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La série «The Affair»: l’éclatement du modèle traditionnel de couple à la télé

Quand la télé nous montre que tout n'est pas toujours rose.

Par
Mali Navia
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En m’intéressant à des séries comme Wanderlust (Netflix), The Affair (Showtime) ou même Divorce (HBO), je constate qu’il y a éclatement de l’archétype du couple dans nos produits culturels. Couples ouverts, divorce, adultère, ces thèmes sont exploités de manières plus nuancée et moins problématisés.

On s’éloigne de plus en plus de l’idée que le divorce est le plus grand des échecs. Oui, on montre que c’est difficile, mais on dit aussi pourquoi. Même chose pour l’adultère. Sans le glorifier, on montre qu’il y a souvent un rapport de cause à effet. Des patterns de couple durs à briser, une communication défaillante, des blessures mal cicatrisées accumulées, etc.

Au même titre que l’amour tout poli à la Roméo et Juliette a influencé notre conception de celui-ci, au point de nous le faire idéaliser, je me dis que l’inverse est aussi vrai. Si les histoires d’amour qu’on nous raconte sont plus fidèles à tout ce que l’amour peut être, on s’éloigne du modèle unique et de la notion manichéenne d’échec ou de réussite amoureuse.

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The Affair

The Affair est une série qui montre l’adultère d’une toute nouvelle façon. Il n’y a pas de neutralité, tout est subjectif. Nous sommes soit du point de vue de l’homme (Noah) ou de la femme (Allison) et nous assistons à la même histoire avec quelques changements d’un côté et de l’autre. Pour Helen, la femme de Noah, la situation est autre. Elle aime profondément son mari qui, selon ce que sa perspective nous montre, agit comme un narcissique.

Le spectateur n’a pas le choix de se dire que la vérité est quelque part entre les deux, mais il lui faut accepter qu’il ne la connaitra jamais.

Ce jeu de perception est un aspect vraiment intéressant à exploiter quand vient le temps d’écrire et de montrer une histoire. On joue avec l’ambiguïté. Le spectateur n’a pas le choix de se dire que la vérité est quelque part entre les deux, mais il lui faut accepter qu’il ne la connaitra jamais. C’est exactement comme dans la vraie vie quand on y pense : il n’y a pas d’objectivité pure. Nous sommes toujours influencés par les expériences qui nous ont construites et les émotions qui nous assaillent.

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De nouveaux modèles de couple

J’ose avancer que cette façon de montrer le couple comme une entité plus complexe a des répercussions saines sur nos attentes que l’on se crée face à nous-mêmes. Quand le modèle véhiculé est le mariage à 25 ans et que la seule chose qu’on voit à la télé sont des couples brisés qui voient le divorce comme la fin de leur vie, comme un échec insurmontable, on entre dans nos relations de couple avec une pression incommensurable. À l’inverse, si on commence à montrer des couples qui se brisent et s’en remettent, des couples qui restent amis ou même des couples ouverts, on lance un message comme quoi il n’y a pas qu’une façon de faire, que tout le défi réside dans le fait de trouver ce qui nous va bien à nous, sans l’influence extérieure ou la pression inutile.

Wanderlust

Cette comédie anti-romantique raconte l’histoire d’une thérapeute (Joy) et de son mari professeur (Allan) qui font face à une immense panne de désir. Leur relation ne va pas mal, tout y est : les enfants, la complicité, l’amour. Mais le désir s’est absenté. Malheureusement ou heureusement pour eux, ils le retrouvent à l’extérieur de leur mariage. Ils décident d’ouvrir leur relation d’un commun accord. Ils établissent des balises et s’en parlent très ouvertement. Là où ça se corse, c’est qu’ils vivent dans une petite ville où les ragots se propagent très vite. Et comme on le sait trop bien, qui dit « rumeurs, désir et amour », dit « jugements ».

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Encore une fois, l’histoire explore le désir amoureux d’une façon originale. Ce qui frappe, c’est la banalité de la chose. Leur vie change, mais elle n’est pas si chamboulée au quotidien (sauf vers la fin, il faut bien qu’il se passe quelque chose). On voit un couple qui va au bout des choses, qui s’explore conjointement et individuellement au maximum dans le but de retrouver une flamme qui le ferait durer. Le tout dans une transparence quasi complète (encore une fois, il faut bien quelques péripéties à l’histoire).

Dans la réflexion personnelle: une question d’équilibre authentique

Il ne faut pas non plus tomber dans l’autre extrême. Montrer une trop grande ouverture ou créer une marginalité normalisée, c’est créer le même problème à l’inverse. Véhiculer l’idée que pour être ouvert d’esprit, il faut être à l’aise dans un couple ouvert et ne plus croire au mariage, c’est quand même dire aux gens comment il faut vivre. Personnellement, je suis pour les choix personnels qui nous vont bien, peu importe les dictats sociétaires du moment. C’est ce que j’appelle « l‘équilibre authentique amoureux ». Mais est-ce possible de leur échapper complètement?

Véhiculer l’idée que pour être ouvert d’esprit, il faut être à l’aise dans un couple ouvert et ne plus croire au mariage, c’est quand même dire aux gens comment il faut vivre.

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J’ai 30 ans, je regarde The Affair et je plonge plus facilement dans la vie des parents que celle des adolescents. Alors je me dis que je suis à risque de ne pas comprendre les « nouveaux » modèles. Je suis très curieuse de savoir comment se traduiront ces nouveaux archétypes : qu’est-ce que ceux qui ont 10 ans aujourd’hui vont rejeter quand ils en auront 30? Qu’est-ce que notre génération (25-35 ans) va léguer comme normes à briser? Quelles batailles menées vaudront la peine d’être gardées?

Allez vite regarder The Affair, c’est une série qui vaut vraiment l’investissement de temps. Quatre saisons sont à voir sur CraveTV et une 5e et dernière saison a été annoncée. Wanderlust est une minisérie Netflix de 6 épisodes qui se regarde très rapidement. C’est du bonbon, l’idée est intéressante, mais j’avoue qu’elle ne laisse pas une impression aussi forte que The Affair.