommé Pierre Landry à l’animation.

Le succès fut immédiat et le concept fut importé vers la maison mère, à Montréal, avec Vincent Martineau comme nouvel animateur pour devenir le rendez-vous des amateurs de musique qui cherchaient une alternative à, mettons, Richard Séguin.

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Rien contre Journée d’Amérique, c’est un classique de karaoké, mais ça se peut que votre trip à vous, ce soit plus Karkwa ou Mononc’ Serge. À l’époque, au plus fort de Napster, LimeWire et tous ces autres programmes de partage qui donnaient la gonorrhée à l’ordinateur familial, il n’y avait pas d’offre pour ce genre de musique au Québec. Du moins, pas sans vidéoclip comme support.

Mais ce ne sont pas que les ondes que Bande à part dérangeait. Alexandre se rappelle, entre autres, de Karlof Galovsky (du Karlof Orchestra), chroniqueur à l’émission, avec qui il faisait les quatre cents coups. « On avait crashé le lancement de l’album de la première saison de Star Académie au Métropolis. Il avait été au micro pour leur demander s’ils avaient eu des cours pour savoir comment gérer la drogue et la vie de rock star. Ça avait fait un gros malaise. Je pense que quelqu’un de chez Québecor avait perdu sa job à cause de ça. »

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En spectacle, Alexandre, Catherine Pogonat et les complices de l’époque jouissaient d’une liberté presque totale. Entre autres, Alexandre se rappelle qu’à l’occasion du spectacle anniversaire au Spectrum (ça nous rajeunit pas), il a engagé des comédiens et les a habillés en gardiens de but pour qu’ils se lancent dans la foule pendant la prestation des Dale Hawerchuk (ça non plus, ça ne nous rajeunit pas).

Alexandre me raconte aussi avoir filmé un concert de DJ Champion qui avait débuté à 4h du matin après avoir été retardé par des défis techniques dans le cadre de la première édition du Festival de musique émergente en Abitibi-Témiscamingue, avoir fait jouer le groupe électro Les Jardiniers avec des sœurs cloîtrées et avoir réuni sur scène Malajube et Loco Locass afin qu’ils interprètent ensemble leur pièce collaborative La Russe. Moi aussi, j’ignorais qu’ils avaient composé ça ensemble.

« Une des raisons qui a mené à la fermeture de Bande à part, c’est que l’on considérait sa mission comme étant accomplie. La musique émergente s’était infiltrée dans la programmation générale d’ICI Musique. On ne fait plus jouer les artistes en catimini dans le studio 12. Maintenant, ils jouent dans le hall d’entrée », raconte-t-il.

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La responsabilité de faire briller la musique émergente ne revenait plus à une seule émission, mais bien à une chaîne entière. Et, en bon grand frère qui mène par l’exemple, le rôle de Bande à part était alors de faire place à de nouvelles voix.

L’éléphant dans la pièce

Depuis trois décennies, la musique émergente a beaucoup évolué au Québec, en partie grâce à Bande à part. Mais la question à 100 $ demeure toujours : c’est quoi de la maudite musique émergente?

« À l’époque, y’avait quelque chose de contestataire dans le terme, de no bullshit. Quand t’avais un problème avec le système, le meilleur moyen de te faire entendre, c’était d’écrire une chanson. C’est pour ça qu’à mon avis, Mononc’ Serge a été le porte-étendard du mouvement pendant longtemps. Maintenant, avec les réseaux, t’as juste besoin d’écrire un statut Facebook pour t’exprimer. Alors, c’est devenu autre chose. »

Alexandre Bernard ne veut toutefois pas se risquer à redéfinir la musique émergente. « J’ai 50 ans, c’est pas à moi de faire ça. J’ai un fils de 21 ans qui est passionné de musique québécoise et qui me fait découvrir un nouvel artiste chaque mois. C’est à des gens comme lui de redéfinir ce que ça veut dire. Il y a tellement de musique qui sort par les temps qui courent. La production audio s’est beaucoup démocratisée et aujourd’hui, plein de gens enregistrent à la maison. »

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La mission est quand même de taille pour les jeunes artistes d’ici. Avec TikTok qui règne en maître sur l’industrie, les règles du jeu changent de plus en plus rapidement et le champ de bataille pour notre attention est devenu de plus en plus ardu : « Mes enfants et moi, on a de la difficulté à écouter une chanson complète. Les artistes publient moins d’albums et plus de singles pour essayer de pallier cette perte, mais tout le monde fait ça. »

Le problème dépasse la scène québécoise, mais tant qu’il reste des joueurs sur la patinoire, la partie n’est pas perdue. La mission de naviguer dans les eaux troubles de l’industrie de la musique à l’ère des réseaux sociaux et des algorithmes est plus vitale que jamais. Les jeunes musiciens et musiciennes ont besoin de leur grand frère.

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