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La série «His Dark Materials» : enfin une bonne adaptation des romans de Philip Pullman
Il y a quelques années, nous avons eu droit au premier volet de l’adaptation cinématographique de la trilogie À la croisée des mondes de Philip Pullman. Pour la plupart des fans, dont moi, le film a été considéré comme un échec. À l’image des premiers films d’Harry Potter, l’univers transposé à l’écran était très enfantin et avait perdu une grande partie de sa complexité. Comme prévu, le film a relativement scoré au box-office, mais ses suites n’ont pas eu le feu vert. L’oeuvre ayant un sous-texte pour le moins « hérétique », certains vont même jusqu’à blâmer l’Église catholique pour la non-continuation du projet.
Coup de théâtre: presque 10 ans plus tard, la BBC annonce qu’il y aurait une nouvelle tentative d’adaptation, cette fois en série télévisée. Le premier épisode de His Dark Materials a été diffusé sur HBO lundi dernier et est disponible en visionnement en ligne sur CRAVE. La série est-elle plus réussie que le film? Tout porte à croire que oui.
La fameuse quête de Lyra Belacqua
Pour ceux qui n’ont pas lu les livres, His Dark Materials raconte l’histoire de la petite Lyra, une jeune orpheline qui a grandi au Jordan’s College de l’université Oxford au Royaume-Uni. La petite devra se rendre dans le Nord pour sauver son ami Roger qui a été enlevé par les enfourneurs. Pour l’aider, elle se verra confier un aléthiomètre, un outil mythique et quasi indéchiffrable capable de révéler la vérité dans toutes les situations. Lyra sera la seule à pouvoir le lire et le comprendre intrinsèquement, un avantage non négligeable pour le périple qui s’annonce. Sur son chemin, elle rencontrera des sorcières, des ours en armure et se liera d’amitié avec les gitans.
En parallèle à cette histoire d’enlèvement, son oncle, le célèbre Lord Asriel tente de vaincre le Magisterium (aka l’Église avec un gigantesque É) en prouvant l’existence des autres mondes. Selon lui, tout a un lien avec la fameuse poussière qu’il a découvert dans le Nord. Celle-ci serait invisible à l’oeil nu et se poserait sur les adultes, mais pas sur les enfants. Pourquoi? Même s’il est très flou au départ, le concept de la poussière est clé dans les événements qui vont suivre.
Les « deamons »
Dans ce monde, chaque humain naît avec un animal appelé « daemons » (prononcé « démon »). Celui de Lyra s’appelle Pantalaimon. Il est dit qu’ils incarnent notre âme. Un lien sacré unit un humain et son daemon, il est impossible de s’en séparer ou de s’en éloigner. Durant l’enfance, les daemons changent de forme au gré de leur envie. Puis, à la fin de la puberté, soit à l’âge adulte, le deamon prend sa forme définitive.
Ce qui fait la beauté de l’écriture de Pullman est que les livres peuvent être interprétés à plusieurs niveaux. Le lecteur de 12 ans n’aura pas la même lecture que le lecteur de 30. À la croisée des mondes est une oeuvre avec une grande portée philosophique. On y réfléchit sur la quête d’identité, la mainmise de la religion sur l’éducation et sur ce qui fait qu’on passe de l’enfance à l’âge adulte. Est-ce l’amour? L’apparition du désir? Qu’est-ce qui fait que la fameuse poussière commence un jour à se poser sur nos épaules?
Un univers plus complexe et plus fidèle au livre
Un seul épisode a été diffusé, il est donc difficile de déterminer s’il s’agit d’une réussite. À date, on embarque. D’un point de vue esthétique, l’univers est selon moi plus fidèle aux livres. Il est plus sombre, moins poli. Ainsi représenté, il exprime mieux la complexité de l’oeuvre de Pullman.
La version de 2007 ayant été adaptée par des Américains, on constate un monde de différence entre la manière Brit et Américaine de traiter le même livre. L’un a l’air d’un film pour enfant et essaie trop fort de nous en mettre plein la vue, tandis que l’autre est d’une sobriété plus réaliste, plus intemporelle. On a d’ailleurs pu constater le même genre de différence entre les adaptations de Fantastic Beasts et celles des sept films d’Harry Potter.
Comme d’habitude, lors d’une adaptation, il faut s’attendre à un changement de rythme puisque l’action se déroule beaucoup plus vite. Cela dit, aucune frustration à l’horizon; à date, tous les événements suivent le livre de très près. Lyra est une jeune fille téméraire et têtue. Dafne Keen (Logan) livre une interprétation solide de Lyra. Fidèle à la littérature, elle est à la fois téméraire et têtue, mais aussi dotée d’une grande sensibilité.
Je ne suis pas tout à fait convaincue par Ruth Wilson en Madame Coulter et j’ai été surprise de m’attacher rapidement à James McAvoy en Lord Asriel. Son interprétation me semble plus multidimensionnelle que celle de Daniel Craig. Encore là, peut-être est-ce la qualité des dialogues – nettement supérieure – qui fait toute la différence.
À regarder? OUI! Mais surtout, à lire!
Somme toute, si vous avez aimé les livres autant que moi, j’aurais tendance à vous dire que vous ne serez pas du tout déçu de cette nouvelle adaptation. Si les livres ne se sont jamais retrouvés sur votre table de chevet encore, je vous dirais que de commencer par eux. Ils sont incroyablement bons, à 12 ans comme à 30 et j’espère pouvoir en dire autant de la série d’ici la fin de la première saison!